Djamel Allam, à l'instar des artistes de sa dimension, ne sont pas uniquement des chanteurs, des compositeurs et des hommes de culture, mais d'importants témoins. On regrettera amèrement que dans notre société et dans notre culture, la tradition des Mémoires et des autobiographies ne soit pas encore ancrée. On devine aisément, la masse d'informations précieuses et des témoignages qu'un artiste comme Djamel Allam a emportés avec lui sans avoir pu les transmettre aux futures générations.Djamel Allam a vécu la culture algérienne dans toute son étendue. Il a côtoyé les hommes et les femmes qui ont marqué cette culture pendant plusieurs générations, en plus de son apport personnel aussi bien sur le plan musical que poétique. Il est l'un des premiers à avoir universalisé la chanson kabyle, faut-il le rappeler. À l'époque où le regretté Djamel Allam avait débuté dans la chanson, peu de chanteurs kabyles avait étudié la musique.
Un artiste pluridisciplinaire
La majorité écrasante était constituée d' autodidactes très doués certes, mais n'ayant pas eu la chance de fréquenter un conservatoire. Ce n'était pas le cas de Djamal Allam qui a, très jeune, appris la musique au conservatoire de Béjaïa sous la houlette du Cheikh Sadek Abdjadoui.
Un point commun avec d'autres chanteurs de l'époque: Djamel Allam a pris le chemin de la France au début des années 70 où il a aiguisé ses armes.
Extrêmement doué, fin connaisseur de la musique et doté d'une grande volonté, Djamel Allam ne tarda pas à briller et à s'imposer en sortant de l'anonymat d'un seul coup. Il s'était même adonné à la chanson française à ses débuts tant il était doté d'une touche universelle indéniable. Ses passages à la radio et ses scènes partagées parfois avec les stars étrangères de l'époque lui ont permis un sursaut fulgurant dans le monde artistique. C'est donc tout naturellement que son tout premier produit musical, intitulé «Argu», commercialisé en 1974 a reçu un écho impressionnant.
Les concerts animés par Djamel Allam après l'édition de ce premier opus connurent un succès retentissant. Privilégiant la qualité à la quantité, Djamel Allam ne produit que trois cassettes en 1978, en 1981 et en 1985. Il subjugue toujours son public avec ses nouvelles chansons. Artiste pluridisciplinaire, Djamel Allam a été acteur, mais aussi auteur de musiques de film dont «Ma dernière nuit à la Goutte d'Or» de Daniel Duval, diffusé sur TF1, «Fort Saganne» d'Alain Corneau, «Prends 10 000 balles et casse-toi», «La plage des enfants perdus»... Au total, Djamel a produit douze albums de 1974 à 2008.
Un nouveau souffle à la chanson kabyle En qualité de cinéaste, le regretté Djamel Allam avait obtenu le Premier Prix de l'Olivier d'or du festival du film amazigh lors de sa 13ème édition pour son produit: «Le banc public».
De nombreux livres ont été écrits et publiés sur Djamel Allam après son décès le 15 septembre 2018. On peut citer:»Djamel Allam, de Ur-tsru au youyou des anges» de l'écrivain-journaliste Abdelkrim Tazarout et «Djamel Allam, une oeuvre universelle» de Rachid Oulebsir.
Carte d'identité
À l'occasion de la date anniversaire du décès de Djamel Allam, le très prolifique écrivain Rachid Oulebsir a écrit: «J'ai eu la chance d'assister à sa première apparition sur scène, à la salle Mouggar d'Alger. Il se produisit avant le couple fantasque Arezki et Brigitte Fontaine. C'était en 1972, nous étions une cinquantaine d'étudiants à suivre ses premiers pas dans la chanson, son look, barbe et cheveux longs, était pour nous une carte d'identité».
Rachid Oulebsir rappellera, en outre, ces derniers propos de Djamel Allam: «Je vous ai beaucoup donné, énergie, amour, fraternité, je n'ai jamais jalousé ou méprisé quelqu'un. Dans la vie, on trouve parfois des murs, sur nos chemins, il faut les contourner intelligemment avec toute la sensibilité nécessaire.».
Djamel Allam a réussi à faire traverser les frontières à la chanson kabyle comme l'ont fait Idir, Takfarinas et d'autres chanteurs de la même dimension.
En parlant de Djamel Allam, on pense aussi à des groupes de chant mythiques ayant modernisé la chanson kabyle comme Les Abranis. Il n'était pas du tout évident de quitter les sentiers battus et de se frayer un nouveau chemin avec un nouveau genre musical dans l'univers de la chanson kabyle basé depuis Slimane Azem sur la poésie très profonde et sur une musique traditionnelle appelée communément le folklore kabyle. C'est un véritable risque qu'avait pris Djamel Allam en décidant d'insuffler un nouveau souffle inédit à la chanson kabyle. Car il pouvait tout simplement essuyer un échec de la part des mélomanes kabyles très habitués à la chanson traditionnelle avec le minimum d'instruments musicaux.
Djamel Allam a relevé le défi et a réussi de fort belle manière. Il a permis à la chanson kabyle de connaître un nouvel âge, une nouvelle dimension et un nouvel élan. Rachid Oulebsir rapporte aussi le témoignage du grand Idir sur Djamel Allam: «C'est lui le précurseur, il m'a poussé à chanter Vava Inouva, quand j'étais parti lui proposer de la chanter. Il m'a dit :'' Cette chanson est la tienne, elle te mènera loin''.C'est grâce à lui que je suis là».
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Posté Le : 15/09/2022
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Aomar MOHELLEBI
Source : www.lexpressiondz.com