Du corps et de l'âme

Comme chaque année, le Ramadhan est de nouveau parmi nous. Accompagné de sa piété et, malheureusement, des excès de l'homme, le mois de lumières est là pour nous rappeler l'essence même de notre religion. Cette quête incessante de l'équilibre entre les besoins de l'âme et ceux du corps. Le Ramadhan est la période où l'esprit domine et contrôle toutes les envies matérielles. Un moment de dévotion où, en théorie, l'invisible retrouve tous ses droits. Où le Baten (l'intérieur) guide le Daher (l'apparent). Où la nourriture spirituelle surclasse celle du tube digestif. Où l'austérité nous apprend le quotidien précaire des démunis. Un ascétisme momentané qui nous convie à l'ijtihad. Un instant privilégié qui nous apprend que « nos » acquis ne sont que grâce divine. Marquons une halte est posons-nous la question : sommes-nous en phase avec cette noble matricedu mois sacré ' Contrôlons-nous nos envies ' Vivons-nous réellement la condition des démunis ' A l'aune de nos préoccupations quotidiennes tristement alimentaires, consumérisme oblige, la réplique négative trouve toute sa justification. Du trait blanc de l'aube, qui tranche dans le noir des ténèbres, au ciel rougeoyant du crépuscule, nos journées ramadhanesques donnent un contenu concret à l'expression « les yeux plus gros que le ventre ». C'est à qui remplira le plus son panier. Le concours de la table la mieux garnie que l'on postera fièrement sur nos pages facebook. Un volume dantesque de victuailles qui ira mourir dans nos poubelles alors que le Saint Coran nous enseigne que « les gaspilleurs sont les frères des diables » (ina el moubadhirine kanou ikhwan ech-chayatine). Ah ! qu'il est loin le temps où l'islam montrait la voie à la terre entière ! Le temps où les travaux des penseurs grecs étaient traduits vers l'arabe et payés en poids d'or pour donner à la Ouma une ouverture sur l'universel.Le temps où le musulman, scientifique, philosophe, chercheur, donnait corps aux plus grands développements scientifiques que l'humanité ait connus. De Bagdad à Cordoba, l'algèbre, la trigonométrie, l'astronomie, la médecine, l'architecture connurent un essor à nul autre pareil. Jusqu'à faire de l'héritage scientifique de l'Islam la source de la renaissance européenne aux XVe et XVIe siècles. Aujourd'hui, l'Occident a supplanté l'Orient et nous n'interprétons l'Islam qu'à travers les satellites de la société de consommation.