Deux ans après le séisme politique que fut le soulèvement populaire qui contraignit Hosni Moubarak à la démission en début 2011, la rue égyptienne est toujours en effervescence partagée qu'elle est entre un pouvoir qui se prévaut de la légitimité des urnes et ses adversaires qui dénoncent l'émergence d'un système autoritaire dominé par les Frères musulmans.
Le nouveau pouvoir égyptien avec Mohamed Morsi à sa tête a cru pouvoir en finir avec la crise politique qu'a ouverte la période de transition en prenant de vitesse ses adversaires en dotant le pays d'une nouvelle Constitution sur le contenu de laquelle il s'appuierait pour renforcer sa légitimité. Il a ce faisant sous-estimé l'ampleur de l'opposition à la mainmise par les Frères musulman sur les institutions du pays et du rejet que suscite le projet de société qu'ils veulent imposer à l'Egypte. Il a eu tort de penser qu'en ayant gagné la bataille du référendum sur la nouvelle Constitution égyptienne, il allait enfin obtenir la paix politique sans laquelle il ne peut espérer venir à bout de la crise économique grave à laquelle le pays est dangereusement confronté.
Non seulement l'opposition n'a pas désarmé après le scrutin du référendum, mais elle démontre qu'elle mobilise plus largement qu'elle était parvenue à le faire lors de sa campagne contre la tenue du référendum. En quelques mois de pouvoir, Mohamed Morsi et les Frères musulmans ont confirmé aux yeux d'une frange de l'opinion égyptienne plus large que celle que composent les partisans de l'opposition, tout le mal que celle-ci dénonce dans leur façon de diriger le pays. L'anniversaire de la deuxième année du soulèvement anti-Moubarak donne de ce fait à constater que le reflux de la contestation sur lequel ont tablé Mohamed Morsi et ses partisans Frères musulmans et autres islamistes, est loin de s'être concrétisé. Sa commémoration a donné lieu au contraire à des démonstrations de protestation contre le pouvoir des Frères musulmans d'une ampleur qui rappelle ce que l'Egypte a vécu durant la révolution de la place Tahrir.
Les milliers de manifestants qui y participent sont aussi déterminés que le furent les « tombeurs de Moubarak ». Ils sont d'ailleurs les mêmes qui ont reçu le renfort des déçus de Morsi et des Frères musulmans. Depuis avant-hier, de pacifiste leur démonstration de force est devenue affrontements violents qui font craindre le risque d'un basculement aux dérives dangereuses pour l'unité nationale de l'Egypte. Des dérives dont on constate toute la gravité potentielle avec ce qui s'est passé avant-hier et hier au Caire, mais aussi à Port Saïd, Ismaïlia et Port Suez. Elles ont pris la forme de confrontations sanglantes et meurtrières entre manifestants et forces de l'ordre. A un point tel que Mohamed Morsi a dû donner l'ordre à l'armée de se déployer pour y mettre un terme. La détermination des adversaires du pouvoir est cependant telle qu'elle ne fléchira pas uniquement parce que l'armée va tenter de les dissuader de poursuivre leur combat contre le pouvoir de Mohamed Morsi.
Le président égyptien doit donner les gages qu'il renonce à vouloir reproduire un système autoritaire sous la férule des Frères musulmans dont il est issu. L'armée à laquelle il a fait appel est maintenant encore mieux en droit au vu du développement de la crise politique égyptienne pour renouveler son appel au dialogue national entre ses acteurs, qui ne peut s'esquisser qu'au cas où Morsi renonce sans ambiguïté à la manière forte dont il use à l'égard de ses adversaires et que les Frères musulmans cessent de s'attaquer aux espaces où leurs détracteurs peuvent manifester leur opposition et exprimer leurs revendications. Mais démocrates, les Frères musulmans ont fait semblant de l'être tant qu'ils ont été dans l'opposition. Au pouvoir, ils se révèlent pour ce qu'ils sont réellement et de toujours.
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Posté Le : 27/01/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Kharroubi Habib
Source : www.lequotidien-oran.com