Djamel Lounis et Fethy à Marseille.
Il a 40 ans. Djamel Lounis croque tout ce qui touche de près ou de loin à ses compatriotes. Il se livre à El Watan Week-end sans prendre de gants, pour partager sa passion.
«Je ne suis pas comme n’importe quel dessinateur. Je n’ai pas fait de formation dans le domaine. Je n’ai pas fait les Beaux-Arts, même si je dessine depuis tout petit.» Tel est le parcours qu’a effectué Djamel Lounis, un parcours peu commun pour un caricaturiste qui veut se faire reconnaître comme tel et qui commence à émerger comme tel grâce, en partie, à la presse. Une scolarité plutôt moyenne, mais des talents qui s’affichent auprès de ses camarades de classe. «Dans mes années lycée, raconte-t-il, je m’amusais à dessiner, sur le tableau noir, mes potes, histoire de les taquiner un peu, pour rigoler, et déjà, j’avais du succès.»
Les années avancent et Djamel Lounis sent qu’il est réellement fait pour dessiner. Cependant, avec l’absence du dessin et des matières artistiques, il n’était pas évident pour le jeune Djamel de faire preuve de ses talents dans le monde scolaire. Et pourtant, il lui fallait travailler dur, gagner sa vie. «Par la suite, explique-t-il, j’ai fait une formation dans l’électronique. Puis, dans les années 90, je me suis retrouvé fonctionnaire à la poste. Arrivent les années 2000, avec l’explosion d’internet, ce qui m’a permis de présenter mes dessins.»
L’ascension
Drôle de cursus pour celui qui va se faire un nom dans le quotidien Le Jour d’Algérie. Il avoue que «ce n’était pas évident de se faire connaître, comme ça, dès le début, surtout qu’on pouvait être regardé de haut, sans aucun diplôme reconnu, ni rien. Pourtant, je me suis accroché». Viennent les années d’ascension pour Djamel, à travers la mise en place d’un projet avec l’institut Goethe, en 2007, dont le directeur a énormément apprécié ses différentes œuvres. Proposition lui est faite pour une réalisation de caricatures en relation avec le malaise social à Alger. La porte de Berlin lui est alors ouverte pour une semaine. «Il y a eu un jumelage entre les deux capitales, Alger et Berlin, à travers mes caricatures. Avec le temps et beaucoup de volonté, j’ai fini par créer un blog sur le Net, j’ai participé à des expositions à Alger, Tizi Ouzou, Mostaganem, au Qatar aussi. J’ai été invité au Salon international de la caricature de Limoges. Il y a 15 jours de cela, j’ai participé à une exposition à Marseille.»
Le rêve
En 2009, le voilà propulsé dans le métier de ses rêves : celui de caricaturiste pour le quotidien Le Jour d’Algérie. Djamel Lounis avoue, non sans amertume, qu’«il faut aider les jeunes talents qui existent partout en Algérie. Malheureusement, cet art est complètement ignoré. Il n’y a pas d’association digne de ce nom qui pourrait œuvrer dans ce sens. Il y a quelques années, il y avait bien l’Espace Noun qui, depuis, a malheureusement fermé ses portes. L’ancienne génération, celles des Slim, Haroun et j’en passe, est essentiellement constituée de caricaturistes qui sont en même temps bédéistes, d’où des hommages au Fibda».
Le combat
Il va même jusqu’à protester contre l’idée de sous-métier collée à la profession de caricaturiste. «Dans un pays comme le nôtre, nous sommes soumis à la censure comme à l’autocensure, il n’y a pas de liberté comme en Europe ou ailleurs, malheureusement…» Un véritable talent est en train d’émerger à travers le monde du dessin et de la caricature, en la personne de Djamel Lounis, qui revendique l’idée de «reconnaître notre métier». «Nous existons pleinement en Algérie, mais il faut nous aider. Comment se fait-il que sous d’autres cieux, le caricaturiste soit une référence, alors qu’ici, il sert tout juste à illustrer un quotidien ? Il faut arrêter de nous prendre pour des marginaux. Nous sommes admirés à l’étranger, mais ici, rien, aucune reconnaissance. C’est vraiment dommage, mais je reste optimiste pour l’avenir. Je ne désespère pas qu’un jour, nous ayons un véritable statut».
Posté Le : 23/03/2012
Posté par : litteraturealgerie
Ecrit par : Noël Boussaha
Source : www.elwatan.com