Algérie

«Djeich Baghdad»... rappelez-vous



«Djeich Baghdad»... rappelez-vous
Nous avions cru que les Américains avaient fait éclore en 2003 les bourgeons du «Printemps arabe» en Irak, bien avant que la saison des fleurs n'aille exhaler ses senteurs en Tunisie, Egypte, Libye... Que nenni, on n'est pas la Mésopotamie ni la première civilisation humaine pour rien. Double ration de printemps donc pour les terres de l'ancien Califat abbasside. On ne sait trop si c'est la providence ou la défection des Etats-Unis qui l'a rendu possible, mais depuis quelques jours l'Irak ressemble à un cadavre qu'hyènes et vautours s'acharnent à dépecer dans une atmosphère macabre. Il plane sur le pays une odeur de poudre et il y règne un climat d'angoisses et de peur que n'inspira même pas un Hadjadj ben Youssef qui, pourtant, voyait en chaque Irakien une tête prête comme un fruit mur à passer sur le fil de son épée. Comment, diable, en quelques jours seulement, même pas une semaine, un ennemi connu, attendu et plus ou moins combattu a-t-il pu organiser un tel«rezzou» ' Partis probablement de la zone frontalière avec la Syrie, les combattants de la sinistre organisation connue sous l'acronyme EIIL (Etat islamique en Irak et au Levant) ont foncé avec une rapidité foudroyante vers les provinces septentrionales et réussi à y occuper des villes importantes comme Mossoul et Tikrit, alors que les Kurdes ont profité de l'aubaine pour prendre Kirkouk dans une province où sont concentrés de riches gisements pétroliers. Hier après-midi les insurgés sunnites de l'EIIL progressaient encore vers Baghdad depuis trois directions et n'étaient plus loin de mettre la capitale à portée de leurs canons. Seules quelques dizaines de kilomètres séparent désormais les redoutables et sanguinaires Takfiristes du siège du gouvernement délétère et incompétent du Premier ministre Al-Maliki. La population ne s'y est pas trompée. Selon des Baghdadis contactés par les médias, les gens se terraient hier chez eux et les commerces ont baissé rideau. Signe de la très mauvaise tournure prise par les événements, aussi bien Al-Maliki que des dignitaires religieux chiites ont appelé à la mobilisation des populations civiles et des tribus pour contrer la fulgurante offensive d'un ennemi qui, ils le savent, ne fera pas de quartier. Les images vues sur les télés montrant un impressionnant matériel roulant et de l'armement pris à l'armée régulière sont suffisamment parlantes. C'était la débandade, une déroute totale des forces gouvernementales qui ont fui sans avoir, souvent, appliqué une règle militaire élémentaire en pareil cas : détruire le matériel pour qu'il ne tombe pas aux mains de l'ennemi. Les jeunes Algériens l'ignorent sans doute, mais il fut un temps, ici dans notre pays, où pour symboliser un état d'incurie, de laisser-aller ou de démission générale, on disait : «Djeiche Baghdad, El makla oua R'qad» (l'armée de Baghdad, c'est manger et dormir). À la bonne heure ! L'expression visait une armée à venir, celle d'Al- Maliki, qui a réussi le pari insensé de se mettre à dos une quasi-moitié d'Irakiens d'une autre confession que la sienne et ne peut plus compter sur l'automaticité du soutien de Washington, Barak Obama ne voulant même plus entendre parler d'une intervention au sol. Depuis le retrait des troupes américaines en 2011, et pendant que les périls montaient visiblement, le Premier ministre n'a rien entrepris pour la cohésion nationale et la lutte contre la corruption dans les institutions. Le maître mot est lâché, corruption ! Et quand celle-ci arrive à gangrener même l'institution militaire, le résultat n'est évidemment pas surprenant.Aujourd'hui l'Irak, demain l'Afghanistan et la Libye ' Très probablement. Décidément, là où les Américains passent pour «installer la démocratie» (c'est ce qu'ils disent), ils ouvrent la voie à la division, la désolation et le pouvoir des milices.A. S.




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