Algérie

« El Ghalla » explore la naïveté et la malice du sujet chaoui



El Ghalla» (la récolte en français), dernier- né du Théâtre régional de Batna, a été écrite par Larbi Boulbina, réalisée par Ali Djebara et interprétée par Salim Oudjit et Salah Boubir.Une mise en scène minimaliste qui brise le quatrième mur et qui s'adapte au budget déri-soire alloué au théâtre depuis l'institution de l'austérité : deux tabourets, un cercueil, un tableau et deux costumes, le tout dépourvu d'éclairage. La trame relate l'arrivée à Paris de deux campagnards, partis de leur douar pour rapatrier la dépouille de leur cousin mort en exil.
Deux personnages aux profils contradictoires : Tayeb, naïf, et Ali, fourbe et rusé. Arrivé devant le cercueil, le premier pleure de chagrin alors que le second use de stratagème pour extorquer l'argent devant servir aux dépenses du rapatriement de la dépouille et difficilement trouvé au douar grâce aux dons des bienveillants.
Non seulement, puisqu'il comptait profiter du testament que laisserait le défunt ! Samir Oudjit, comédien habitué aux rôles de personnages sérieux, réussit avec brio la gageure de jouer au comique. Adoptant un accent particulier et une mimique burlesque, il arrive à susciter l'euphorie des rares spectateurs venus assister à la pièce. Paradoxalement, Salah Boubir, habitué, lui, aux rôles de comique a été cette fois-ci distribué dans un personnage sérieux !
Le choix était délibéré, nous dira Samir Oudjit, et il faut dire que les spectateurs ont apprécié le défi. Entraîné donc par les stratagèmes de Ali, Tayeb finit par céder et, s'engageant dans la fabulation, échoue dans un cabaret où sous l'effet de l'alcool, il se met à distribuer les précieux billets difficilement récoltés. Un intermède de danse et de chant qui signe le profil chaoui de la représentation.
Les dialogues, faut-il le souligner, étaient audacieux vis-à-vis de beaucoup de tabous, mais par trop réaliste quant à la véritable nature du chaoui : propos directs et rustres qui ont atteint l'objectif visé par l'auteur et employé par le réalisateur comme effet de distanciation avec le désir apparent de choquer l'assistance. Certains puristes n'ont d'ailleurs pas manqué d'exprimer leur vexation, mais les jeunes spectateurs, majoritaires, eux, ont plutôt bien reçu le message et en ont profité pour s'esclaffer.
L'épilogue nous montre les deux personnages très déçus de découvrir à leur insu que non seulement la bière était vide, car le défunt avait fait don de son corps à un hôpital, mais encore mieux, le testament n'a profité qu'à sa femme (française) et ses enfants. Sur cette fin tragi-comique, les deux compères voient tout s'écrouler autour d'eux et décident de rentrer au bercail. Une pièce qui a plu au public certes, mais qui, néanmoins, nécessite une amélioration du texte qui reste perfectible.
Enfin la rareté du public demeure la lacune majeure du théâtre qui ne semble pas trop insister sur le marketing, désormais seule et unique issue.


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