Algérie

Drame : 48h plus tard, Bouchema raconte l'enfer vécu à Saïda : «On m'a tabassé jusqu'à ce que je perde connaissance»



Drame : 48h plus tard, Bouchema raconte l'enfer vécu à Saïda : «On m'a tabassé jusqu'à ce que je perde connaissance»
Ghrib : «Ce grave incident est une honte pour l'Algérie»
Medouar (pdt. ASO) : «On condamne toute forme de violence»
Yahla (pdt. WAT) : «C'est l'échec de la politique de notre football»
Nassim Bouchema nous a accueillis, hier, chez lui à la cité Saïd Hamdine pour revenir sur les graves incidents ayant émaillé la rencontre MCS- USMA. Le milieu de terrain des Rouge et Noir, qui était en compagnie de Nabil, le garde -matériel des jeunes catégories du club, venu lui rendre visite, revient sur cette après- midi cauchemardesque.
24h après ce carnage (ndlr hier), on imagine que vous êtes toujours sous le choc '
Et comment ! De ma vie, je n'ai vu de telles scènes, vraiment c'était affreux. Croyez-moi, jusqu'à maintenant, je n'arrive toujours pas à croire tout ce que j'ai vu. Vraiment, c'était un cauchemar.
Est-ce que vous pouvez être précis en racontant ce qui s'est passé '
Il faut dire que le match a eu lieu dans une ambiance électrique. Il y avait une pression terrible. Personnellement, je m'attendais à ce qu'il y ait des problèmes, mais pas au point de tabasser certains joueurs, alors que d'autres sont carrément poignardés. C'est vraiment grave, c'est inimaginable. Personne ne peut s'attendre à un tel scénario. Pour revenir à votre question, il y a eu des problèmes au cours de ce match, à travers les actes d'intimidation dont on a été victimes, les insultes et autre pression dans le but de céder les points du match. Croyez- moi qu'on a même rencontré des difficultés à accéder au stade.
De la part de qui '
C'était des intrus que je ne connais pas. Seulement, je tiens à vous préciser que ces personnes étaient toutes vêtues de gilets de stadiers, censées assurer la sécurité, mais en réalité, elles avaient une autre mission.
Ces gens-là qu'on va appeler pseudo-stadiers vous ont agressés avant le coup d'envoi avec des armes blanches '
Non, avant le début du match, soit à notre arrivé au stade, on a été frappés à mains nues, et non pas par armes blanches. D'ailleurs, c'est pour cela qu'on a trouvé les plus pires difficultés à accéder aux vestiaires. Par contre, à la mi-temps, il ne s'est rien passé de grave.
On arrive à la fin du match, que s'est-il passé au juste '
Durant le temps additionnel, Ouznadji a réussi à marquer le but de l'égalisation. A partir de là, les problèmes ont commencé. Trois minutes plus tard, l'arbitre signale la fin de la rencontre. Je ne me suis pas rendu compte jusqu'à ce que je me suis trouvé encerclé par une foule d'environ 200 personnes ou plus.
Mais comment sont- ils arrivés jusqu'aux joueurs''
Croyez-moi, je n'ai pas compris. Une fois que l'arbitre a sifflé la fin de la partie, je les ai vus sur le terrain. Les joueurs qui étaient juste à côté du tunnel ont réussi à s'enfuir, d'autres qui étaient près de la tribune des supporters de l'USMA ont réussi à se cacher. Moi, j'étais au milieu du terrain. Je me suis ainsi retrouvé encerclé par une foule de supporters du MCS. Pour répondre à votre question, les supporters ont réussi à rentrer par les autres portes. Je vais même vous raconter une anecdote à l'occasion.
Allez-y'
J'ai vu de mes propres yeux une personne en train d'ouvrir avec une clé la porte qui sépare la tribune du terrain, pour permettre aux supporters de rentrer et nous lyncher.
La porte de quelle tribune '
La porte de la tribune couverte, à proximité de la tribune officielle, tout près du tunnel.
Avez-vous reconnu cet individu '
Non, je ne sais pas s'il est un dirigeant du MCS, un stadier ou bien un agent de sécurité. Je ne le connais pas, seulement, je l'ai vu, c'était flagrant.
Et par la suite '
Ces supporters m'ont encerclé. Ils ont commencé à me tabasser, j'ai essayé de résister, en vain. Je vous ai dit, ils étaient environ 200 personnes. Parmi elles, il y avait environ 7 à 10 personnes qui étaient armées de couteaux. Je les ai aperçues. Je suis resté sans réaction, en train de recevoir des coups de partout. Tout le monde me frappait. Je suis tombé au sol et malgré ça, ils ont continué à me tabasser, jusqu'à ce que je perde connaissance. Je me suis réveillé par la suite à l'hôpital de Saïda.
Ils ne vous ont pas atteint avec une arme blanche''
Non, c'est bizarre et en même temps, je remercie Dieu de m'avoir protégé. J'étais au sol et la foule qui m'entourait me frappait avec des coups de pieds en plein visage (il a une cicatrice juste au dessous de l''il gauche), et j'ai même senti qu'un autre m'avait asséné un coup à la tête avec une plaque métallique. Dieu merci, il y avait un policier qui est venu pour me couvrir, il a reçu des coups lui aussi à ma place. Ce flic, je lui dois beaucoup.
Personne n'est venu à votre secours '
Qui peut venir à ce moment-là ' Tous les supporters qui ont assisté au match étaient sur le terrain. Je suis resté le dernier sur le terrain. Je me suis réveillé par la suite à l'hôpital, comme je vous l'ai dit. Même la scène de l'agression de Laïfaoui, je ne l'ai pas vue. J'ai trouvé aussi à mes côtés ce policier qui a été blessé lui aussi. Il y a aussi un autre fait qui m'a outré.
Pouvez-vous le raconter '
Oui, bien sûr. Au moment où on m'a soulevé pour me faire monter dans l'ambulance et alors que j'avais perdu connaissance, des supporters du MCS m'ont enlevé mon maillot. Ce sont des êtres humains, ces gens là '
Un message au président de la FAF, Mohamed Raouraoua, la Ligue et les différentes instances '
Pour ce qui est du président Raouraoua, il a toujours été honnête et juste. J'espère qu'il aura l'occasion de voir les vidéos de ce qu'on a vécu pour prendre les mesures qui s'imposent, même chose pour la Ligue.
Un message aux supporters de l'USMA '
Je lance un message aux supporters de l'USMA en particulier, je leur dis de ne plus faire de déplacement. Il faut se contenter de suivre nos matchs à Bologhine et au 5-Juillet, ça suffit. Le déplacement est devenu un danger. Pour les jeunes Algériens en général, je leur dis la même chose.
Un dernier mot '
Je veux profiter de cette occasion pour remercier ce policier qui m'a sauvé la vie. J'espère le rencontrer et je ferai le maximum pour cela. S'il le faut, j'irai jusqu'à Saïda pour le rencontrer.
Réactions... réactions... réactions... réactions... réactions... réactions...
Ghrib : «Ce grave incident est une honte pour l'Algérie»
«Je suis vraiment très peiné et ça m'a vraiment fait mal au c'ur d'apprendre ce qui s'est passé à Saïda. Ce grave incident est une honte pour le football algérien, car cela ne fait partie ni de nos traditions ni de notre culture. Je souhaite un prompt rétablissement aux blessés et il faut que la violence soit bannie de nos stades. Des solutions doivent être trouvées au plus vite afin que nos stades soient un lieu où les gens assistent à une partie de football, pas à des scènes dramatiques qui n'honorent pas leurs auteurs.»
Medouar (pdt. ASO) : «On condamne toute forme de violence»
«Je crois qu'on assiste aux résultats de la mauvaise gestion du championnat, on condamne toute forme de violence, car ça reste un jeu et c'est inadmissible de risquer la vie d'un supporter ou des joueurs à cause d'un match de football. On n'aime pas voir ces images ni chez nous ni ailleurs, le football est un sport qui doit rapprocher les hommes et non pas créer ces formes de violence. Il y a plusieurs facteurs qui ont contribué à ce résultat dont l'arbitrage qui n'est pas innocent dans cette affaire. On doit vite prendre les mesures nécessaires pour reprendre les choses en main et surtout réfléchir sur les vraies causes qui nous ont amené à voir de tels scénarios sur nos terrains de football. C'est malheureux de voir de telles scènes se passer à la fin de nos matches de championnat au moment où les images de fair-play doivent représenter la fraternité entre les jeunes de notre peuple. J'espère qu'on prendra toutes les mesures pour ne plus revoir de telles scènes.»
Nezar (pdt. CAB) : «Beaucoup de violence, la Ligue doit arrêter le championnat»
«Ce qui est arrivé samedi à Saïda est inacceptable. Je pense qu'il est temps de mettre un terme à ce championnat ou à la limite jouer pendant trois saisons, un championnat à blanc. On doit se pencher sérieusement sur le problème de la violence, avant qu'il y ait mort d'hommes.»
Yahla (pdt. WAT) : «C'est l'échec de la politique de notre football»
«Tout d'abord, c'est vraiment désolant d'apprendre ce genre de dérapage et de violence aussi graves dans nos terrains de football car désormais, que ce soit les visiteurs ou même les locaux, personne n'est plus à l'abri de la violence de la rue. Tout cela démontre, à mon avis, l'échec de la politique de notre football car en toute sincérité, le fait de voir trois équipes sur seize seulement descendre à l'étage inférieur laisse place à beaucoup de pression et de tension hostiles, alors que c'est nettement mieux d'avoir 18 clubs parmi l'élite. L'essentiel, c'est qu'il faut se réunir et dialoguer et prendre les décisions idoines afin d'éviter ce genre de scénario à l'avenir, surtout qu'on n'est pas à l'abri d'assister aux mêmes violences de Port-Saïd en Egypte.»




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