Algérie

Du nid du djihadisme au rêve sud-américain



Dans le cadre du 8e Festival international du cinéma d'Alger (Fica), dédié au film engagé, le public a découvert Molenbeek, génération radicale ' et On revient de loin (Opération Corréa). Deux documentaires aux thématiques différentes, mais qui sont liés par le combat de ses acteurs : lutte contre la pauvreté, la criminalité, la ghettoïsation...Ouvert vendredi dernier, le 8e Festival international du cinéma d'Alger (Fica) a été marqué au premier jour de la compétition officielle par la projection de films documentaires abordant des thématiques diverses : de la stigmatisation des banlieues belges, et la "révolution" de l'Equateur face au diktat des multinationales. Cette manifestation, dédiée au film engagé, a été entre autres ponctuée aussi par des fictions telles qu'En attendant les hirondelles (Algérie) de Karim Moussaoui, et Ciel rouge (France-Vietnam) d'Olivier Lorelle. Dans la catégorie doc, le public a découvert samedi le film Molenbeek, génération radicale ' (Belgique, 2016, 65 mn) des réalisateurs Chergui Kharroubi et José Luis Penafuerte. Connu pour être le fief des djihadistes, la commune de Molenbeek (100 000 habitants) en Belgique, est devenue depuis les attentats survenus en Europe, la cible des médias. Sur cette stigmatisation, les réalisateurs ont décidé de démontrer les raisons de la radicalisation de ces jeunes, mais aussi les conséquences de ce phénomène sur la communauté musulmane. À cet effet, la caméra a été posée devant différents protagonistes : parents de djihadistes, écoliers, imams, travailleurs sociaux et culturels. Dans le film, on découvre une localité pauvre et sans ressources, où le taux de chômage est très élevé, d'ailleurs "les jeunes ne connaissent que Molenbeek", la ghettoïsation de ce lieu, la réclusion de cette jeunesse par les autorités, et la prolifération de mosquées (un total de 22 dans cette commune), a poussé ces "pestiférés" de la société à chercher une autre voie..., celle de la religion ! Les réalisateurs pointent du doigt les autorités qui ont failli à leur mission : absence de moyens éducatifs, activités culturelles ou sportives... Pour mettre fin à ce fléau, de multiples associations se battent pour la réintégration de cette jeunesse, et le sauvetage de la nouvelle génération. D'ailleurs, nous avons pu suivre des débats avec de jeunes écoliers et lycéens qui, pour la plupart sont conscients de ce danger qui les guettent. Mais, parallèlement ne comprennent pas cet amalgame entre la religion et le terrorisme. "L'islam condamne la violence et prêche pour la paix. Je ne comprends pas pourquoi ces djihadistes parlent au nom de la religion !", interroge un enfant. Et une lycéenne de s'insurger : "On ne parle jamais des morts en Syrie, des attentats dans le monde. Où sont les médias ' Alors que les assassinats orchestrés en Europe sont plus médiatisés !" À l'issue de la projection, Chergui Kharroubi a indiqué lors du débat que "nous avons essayé de montrer plusieurs éléments sur les causes de la radicalisation de ces jeunes. Parmi les facteurs, il y a la démission des parents, il y a aussi le chômage, le rejet par la communauté de cette tranche issue de l'immigration, notamment la question identitaire".
Interrogé sur la part de responsabilité que devrait assumer l'Europe sur cette radicalisation des jeunes de banlieue, le réalisateur a souligné qu'"on ne peut pas dire que c'est l'Occident le seul responsable de l'intégrisme et de la violence. Mais la responsabilité peut être cherchée ailleurs, et nous pouvons trouver la réponse à nos problèmes en nous".
Rafael Corréa le "Robin des bois" de l'Equateur !
On revient de loin (Opération Corréa) de (France, 2017, 101 mn) de Pierre Carles, revient sur la démarche entreprise par Rafael Corréa président de l'Equateur (janvier 2007-mai 2017), pour sauver son pays de la dérive après la banqueroute (surendettement), et ce, en élaborant une nouvelle Constitution approuvée fortement par l'Assemblée nationale.
Selon le président de l'Equateur, cette Constitution est le moyen d'en finir avec le néolibéralisme, à cet effet, il a renégocié la dette équatorienne, et les contrats énergétiques avec les entreprises étrangères.
En menant une politique d'un Robin des bois des temps modernes, grâce à une "prise en main étatique, une planification rationnelle et des politiques de redistribution", la pauvreté a largement baissé, tandis que la classe moyenne a "doublé" en 8 ans.
Il a par ailleurs, crée de nombreuses infrastructures, notamment "le ministère du bien-être", des hôpitaux, des écoles, des établissements culturels, la sécurité sociale pour tous les travailleurs et les femmes au foyer... Sur place les journalistes étaient stupéfaits par le gouvernement de Corréa, les ministres ne dépassent pas la trentaine, et ce monde de "bisounours" où des personnes d'origine différentes cohabitent ensemble dans la communauté "Nationalité universelle".
"Pour les étrangers, il n'y a pas de problème de situation irrégulière. Tout le monde est le bienvenu, et peut vivre correctement.
Au bout de quelques mois, un étranger peut obtenir une résidence en Equateur", a indiqué un Français installé depuis quelques années dans ce pays.
Ce monde qui semble si utopique possède ses travers, au milieu du tournage les journalistes se sont retrouvés dans une manif contre l'adoption de la loi sur l'impôt de l'héritage.
Les manifestants issus pour la plupart de la classe bourgeoise estiment que "Corréa est un dictateur qui veut appauvrir les riches, pour enrichir les pauvres !" Suite à cet évènement, le documentariste a pris un nouvel angle, et s'est intéressé aux anti-Corréa.
Et dans leurs propos, les discours étaient mitigés : pour certains ce président est un sauveur, et pour d'autres un dictateur. Outre l'impôt sur l'héritage, d'autres sit-in ont suivi dans les rues de Quito (capitale de l'Equateur), sur l'interdiction de l'avortement de femmes violées.
Un procédé interdit par le chef de l'Etat, à cause de ses convictions religieuses de chrétien conservateur.
Dans On revient de loin (Opération Corréa, Pierre Carles a tenté de prouver aux médias français, que Rafael Corréa est un "bon" président.
À partir de ce préjugé favorable, nous sentons dans une partie du film, que les journalistes se perdent au cours du chemin (rencontre avec les manifestants, et les anti-Corréa).
Néanmoins, ce doc met en exergue cet homme controversé qui, durant ses mandats a relevé son pays de la dérive et a tenté d'offrir une vie meilleure à sa jeunesse. À noter que le Fica se poursuit jusqu'au 8 décembre à la salle El-Mouggar (rediffusion des films à la cinémathèque d'Alger), au programme des fictions, des docs, tables-rondes sur "Le traitement de l'histoire contemporaine dans l'écriture de film", "Fenêtre sur courts" (projection de courts-métrages), et une conférence sur l'écriture du scénario par Jean-Claude Carrière.
Hana Menasria


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