Algérie - Réserves hydriques

Dr Pierre Hubert (Secrétaire général de l’association internationale : « L’eau deviendra un objet de coopération entre les Etats »



Le monde doit aujourd’hui faire face à une équation très simple : il y a assez d’eau pour tous les hommes sur la terre, mais ils doivent relever un double défi. La partager de manière équitable tout en préservant les écosystèmes naturels. Est-ce que la prise de conscience est aujourd’hui assez forte pour que cet objectif soit réalisable ?
Oui, je pense qu’on a beaucoup parlé de ce problème dans les médias et que la population a bien compris les enjeux. Même si, d’un endroit à l’autre de la planète, le problème ne se pose pas avec la même acuité. Toutefois, le citoyen n’a pas de prise réelle sur les décisions des administrations, des entreprises ou des pouvoirs publics... qui engagent la gestion des ressources.
La population mondiale a plus que triplé depuis le début du siècle et l’utilisation des ressources en eau douce a été multipliée par six. Dans les 50 années à venir, la population mondiale aura encore augmenté de 40 à 50%. Comment va-t-on gérer les besoins croissants en eau ?
Depuis des millions d’années, le même stock d’eau circule à la surface de la terre et il faut apprendre à le gérer. Comprendre qu’une rivière, utile en tant que gisement d’eau, joue aussi un rôle dans l’évacuation des déchets, dans l’approvisionnement en nourriture ou en gravats pour la construction... Toutes ces fonctions doivent être prises en compte dans une gestion intégrée et c’est un exercice assez difficile.
Des taux élevés d’exploitation des nappes —supérieurs à 50% des apports d’eau extérieurs — sont déjà atteints dans plusieurs pays, en particulier en Algérie. Comment est-il possible de surveiller, voire de rationner cette consommation ?
De plus en plus, se créent des organismes de bassin, chargés de gérer les demandes des différents acteurs sur un bassin hydrologique donné. Leur objectif : concilier les exigences des entreprises, des particuliers... avec les contraintes du cycle de l’eau. Il est primordial d’approfondir nos connaissances sur ce cycle d’eau par des mesures et des observations. La gestion n’en sera que plus efficace. Malheureusement, ces études ne font pas partie des priorités des gouvernements, qui ne voient pas leur intérêt à court terme.
La quantité d’eau nécessaire à la production d’un kilo de pommes de terre est de 100 l contre 13 000 l pour un kilo de bœuf. Sera-t-on obligé de modifier notre régime alimentaire comme le préconisent certains experts ?
Tout dépend... Si on cultive du blé dans le bassin parisien, on peut se contenter de l’apport des pluies. Dans le Sahara, il faudra 10 000 m3 d’eau à l’hectare et encore le rendement ne sera pas terrible. Je pense qu’une des solutions réside dans le concept très intéressant d’« eau virtuelle ». A un endroit donné, au lieu de produire un quintal de blé, on choisit de l’importer pour une meilleure valorisation de l’eau, pour le tourisme, par exemple.
Différents rapports soulignent qu’à mesure que les ressources en eau s’épuisent, les tensions entre les différents utilisateurs risquent de s’amplifier. L’eau sera-t-elle un enjeu des guerres du XXIe siècle ?
Je crois au contraire que l’eau deviendra davantage un objet de coopération, ce qui n’exclut pas quelques tentatives d’appropriation ici et là. Mais de plus en plus, les Etats vont être amenés à coopérer.


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