Moubarak semble
clairement mis hors jeu depuis déjà plusieurs jours. Les tractations en cours
au sein de l'état-major de l'armée égyptienne, qui constitue l'épine dorsale du
régime depuis 1954, sont à porter en premier lieu sur le compte de l'absence de
véritable consensus quant au choix de Omar Souleymane pour succéder au
président Moubarak.
Sur le terrain
des déclarations, l'ambiguïté du discours de l'armée reflète en ce sens les
vues contradictoires qui agitent cette institution opaque qui tient encore dans
la réalité les principaux leviers du pouvoir. Déterminée à jouer le rôle
d'arbitre unique dans la définition de l'après-Moubarak, l'armée semble encore
peu enthousiaste à vouloir adouber dans la durée Omar Souleymane à la tête du
pays.
Perçu par les
officiers de haut rang les plus jeunes et par une partie de l'ancienne garde de
l'état-major comme l'homme d'Israël et de Washington, le personnage suscite
autant de méfiance qu'il inspire la crainte au sein des arcanes du sérail. Depuis
longtemps en charge du dossier israélo-palestinien, le puissant chef des
services et désormais vice-président donne aux yeux de ses principaux
détracteurs l'image d'un homme ayant passé ces dernières années plus de temps à
Tel-Aviv que dans la capitale égyptienne.
De surcroît,
directement impliqué, selon de nombreux rapports d'ONG de droits de l'homme,
dans les opérations d'exfiltration de militants islamistes arrêtés par la CIA
pour être torturés en Egypte, celui qui fut l'homme lige de Moubarak doit composer
avec toutes les parties en présence pour assurer cette fameuse transition
démocratique demandée par le peuple égyptien et par les chancelleries
occidentales.
Un personnage clé
du régime reste pourtant encore assez peu cité par les grands médias. Il s'agit
de Sami Annan, chef d'état-major de l'armée et potentielle alternative au cas
où la greffe Souleymane ne prenait pas. L'homme, plutôt discret, jouit d'une
certaine cote de popularité parmi la population et a reçu le soutien implicite
de la confrérie des Frères musulmans qui loue son intégrité. Ce dernier a joué
aussi un rôle décisif dans la décision de l'armée d'adopter une attitude de
neutralité lors des premières manifestations.
Pour l'heure, le
pouvoir égyptien temporise et a fait le choix de la stratégie du pourrissement,
aidé en cela par l'organisation calculée de contre-manifestations violentes
rassemblant des groupements hétéroclites de voyous et repris de justice, ces
fameux « baltaguias », encadrés par la police et les agents des « moukhabarates
». Une pratique bien éprouvée dans le passé en Algérie et en Amérique latine et
qui peut se révéler redoutable pour casser la dynamique des mouvements de masse
contestataires.
D'ailleurs, selon
de nombreux témoignages locaux, de plus en plus d'Egyptiens, terrorisés par les
violences actuelles, se sont résolus à accepter le maintien de Moubarak par
peur du risque d'escalade et de guerre civile.
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Posté Le : 05/02/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Hichème Lehmici: Le Caire
Source : www.lequotidien-oran.com