Entre les propos
absurdes du commissaire du salon du livre et la démission de Saâdane, il y a
tout un pan de la gouvernance dont la démolition devient impérative pour
permettre sa reconstruction sur des bases plus ou moins saines.
La démission
samedi du coach de l'équipe nationale n'a été une surprise pour personne. Elle était
déjà dans l'air depuis très longtemps. Rabah Saâdane n'a fait que céder sous la
pression de ceux qui n'attendaient que le moment propice pour lui faire porter
le chapeau de l'échec d'un simulacre nommé «les Verts». Celui d'une équipe
nationale dont le choix des hommes -dirigeants compris- était comme fait pour
entretenir la débâcle.
Le coach semble aujourd'hui être ce parfait
fusible qui devait absolument sauter en cas de faux pas. Et des faux pas, il y
en a eu depuis que la fédération a commencé à bomber le torse pour se targuer
d'avoir érigé une équipe nationale qui n'en a jamais été une au sens propre et
figuré du terme. Un ministre qui a été de presque tous les déplacements de
l'équipe lors de son péril africain, un staff technique qui n'a jamais réussi à
cacher ses défaillances et les divergences qui rongent ses membres, une
incompatibilité d'humeur flagrante entre le président de la FAF et le coach,
des joueurs qui semblent avoir trouvé leur compte en jouant sur les sentiments
de l'un et de l'autre responsable, le tout ne devant assurément pas mener bien
loin en termes de performances sportives Ceux qui ont fait le déplacement en
Angola pour la coupe d'Afrique, racontait avec stupéfaction l'entêtement de
certains joueurs à contredire les directives de Saâdane jusqu'à taper des pieds
et finir par bouleverser l'ordre du jeu qu'il avait établi. Fallait-il que
Rabah Saâdane accepte aussi simplement de rendre le tablier sans un décompte
des responsabilités? La question n'est même pas à poser quand on sait qu'en cas
de débâcle d'une entreprise (du verbe entreprendre) nationale, il faut bien que
quelqu'un paie. Son refus de partir n'aura rien changé à la situation. La
politique des boucs émissaires a une bien longue histoire nationale. Il en sera
toujours ainsi tant que la gouvernance voguera au rythme du chant des sirènes
et le pouvoir s'exercera à l'intensité des querelles de chapelles et aux bons
vouloirs d'officines en mal de légitimité. Saâdane devait être sacrifié -il
savait qu'il allait l'être- et il l'a été. Son grand tort, c'est d'avoir
accepté de faire de la figuration dans des moments décisionnels tout au début
de la constitution même de l'équipe nationale. A commencer par accepter que la
majorité des joueurs ne devaient venir que d'ailleurs, pénalisant ainsi les
locaux et bridant même leur évolution vers un véritable professionnalisme.
Etant entendu que ces derniers étaient ainsi «d'office» interdits d'espérer
porter un jour le maillot national et ce quel qu'en soit leur niveau.
Quand l'intellectualisme
cède la place à l'ignorance
«L'équipe
tanzanienne était bien préparée parce que tous ses joueurs sont des locaux,»
avait déclaré Saâdane à la fin du match de vendredi. Un «petit» aveu de
dernière instance qui laisse deviner le degré de confusion en matière de choix
«physiques» et «techniques» qui devaient pourtant être fait au sein de la FAF
pour une évolution saine et bien sportive de l'équipe nationale.
La démission de
Saâdane montre à quel point le staff dirigeant de l'équipe nationale et la FAF
dans toutes ses composantes, reflètent la déchéance de tout un mode de
gouvernance. Mode dont les inepties et les absurdités minent le pays dans ses
profondeurs. Les niaiseries «commises» par le commissaire du salon du livre
répondent incontestablement à une même logique. Les organisateurs du salon du
livre qui doit se tenir en octobre prochain à Alger, à commencer par le
ministère de la Culture, tutelle de l'événement, en sont tous concernés. Ils en
sont coupables de par le silence qu'ils entretiennent face à une bévue qui fait
honte à l'esprit intellectuel. Le refus du commissaire du salon du livre de ne
pas inviter les éditeurs égyptiens ne semble ainsi choquer aucun responsable
politique. Le laisser délirer alors qu'il a été chargé d'accueillir la pensée
intellectuelle dans toute son abondance et sa diversité relève en tout cas,
d'un état de déliquescence du pouvoir décisionnel qui donne froid au dos. Tout
autant que Rabah Saâdane pour ce qui est du choix des joueurs et de leur
titularisation, Smaïl Meziane, responsable des éditions Casbah, n'a pas été
désigné commissaire du salon du livre pour décider seul de son organisation et
des invités qui doivent l'animer. D'autant que ceux qui ont choisi Meziane
savent qu'il n'a pas les qualités intellectuelles requises pour entreprendre et
réussir une sélection d'invités aussi noble. Ils ont fait pire. Ils l'ont
conforté dans son choix d'aligner la souveraineté du pays et le degré
d'intellectualisme de toute une nation sur les coups de talons de joueurs de football.
Ils n'en sont pas à une dérive près. Ils ont permis à des réalisateurs de
projeter un spot publicitaire où un morveux d'adolescent toise ses parents pour
les obliger à lui acheter une vulgaire recharge téléphonique, le tout tourné
dans une atmosphère de dégradation de mÅ“urs odieuse. Dans ce niveau ambiant
d'ignorance et d'incompétence, l'opinion publique algérienne est obligée de
faire dans l'escapade télévisuelle. «La lecture pour tous» est un spot
publicitaire qui passe en boucle sur un des supports médiatiques égyptiens.
C'est un appel qui est fait aux jeunes et moins jeunes pour lire sans
modération. Ce qui devrait laisser méditer Smaïl Meziane et ceux qui l'ont
nommé commissaire du salon du livre.
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Posté Le : 06/09/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ghania Oukazi
Source : www.lequotidien-oran.com