Algérie

Ecrivains publics : Une bouée de sauvetage pour les illettrés



Ecrivains publics : Une bouée de sauvetage pour les illettrés
Photo : Makine F. Ils sont huit écrivains publics à se partager le petit espace du préau menant au parking du 1er-Novembre. Ni le vent qui soufflait, ni le bruit des moteurs et les klaxons des véhicules qui circulent le long du boulevard, ni le va-et-vient des passants ne les gênent tant ils sont absorbés par leur travail qu’ils accomplissent tant bien que mal. Dans cet espace, seul le cliquetis des touches des machines à écrire se fait entendre et attire les curieux. Une table et deux chaises pliables, une machine à écrire portative qui a survécu aux temps, voilà les outils de ces scribes. Et n’allez pas croire qu’ils sont devenus has been. Les clients sont légion à solliciter leurs services.  «C’est un métier au service des illettrés, c’est un trait d’union entre les demandeurs et l’administration », philosophe l’un d’eux. On s’adresse à eux pour un courrier ou un formulaire administratif, un certificat d’hébergement, et même pour un chèque. A l’exemple de cette vieille dame qui n’a pas trouvé au niveau de la poste une personne pour remplir son mandat. Alors elle a sollicité Athmane Belhadj. Âgé de 40 ans, ce dernier exerce ce métier depuis une dizaine d’années. Auparavant, il était comptable dans une entreprise publique.La paye était maigre. Avec ce métier, il a trouvé son compte. «Je reçois pas moins de 10 clients par jour», dit-il. Le service est monnayé entre 50 à 200 DA. Travailler sur un micro-ordinateur est un rêve que Athmane caresse depuis plusieurs années. Mais ce n’est pas possible du fait qu’il travaille dans la rue au gré du vent, de la pluie et du soleil. A l’aise que ce soit en arabe ou en français, il lui arrive souvent de n’empocher aucun sou quand il s’agit de remplir un formulaire d’une seule page ou d’aider une personne âgée à remplir un chèque ou un mandat.En face de lui, c’est Ali Amane, greffier à la retraite. Cela fait 20 ans qu’il campe dans cet espace au point d’avoir de fidèles clients. Certains d’entre-eux, lui confient même des dossiers de justice « que je dois traiter à tête reposée à la maison». Il voit dans son métier une certaine noblesse « j’ai de beaucoup de gens qui ne savent pas lire». Sa spécialité est la traduction vers l’arabe des documents de justice en français. Slimane Hadji, lui  s’est spécialisé la rédaction des recours et des demandes d’emplois avec curriculum vitae (CV). Les jeunes demandeurs d’emplois sont ses fidèles clients.Entre deux âges, Slimane travaille pour arrondir ces fins de mois. «Les gens qui me sollicitent le font généralement pour gagner du temps notamment pour établir une déclaration de perte, une déclaration sur l’honneur ou un certificat d’hébergement dans les deux langues», observe-t-il. Mais le plus gros de son travail consiste à rédiger des demandes de rectificatif de nom à l’adresse de la justice. «Mes clients découvrent souvent, lors du retrait d’un papier administratif l’erreur, et là commence les vrais problèmes», précise-t-il. L’écrivain public devient, à son corps défendant, «un assistant social» qui non seulement rédige les papiers nécessaires, mais oriente et recommande les clients à telle ou telle connaissance. C’est alors que la vocation de ses scribes change. Forts de leur expérience relationnelle et humaine ils consolident d’une certaine manière les liens sociaux ne serait-ce que parce qu’ils  rendent service à des milliers de personnes à la recherche d’un emploi. Ils permettent aussi  aux personnes âgées et les plus démunis de s’insérer dans la société.


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