Algérie

El Hadj Mostefa Aslaoui



Un homme de c?ur vient de s?éteindre Au moment de quitter sa Mecheria natale pour rejoindre les bancs de la médersa de Tlemcen, le jeune Mostefa Aslaoui ne reçut pour viatique de sa mère que cette seule sentence : « Sache que le seul vrai patrimoine d?un homme, c?est sa probité. » Cette formule devait pour toujours lui dicter sa conduite à venir. Il aimait à citer sa mère qui, ne maîtrisant ni la lecture ni l?écriture, se faisait néanmoins surnommer Lalla El Fqiha, tant elle constituait une référence en matière de morale religieuse. A l?issue de ses études médesiennes, à la suite desquelles il reçut une solide formation bilingue, le futur Hadj Mostefa Aslaoui (il effectuera son premier pèlerinage aux Lieux-Saints, en 1948) entame une carrière d?interprète judiciaire qui le mena dans le pays profond, où il put observer la vie quotidienne des petites gens confrontés aux aléas de l?appareil juridico-administratif de l?Algérie colonisée. Il en gardera un esprit pragmatique, un sens aigu de l?écoute et une propension à soutenir toute personne qui le sollicitait. Sa maîtrise de la langue du dhadh et de celle de Voltaire faisait l?admiration de tous, car il était aussi bien à l?aise à citer Montesquieu qu?Ibn El Mouqafaa. Sa dévotion sereine et profonde était basée sur la conviction que l?Islam recélait en son sein ce qu?il fallait pour intégrer la modernité sans prôner l?exclusion et le rejet de l?autre. Il se plaisait à citer des versets de sourate Ennour (S. XXIV, 35, 36), dans laquelle il entrevoyait les signes précurseurs du fluide électrique, assoyant sa conviction de l?intemporalité du livre saint. Et quand notre pays sombrait dans les affres de la violence, il recourait à un hadith charif, qui décrivait dans des temps futurs, une fitna provoquée par des gens semblant maîtriser la religion, mais qui ne lui apportent que haine et désolation. Après l?indépendance de l?Algérie, l?appareil judiciaire manquant cruellement d?encadrement, les autorités publiques de l?époque ont eu recours à une génération dont il faisait partie, qui a assuré avec honneur, compétence et probité, l?administration de la justice. Nommé magistrat, il gravit les différents échelons de la justice qui le menèrent à occuper les postes de président du tribunal d?Alger, de conseiller à la cour et enfin de conseiller à la Cour suprême. Cet amoureux de la connaissance n?avait eu de cesse que d?étudier pour obtenir sa licence en droit malgré son âge avancé. Lorsque sonna l?âge de la retraite, il n?était pas encore l?heure pour lui d?en jouir avec le mérite que confère la satisfaction d?une vie professionnelle bien remplie : le garde des Sceaux de l?époque qui ne voulait surtout pas se priver de l?expérience de ce praticien du droit et fin connaisseur du personnel judiciaire, le rappelle au poste de directeur de la formation au ministère de la Justice, poste qu?il assurera durant quelques années. A l?issue de cette mission, cet homme infatigable ne se résout pas encore au repos et exerce comme avocat quelque temps encore. Il sera victime de sa probité de magistrat : ses clients, confondant sa charge avec son ancienne qualité de magistrat se dispensaient, de crainte de le vexer, de lui régler des honoraires qu?il ne fixait ni ne réclamait au demeurant. Des générations entières de magistrats ont eu le privilège de suivre l?enseignement de ce fin juriste : qu?ils aient été élèves de l?ex-section judiciaire de l?ENA ou de l?actuelle Ecole supérieure de la magistrature. Ceux qui n?ont pas eu ce privilège, l?ont connu à travers ses écrits juridiques ou les conférences qu?il se faisait un devoir de donner, à chaque fois qu?il était sollicité. A Deux Moulins, tous les habitants avaient le plus grand respect pour le président de l?association Erradja pour la construction de la mosquée dont il avait été l?initiateur. Enfin, rares sont les magistrats de ce pays qui ont eu l?honneur de voir un de leurs arrêts publié dans la prestigieuse Semaine juridique française. Tout cela dans la modestie et l?humilité qui sied aux grands hommes.Tous, nous garderons le souvenir de la dignité avec laquelle il dirigea personnellement la prière du mort, de son propre fils Mohamed Rédha, victime de la violence terroriste. Comme nous nous rappellerons qu?il a demandé au fonds d?indemnisation des parents de victimes du terrorisme de bien vouloir répartir les sommes qui lui étaient dues, à lui et à son épouse, aux parents de victimes, plus nécessiteux. Adieu si El Hadj, puisse votre exemple nous servir de modèle ici-bas.


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