Algérie

Ecrire l'histoire et se réapproprier le présent



Ecrire l'histoire et se réapproprier le présent
Ce musée, qui détient d'importantes collections de photographies des différentes résistances populaires ainsi que de beaux spécimens de magazines et de livres traitant de la Guerre de Libération nationale et de l'histoire de la région d'Oued Righ, avait bénéficié d'une opération de restauration et de réhabilitation d'un montant de plus de 16 millions de dinars, qui a rehaussé sa position de lieu de culture et de salle des grandes réceptions dans la wilaya déléguée de Touggourt.Les moudjahidine qui se sont succédé à la tribune du café littéraire de Ouargla, organisé dans la soirée du 31 octobre au 1er novembre dernier, ont, par ailleurs, souligné la nécessité absolue d'effectuer une travail de collecte et d'enregistrement des témoignages au niveau de toutes les régions du pays, et spécialement le Sud, dont le rôle crucial et décisif dans le soutien logistique et matériel de l'effort de guerre nationale «n'a pas encore bénéficié de la vulgarisation et de la recherche à même d'apporter la lumière sur une partie de l'histoire de l'Algérie» a déclaré Slimane Hakkoum, historien autodidacte de Ouargla.Lors d'une rencontre inaugurale du programme annuel du café littéraire de la ville de Ouargla, qui a choisi la date symbolique du 1er novembre pour ressusciter, après deux ans d'éclipse. Outre les festivités qui ont quasiment touché tous les quartiers des principales villes de la wilaya, notamment les placettes jouxtant les Hôtels de Ville où de beaux spectacles de lumières, de fantasia et de musique ont tenu en haleine une foule, nombreuse cette année à s'être déplacée dans les lieux publics pour fêter le 1er novembre, la maison de la culture Moufdi Zakaria a abrité une soirée dédiée au chant patriotique et particulièrement à l'opérette, un genre musical très apprécié. Le stade municipal de Ouargla a reçu ses cavaliers et troupes traditionnels de Ghaita et Karkabou, au moment où des témoignages, preuves à l'appui se sont déroulées place Sedrata, à la faveur de la tenue du café littéraire tenu en plein air pour marquer l'occasion.Zone logistique, mais pas que?Un témoignage-clé de Belarbi Abdeljabbar de Taibet est venu éclairer les pratiques d'aide à la fuite des moudjahidine les plus recherchés. «Ils étaient cachés dans les Damous de Boumada, de Sidi Boughoufala, de Aïn Beida, de Chotte ou de Ngoussa chez Hadj Lasmar», explique Slimane Hakkoum. «Le 29 novembre 1955, un PV de réunion publié par feu Belkacem Saadallah met en exergue la vocation de zone logistique du Sud algérien», souligne l'orateur, expliquant que «les opérations militaires étaient prohibées dans le Sud algérien, un territoire entièrement dédié à la lutte civile par le biais des mousabbiline et l'approvisionnement en armes, mais aussi comme ligne de rétroaction».Dans ces témoignages qui remontent les pendules du temps jusqu'aux années 1950, Ouargla était une ville garnison, où il était impossible de circuler sans être filé. «Dans la seule ville de Ouargla, huit bases militaires étaient implantées à divers points stratégiques pour tenir la population sous surveillance, et malgré toutes ces précautions, le peuple a trouvé un circuit logistique aussi efficace qu'ingénieux pour faire parvenir les cotisations et les aides en nature, particulièrement les dattes sèches et conservées pour permettre aux soldats de s'alimenter avec ce fruit léger à transporter sur soi et riche en nutriments essentiels». Hadj Miloud Messaoudi Kada, trésorier, présentera à l'assistance ses registres de cotisations comptant plus de 450 femmes et autant d'hommes ayant participé à l'effort de guerre, en envoyant de l'argent aux moudjahidine sur le front.Ce registre, le dernier à rester en possession de son détenteur, est remarquable par sa tenue, ses dates, ses montants exprimés en chiffres et en lettres mais aussi sa conservation après tant d'années en souvenir d'une époque révolue dont il parle avec beaucoup d'émotion devant un public avide qui a pris des photos et demandé des explications sur ce volet financier non exploré.Le Melhoun, épopée d'une révolution La seconde partie de la soirée du café littéraire a été rehaussée par trois beaux poèmes du poète populaire Mohamed Benjdia. Champion du verbe et du vers en arabe dialectal, Benjdia est à Ouargla l'incarnation de la poésie saharienne qui retrace l'anthologie du mouvement de lutte nationale.De diverses façons et avec forces détails, dates et personnages, Mohamed Benjdia dresse devant un public conquis la chronologie d'une guerre sans répit, d'un nationalisme défiant une armée installée en zone urbaine et dont l'acharnement est devenu plus féroce après la découverte du pétrole. Rappelant les différents soulèvements populaires refusant la séparation du Sahara algérien de la mère patrie Algérie, Benjdia, tel un bâtisseur, imbrique une à une les pierres de la mémoire collective qui consignent l'histoire commune du pays et rappellent à la jeune génération et dans la plus belle des langues, celle du peuple, et dans un discours empreint de métaphores et de sagesse poétique, qu'il y a beaucoup de choses à partager dans ce pays.A Ouargla, où la radio locale est l'une des rares stations à consacrer une émission dédiée au melhoun qui sillonne toute l'Algérie à la recherche de poètes connus et moins connus, la poésie populaire est très appréciée et garde tout son attrait, si bien qu'elle est toujours présente lors des journées nationales et religieuses.L'intérêt du café littéraire à cette culture populaire émanant d'un mouvement intellectuel qui su consigner l'histoire du Sahara et de l'Algérie entière trouve aussi son écho à l'université, où une formation en master tente de lancer une recherche scientifique dans le domaine du patrimoine oral du sud-est du pays. Des efforts louables, dont la multiplication renforce le traditionnel Okadhia du melhoun qui se tient régulièrement à Ouargla et qui fait de cette ville un carrefour incontournable de la poésie populaire et de la mémoire collective nationale.


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