Algérie

Djelfa sous haute tension



Hier encore, la ville de Djelfa était sous la menace d?une nouvelle explosion populaire. Le week-end de l?Aïd n?a pas permis un quelconque répit après les événements d?El Birine : des émeutes uniques dans les annales de la wilaya. D?abord de par leur violence : tous les édifices publics ont été réduits à néant par plusieurs milliers de manifestants qui n?ont cessé de crier à la hogra pendant toute une journée. Ensuite par la tournure que semblent prendre les événements. Si l?augmentation du prix du gaz a mis le feu dans la région, les raisons de l?explosion de colère sont multiples, mais surtout bien particulières à la wilaya. Longtemps connu pour être à l?origine de bien des maux, le tribalisme a désormais fait place aux gros intérêts. Les jeunes rencontrés à El Birine ont été formels : « Deux sont les gros bonnets (ou turbans) de l?élevage qui ont manipulé les citoyens qui ne demandaient qu?à extérioriser leur malaise. » Saïd Moussa et les autres en parfaits connaisseurs de la région font leur propre analyse : « Les cinq années écoulées ont vu l?apparition d?une nouvelle société civile dont les représentants ne sont que des spéculateurs de tous bords. De puissants lobbys sont nés. En particulier dans les secteurs de l?agriculture, de l?éducation et de la santé. Entre-temps, le citoyen a été marginalisé par les responsables. Aujourd?hui, ces mêmes groupes d?intérêts, en perte de vitesse depuis la mise en place d?une politique d?ouverture et de dialogue par la nouvelle autorité administrative, tentent de protéger leurs privilèges en manipulant les citoyens laissés pour compte pendant des années. » Les anciens moudjahidine, que nous avons également rencontrés à El Birine, abondent dans le même sens. « Nous avons été les premiers à prendre les armes contre les terroristes et voilà qu?aujourd?hui, nous sommes complètement marginalisés. C?est juste si nous ne sommes pas traités de harkis. Les affaires de la cité sont aux mains de spéculateurs qui ont toujours agi avec la complicité de certains responsables », nous ont-ils déclaré très en colère. Très au fait de la situation, ils avancent que les événements d?El Birine ont été récupérés par le lobby de l?éducation, responsable de la dégradation du secteur. Selon nos interlocuteurs, « certaines personnes, de surcroît illettrées, sont à l?origine du départ de 5 directeurs de l?éducation en l?espace de 5 ans. Celles-ci, influentes grâce à leur cheptel, jouissent de complicité à haut niveau ». Sur le terrain, des écoliers et des lycéens nous ont confié que des enseignants leur ont demandé de participer aux manifestations de colère. Exaspérés par plus d?une semaine de grève, les enfants ont fini par suivre les directives de leurs professeurs. Le secteur de l?agriculture n?est pas le moins gangrené : corruption, favoritisme et détournements ont été dénoncés par des centaines de jeunes en colère lors de la visite, il y a quelques mois, de Saïd Barkat dans la région de Sersou. Les mêmes revendications ont été entendues lundi dernier à El Birine concernant la santé, un nouveau directeur vient d?être installé à la tête du secteur. Il est attendu de ce nouveau responsable une gestion des plus rigoureuses qui permettrait le redressement d?une situation des plus catastrophiques. Guerre d?intérêts, récupération ou simple ras-le-bol de milliers de citoyens, l?ambiance dans la wilaya de Djelfa demeure électrique, l?augmentation du prix du gaz butane (et du reste) a jeté de l?huile sur le feu et la loi de finances 2005 est remise en cause par la rue.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)