Algérie

Dounia et Syréna, deux navires par qui le scandale est arrivé


Inscrits sur la liste de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (ICCAT), pour participer à la campagne de la pêche au thon de 2009, avant même qu'ils n'arrivent en Algérie, les deux navires Belkis Dounia et Syrena Myriam, ont été importés de Turquie dans des conditions qui suscitent de lourdes interrogations. Dans sa réponse adressée au journal, le patron des deux navires (appartenant chacun à une Sarl et domiciliés à la même adresse, à Ténès, wilaya de Chlef), insiste surtout sur le fait qu'il n'a aucune relation avec les navires turcs arraisonnés à Annaba, arguant du fait que « ces bateaux sont arrivés au port de Ténès, le 12 juin 2009, bien après l'éclatement de l'affaire. Il explique à propos de l'inscription des deux purse-senners (senne coulissante) sur la liste de l'ICCAT qu'elle a été effectuée en même temps que leur algérianisation auprès du consulat d'Algérie à Istanbul. Du fait que la procédure exigeait du temps et des documents, il a été jugé opportun et légitime de les porter sur cette liste avant l'achèvement de la procédure, les navires se présentaient comme étant les seuls à pouvoir répondre au défit imposé par l'ICCAT, celui de pouvoir pêcher par ses propres moyens (') les autres navires algériens, y compris ceux qui avaient participé à la précédente campagne n'étaient pas équipés de manière idoine et leur équipage ne disposait d'aucune expérience en la matière ». Pour l'armateur, le fait que son nom ne figure pas sur la liste de l'ICCAT, « c'est tout simplement parce que les navires appartiennent à deux entités morales (des Sarl) dotées de leurs actionnaires et de leurs gérants, tous de nationalité algérienne ».Tout en étant très évasif, il dément l'information selon laquelle les deux navires ne sont pas neufs en disant : « Contrairement aux autres navires construits sur commande, les deux senneurs ont été achetés sur fonds propres, sans le concours de l'Etat (FNDPA), après l'achèvement différé de leur construction. Ce qui n'est pas interdit par la loi et cela n'enlève en rien à leur caractère de navires neufs. Les considérer comme vieux reviendrait à en faire autant pour tous les navires actuellement en souffrance en Turquie et dont la construction a été momentanément stoppée. La meilleure preuve qu'ils sont neufs, c'est qu'ils n'ont aucun historique d'activité comme cela a été d'ailleurs indiqué. Des certificats établis par un bureau de classification homologué auprès des sociétés de classification, membre de l'Association internationale de sociétés de classification. » Or, à la lecture des documents que nous avons obtenus, la société a été créée par acte notarié le 2 mai 2009, alors que la totalité des documents de base du dossier d'importation ont été signés entre mars et avril 2009. Les autorisations d'importation et d'exercice des deux navires ont été délivrées avant leur acquisition finale, puisque les actes de vente ont été signés le 13 mai 2009. Mieux, ces mêmes documents ont en réalité été délivrés à des navires étrangers dans la mesure où leur radiation n'a été effective que le 29 mai 2009.Les deux navires n'ont pas été acquis auprès d'un chantier, mais auprès de tierces personnes en vertu d'un contrat de vente leasing, alors que la réglementation interdit l'importation en leasing des navires de pêche.C'est en tout cas, ce qui ressort du rapport de l'inspection dépêchée à Ténès par le ministère de la Pêche, le 23 juin 2009. En effet, ce dernier énumère une série d'anomalies qualifiées de violation de la réglementation et relève que les « visas portés sur l'acte d'algérianisation provisoire signé par le consul adjoint d'Algérie à Istanbul, sont en contradiction avec la réglementation en vigueur en matière d'importation de navires de pêche ». Les inspecteurs indiquent que cet acte fait mention des références d'un acte de vente en boat leasing agrément, signé le 13 mai 2009, et d'un acte de radiation du navire de M. Volkan, pour le Syréna, signé le 25 mai, et du navire Emin Kaptin 2, pour Dounia, établi le 29 mai 2009. Dans son dernier alinéa, l'acte d'algérianisation stipule que la date de construction du navire Dounia, est le 29 octobre 2008, et celle de Syréna, entre 2008 et 2009. Mieux, dans ce même document, il est précisé que les deux navires ont obtenu une autorisation d'importation signée par la direction de la pêche d'Alger, alors que les références de celles-ci sont celles d'une autorisation signée par le directeur de la pêche au niveau du ministère, alors qu'il n'est pas habilité à le faire.Une inspection a été effectuée le 15 juin 2009, sur le site au port de Ténès ; le constat des inspecteurs du ministère fait état « de traces de rouille sur l'avant du navire Belkis Dounia, et les numéros d'immatriculation sur la proue des deux navires, effacés par une peinture fraîche, lors de la seconde visite effectuée le 24 juin ». Selon toujours le rapport, la procédure d'acquisition de ces deux navires « n'a pas suivi le cheminement réglementaire, et les documents signés par la direction nationale de la pêche pour l'importation, l'autorisation de pêche et l'embarquement du personnel marin sont contraires à la réglementation ».
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