Algérie

ÉCLAIRAGE CÉRÉALICULTURE : Vivre avec la sécheresse



Publié le 30.09.2023 dans le Quotidien Le Soir d’Algérie
Par Maamar Farah

Au moment où le calendrier indique que c'est l'heure des labours-semailles, les agriculteurs des hauts plateaux et des zones steppiques restent perplexes : quoi labourer quand le sol, asséché et appauvri après l'une des pires sécheresses du siècle, n'a pas reçu encore ce minimum d'eau qui empêchera la terre de partir en poussière au moindre contact avec la charrue ?
La céréaliculture en Algérie, en particulier dans les hauts plateaux et les zones semi-arides, est désormais confrontée à un défi de taille : les sécheresses répétitives. En effet, il ne s'agit plus de sécheresses cycliques comme on en connaissait il y a quelques années encore, mais d'une donnée naturelle qui va devenir permanente.
Ces sécheresses successives ont eu un impact significatif sur les rendements de la culture du blé, une culture vitale pour l'alimentation du pays.
Nous allons explorer les défis actuels et envisager des solutions innovantes pour garantir de bonnes récoltes, tout en examinant des expériences réussies dans d'autres pays aux conditions climatiques similaires.
Les hauts plateaux et les zones semi-arides d'Algérie sont caractérisés par des précipitations irrégulières et souvent insuffisantes. Les sécheresses répétitives ont un impact dévastateur sur les cultures de blé, réduisant les rendements et mettant en péril la sécurité alimentaire du pays. Face à ces défis, il est impératif d'explorer des solutions novatrices.
Solutions et Approches Innovantes

1. L'agriculture de conservation, qui vise à préserver la santé du sol et à réduire l'érosion, peut être une solution. En minimisant le labourage excessif et en utilisant des techniques telles que la couverture végétale, les agriculteurs peuvent améliorer la rétention d'eau dans le sol, ce qui est crucial pendant les périodes sèches.

2. L'adoption de variétés de blé adaptées aux conditions climatiques et résistantes aux maladies et aux ravageurs. Ces variétés peuvent être obtenues par des techniques de sélection conventionnelle ou assistée par marqueurs, qui permettent d'identifier les gènes impliqués dans la tolérance au stress hydrique, thermique ou salin. Par exemple, l'Institut national de la recherche agronomique d'Algérie (INRAA) a développé plusieurs variétés de blé dur et de blé tendre adaptées aux zones semi-arides, telles que Waha, Atlas, Simeto, Mahon Demias et Vitron.

3. L'amélioration des pratiques culturales, qui visent à optimiser l'utilisation de l'eau, des engrais, des pesticides et des semences. Ces pratiques comprennent la rotation des cultures, qui permet de diversifier les sources de revenus et de réduire les risques de maladies et de mauvaises herbes, la fertilisation localisée, qui permet de réduire les pertes d'azote et d'augmenter l'efficience de l'engrais, le semis direct, qui permet de préserver la structure du sol et de limiter l'érosion, et le semis précoce, qui permet de profiter des pluies d'automne et d'éviter les stress thermiques en fin de cycle.

4. Le recours aux technologies de l'information et de la communication (TIC), qui permettent de collecter, de traiter et de diffuser des données pertinentes pour la gestion de la culture du blé. Ces technologies comprennent les systèmes d'information géographique (SIG), qui permettent de cartographier les zones potentielles et les contraintes de la production céréalière, les capteurs et les drones, qui permettent de surveiller l'état de la culture et de détecter les besoins en eau et en nutriments, les modèles de simulation, qui permettent de prédire le comportement de la culture et de tester des scénarios de gestion, et les plateformes numériques, qui permettent de diffuser des informations et des conseils aux agriculteurs.

L'exemple des expériences réussies ailleurs
Ces solutions et approches innovantes peuvent s'inspirer d'exemples d'expériences réussies dans d'autres pays confrontés à des conditions climatiques similaires, tels que les États-Unis, l'Australie ou l'Espagne. Ces pays ont mis en œuvre des programmes de recherche et de développement visant à améliorer la productivité et la durabilité de la culture du blé dans les zones semi-arides, en impliquant les acteurs publics, privés et associatifs. Parmi les résultats obtenus, on peut citer :
- L'introduction de variétés de blé dur et de blé tendre à haut rendement et à qualité technologique et nutritionnelle, adaptées aux conditions de sécheresse, de salinité et de température élevée, ainsi qu'aux maladies fongiques et aux insectes nuisibles. Par exemple, en Australie, le programme National Wheat Breeding a permis de développer des variétés de blé dur telles que Yawa, Kalka et Tamaroi, qui présentent des rendements supérieurs de 10 à 15 % à ceux des variétés traditionnelles dans les zones à faible pluviométrie.
- Le développement de systèmes de culture innovants, basés sur la conservation des sols, l'optimisation de l'irrigation, la gestion intégrée des ravageurs et des maladies, et l'utilisation de cultures de couverture ou de légumineuses en rotation. Il s'agit de tester et de valider des pratiques culturales améliorées, telles que le semis direct, la fertilisation localisée, l'irrigation déficitaire contrôlée et la lutte biologique, qui ont permis d'augmenter les rendements de 20 à 40 % et de réduire les coûts de production de 10 à 20 %.
- L'utilisation des TIC pour le suivi et la prise de décision en matière de gestion de la culture du blé. Par exemple, en Tunisie, le projet Smart Wheat a permis de développer une plateforme numérique qui fournit aux agriculteurs des informations en temps réel sur les besoins en eau et en engrais de la culture, ainsi que des alertes sur les risques de maladies et de ravageurs, à partir de données collectées par des capteurs installés dans les parcelles et des images satellites.
La céréaliculture en Algérie, notamment dans les hauts plateaux et les zones semi-arides, est confrontée à des défis importants qui nécessitent des solutions et des approches innovantes pour améliorer les rendements de la culture du blé. Ces solutions et approches peuvent s'inspirer d'exemples d'expériences réussies dans d'autres pays qui ont su adapter la culture du blé aux conditions climatiques difficiles, en mobilisant les ressources génétiques, les pratiques culturales et les technologies de l'information et de la communication.
Mais ces défis ne peuvent être surmontés que si un changement de mentalité s'opère au niveau des décideurs et des agriculteurs qui doivent s'imprégner de la nécessité d'introduire des solutions innovantes pour vivre avec la sécheresse.
M.F.




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