Algérie

Du pain sur la planche pour la presse



Rédacteur en chef du quotidien Les Débats, Aomar Fekrache évoque les contraintes que rencontrent les journalistes dans l'exercice de leur profession. Il estime que la liste des maux est longue. Deux points prioritaires doivent être, à ses yeux, pris en charge : la formation et l'accès à l'information. Son raisonnement est clair : « on ne pourra parler d'une presse moderne et professionnelle que si ces deux leviers sont pris en charge », lance-t-il. La corporation devrait, ajoute notre interlocuteur, veiller sur son image de marque, à savoir donner une information authentique.Pour lui, le citoyen a droit à deux choses : une information crédible et une publication de qualité. « C'est le seul garant de la pérennité mais aussi de la réussite des médias », avance-t-il, non sans renchérir dans ce sens que l'Etat a un grand rôle à jouer. Rédacteur en chef adjoint au quotidien Le Temps d'Algérie, Saïd Mekla indique que le journaliste algérien subit au sein des entreprises éditrices une pression terrible. « Pression éditoriale qui n'est pas de nature à favoriser l'information fiable et sûre dans un climat médiatique particulier et hélas en perpétuelle régression », souligne-t-il. Il estime que la recherche du sensationnel dénude on ne peut plus l'information de son sens, d'où des approximations voire des faux scoops souvent relevés. Mais, selon lui, le journaliste subit des pressions d'une toute autre nature. Il affirme que le plus gros obstacle qu'il rencontre est celui de la difficulté de l'accès à l'information. « En dépit des assurances du gouvernement, qui a même organisé un colloque sur la question en 2013, la situation demeure la même. Le journaliste est souvent mal considéré, parfois malmené, et par les responsables d'institutions publiques ou privées, et par le citoyen lambda qui le considère souvent comme « suspect », déplore-t-il.Selon lui, le défi actuellement pour la presse est de se remettre au travail professionnel d'abord, ensuite à s'organiser en vue de « défendre » sa place.« Une place à conquérir, des lignes rouges à franchir »Journaliste à El Watan, Mohand Aziri estime que la presse algérienne a encore une place à conquérir et des lignes rouges à franchir. Il soutient, contrairement aux nostalgiques de l'ancien collège, que la presse ne vit pas une fin de l'époque. Pour lui, la nouvelle génération de journalistes est plus que jamais décidée et déterminée à poursuivre le combat et porter haut et fort le flambeau, en dépit des carences en matière de formation.Il souligne que l'évolution de la presse est un fait réel que personne ne peut remettre en cause. Toutefois, la puissance de l'argent, pense-t-il, menace la liberté d'expression. Selon lui, le pouvoir de l'argent et l'autocensure empêchent l'épanouissement des médias. A cela s'ajoute la baisse des revenus publicitaires qui menace la presse dans son existence. Journaliste au Courrier d'Algérie, Hacen Nait Amara abonde dans le même sens évoquant l'accès à l'information comme l'une des principales entraves à l'exercice du métier de journaliste.Il regrette le fait que les sources de l'information soient verrouillées. Pourtant, rappelle-t-il, le code de l'information garantit cet accès. Notre interlocuteur déplore, également, l'attitude de certaines institutions, pour ne pas dire la majorité, qui font de la rétention de l'information son modus operandi. Mais pas que ça ! Il dit que des institutions ne communiquent pas et ne sont pas dotées de véritables cellules de communication et qu'elles (institutions) ne sont pas à la page des évolutions technologiques en termes d'utilisation des outils technologiques.Baisse des revenus publicitaires, une sérieuse menaceDes journaux traversent une période difficile au point qu'on entend les échos de leur « disparition » annoncée. La crise frappe de plein fouet de nombreuses publications, suite à la baisse des revenus publicitaires. Les « petits quotidiens » sont plus vulnérables. Journaliste au Soir d'Algérie, Kamel Amarni fait son constat : 90% des journaux vont fermer si les choses ne s'améliorent pas en termes de recettes publicitaires. Le journaliste estime que les perspectives sont sombres pour les professionnels de la presse. Les conséquences seront fâcheuses. « Un drame social est à prévoir », lâche-t-il. Des milliers de salariés vont se retrouver au chômage. Un coup dur aussi pour les étudiants inscrits dans les universités et les écoles de formation de journalisme.Horizons bouchés 'M. Amarni fait le distinguo entre la publicité institutionnelle et privée. D'abord, s'agissant de la publicité privée, il dira que les principaux annonceurs, à savoir les opérateurs de la téléphonie mobile, et les concessionnaires automobiles, ont subi fortement la crise économique qui s'est répercutée « durement » et soudainement sur les journaux. Résultat ' Les annonceurs voient leur budget communication diminuer. « Si avant la crise, ils travaillaient avec plusieurs titres de journaux, aujourd'hui, ils ne le font qu'ave un nombre de titres très réduit », a-t-il souligné.Kamel Amarni a évoqué un autre problème. La répartition de la publicité institutionnelle, notamment en direction des journaux privés. Il dit que la répartition n'obéit à aucun critère convaincant. IJournaliste à El Watan, Madjid Makedhi soutient que la baisse des revenus publicitaires est ressentie violemment par la majorité des quotidiens. Il indiquera que la majorité des titres vivent une situation « difficile », voire « critique ». Selon lui, ils risquent de « mettre la clé sous le paillasson ». M. Makedhi précise que le marché de la publicité n'est pas géré selon des règles clairement définies.




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