Algérie

Drôles d'histoires



Drôles d'histoires
Entendu au café de la gare : «J'ai passé quinze années en prison !» Le bonhomme qui s'exprimait avait, comme on dit, la «gueule du métier». Quand il portait sa cigarette à la bouche, sa main s'y attardait et il n'est pas besoin d'être très intelligent pour deviner ce qu'il voulait montrer. Des doigts vigoureux qui n'ont pas toujours été entretenus dans des gants de velours. Et surtout les bagues au métal indétectable qu'ils portaient.Son interlocuteur donnait l'impression d'être un ami proche, mais il le toisait systématiquement. On ne refait pas les petits malfrats : il faut toujours qu'ils écrasent quelqu'un pour exister, quitte à ce que ce soit ceux qui ne leur manifestent pas une malveillance particulière.Ou pire, il arrive que ce soit un choix, celui de ses moyens, de son intelligence ou de sa paresse. Le choix commode de se mettre en valeur sans grand péril. En plus de montrer ses doigts et ses bagues, l'homme à la chemise outrageusement ouverte bombait le torse. Non que sa poitrine soit particulièrement musclée, mais il fallait bien montrer cette grosse chaîne d'un or plus que douteux qui descendait de son cou. Dernier caprice, il parlait plus fort que tout le monde, afin que personne, alentours, ne rate ce qu'il dit : «J'ai passé quinze années en prison !!!»Et son vis-à vis, qui le regarde longuement dans les yeux pour lui signifier qu'il ne l'impressionnait pas, lui avait répondu, en déclenchant l'hilarité de tous : «Ne me dis pas que c'est toi Mandela !» Loin du café de la gare, Amina Mekahli raconte : «C'est un ami qu'on n'avait pas vu depuis longtemps, il vivait au Canada, il revient quelques années plus tard, je l'invite, retrouvailles, mes amis l'invitent à tour de rôle alors qu'ils ne le connaissaient pas vraiment ; il raconte sa réussite, ses voyages, son nouveau standing de vie ; la veille de son départ, confus de tant d'hospitalité,il insiste pour inviter tous mes amis au resto ; on y va, contents, expansifs, démonstratifs, on arrose, on s'arrache l'addition ; il sort son beau portefeuille, prend des billets bleus, les met dans la pochette et me la tend ; des billets bleus, je n'en connais pas, je me dis le pauvre, il a dû mettre une monnaie étrangère ; j'ouvre et je me décompose en silence : cinq billets de 100 DA, des billets que personne n'utilise plus chez nous...L'addition était de 300 petits billets bleus... Mes amis ne m'ont pas parlé pendant une semaine».C'est l'histoire d'un Algérois qui, pendant des années, tarabustait son ami d'enfance pour revenir de son long exil, ne serait-ce que pour quelques jours. Le brave homme mettait tous les moyens possibles pour convaincre son ami, mais l'argument qui revenait le plus dans son propos était que le pays avait changé.Un jour, l'exilé avait fini par céder à l'insistance de son copain et ce dernier, tout heureux, est parti l'attendre à l'aéroport. Après avoir attendu vainement qu'il sorte, il s'est dit qu'il avait peut-être pris un autre vol, et au dernier, il a quitté les lieux, la mort dans l'âme.Le lendemain, il l'appelle : «Tu n'es pas venu '» Réponse : «Si, je suis venu mais j'ai pris un autre avion pour repartir, sans sortir de l'aérogare. Tu t'es moqué de moi, tu m'avais dit que le pays avait changé et j'ai vu qu'on ne pouvait toujours pas prendre un jambon-beurre et une bière au snack de l'aéroport» !




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