C'était le plus beau des IDE des années
2000. En 2010, rien ne va plus entre Orascom Télécom et le gouvernement
algérien. Retour sur un IDE qui risque d'atterrir devant le tribunal d'arbitrage
international.
Orascom Télécom Holding (OTH) confirme
son intérêt à acquérir une participation au capital du plus grand opérateur
mobile polonais «Polkomtel» au cas où le gouvernement polonais décidait de le
mettre en vente. Le groupe égyptien avait annoncé, quelques semaines
auparavant, avoir des vues sur Telecom Srbija (Serbie) que le gouvernement
envisage de privatiser partiellement. Auparavant, la rumeur a couru que le
groupe Sawiris aurait offert 20% de la valeur de la vente de Djezzy à l'Etat
algérien en contrepartie du renoncement à l'exercice du droit de préemption.
Orascom Télécom a officiellement démenti tout en se disant un peu inquiet des
retards de l'Algérie à engager des négociations. Depuis, c'est le silence
radio. Dans la presse internationale néanmoins, les péripéties algériennes
suscitent des commentaires très négatifs… pour Alger. Le Financial Times évoque
une «mentalité défensive» de l'Algérie qui risque d'accroître son «isolement»,
l'agence Reuters publie un long article intitulé «comment l'Algérie est entrée
en désamour avec l'investissement étranger» et, plus récemment, le Figaro
évoque la «bouderie» des groupes français à l'égard du marché algérien. L'image
d'un pays réfractaire aux IDE s'incruste. Le changement de la législation
algérienne qui serait devenue «dissuasive» pour les investissements étrangers
est pointé du doigt. Et, inévitablement, dans chaque article, il est fait
référence aux «malheurs algériens» d'Orascom Télécom… Des spécialistes
algériens le constatent : dans le bras de fer judiciaire qui s'annonce autour
de Djezzy, l'Algérie a déjà perdu la partie sur le terrain de la communication
- ce n'est pas irréversible, précisent-ils toutefois, à condition d'avoir
quelque chose à communiquer et de savoir le faire - au niveau des médias
internationaux.
Un cas paradoxal
Le cas d'Orascom Télécom est un vrai
paradoxe. Entré en activité en février 2002 après avoir acquis, en juillet
2001, une licence pour 737 millions de dollars, OTA - Djezzy, après avoir
favorisé une démocratisation du mobile, passait pour le plus beau des IDE.
Il est vrai aussi qu'à l'époque certains considéraient qu'on
offrait un marché facile à l'opérateur égyptien alors que l'opérateur
historique était littéralement ligoté… Huit ans plus tard et alors que Djezzy
est devenu le premier opérateur en Algérie, suscitant des vocations, plus
velléitaires qu'effectives, chez des investisseurs moyen-orientaux, le plus
«bel des IDE» hors hydrocarbures n'a plus la cote d'amour…
Les redressements fiscaux adressés à OTA et la tentative avortée
de vente des actifs d'Orascom au sud-africain MTN ont favorisé - il suffit de
faire une recherche sur internet pour s'en rendre compte - la multiplication de
commentaires sur le «nationalisme économique» et la «fermeture» du marché
algérien à l'investissement étranger.
La comparaison entre le message de «non-bienvenu» des Algériens
(Financial Times) avec les efforts menés par le Maroc et la Tunisie pour
attirer ces IDE est de mise. Orascom Télécom Algérie, la «success story» du
début des années 2000, après avoir fait un peu de «pub» au marché algérien - il
est vrai sans conséquence significative en matière d'investissement direct
étranger (IDE) - se transforme, irrésistiblement, en exemple repoussoir, à la
fin de la décennie.
Entretemps, le prix du baril du pétrole a repris des couleurs, les
réserves de changes se sont accumulées… Des patrons algériens, quelque peu
perdus, ne savent plus que répondre lorsqu'ils rencontrent des opérateurs
étrangers qui leur posent la question crûment : l'Algérie ne veut-elle plus des
IDE ?
Les investisseurs ne se précipitent pas
En tout état de cause, les investisseurs
ne se précipitent pas vers l'Algérie. En 2009, seuls quatre projets ont été
recensés par l'ANDI, une chute vertigineuse par rapport au modeste chiffre de
102 projets enregistrés en 2008. Le changement de cap en matière d'encadrement
des investissements introduit par la loi de finances complémentaire est, en
partie seulement, une réponse à l'affaire de la vente des cimenteries d'Orascom
au groupe Lafarge. Le droit de préemption introduit dans la même loi est, lui,
directement lié à cette affaire.
Les négociations n'ont pas commencé formellement sur le rachat par
l'Etat algérien de Djezzy. L'écart vertigineux dans l'estimation de la valeur
de Djezzy - de 3 milliards $ à 7,8 milliards - rend pratiquement impossible un
accord direct. Le dossier Djezzy s'oriente, selon les experts, vers l'arbitrage
international. OTH, prédisent les experts, va essayer de mettre en exergue des
failles présumées dans le droit de préemption introduit dans la LFC 2009.
L'Algérie pourrait faire valoir que le chiffre de 7,8 milliards de dollars qui
aurait été proposé par MTN pour le rachat des actifs d'Orascom est en réalité
le fait d'une entente entre les deux opérateurs pour faire un swap d'actifs à
prix élevés. L'opérateur sud-africain aurait accepté de payer Djezzy au dessus
de sa valeur de marché et en contrepartie OTH prenait des actifs de MTN
également surcotés de l'offre de MTN par Alger. Une chose est claire, Orascom
Télécom aura été, en moins de dix ans, le reflet des évolutions contradictoires
de la politique économique de l'Algérie.
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Posté Le : 29/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salim Rabia
Source : www.lequotidien-oran.com