Maître Rida Bekkat a crié sa douleur à la barre en annonçant que son client a écopé de dix ans ferme pour un... gramme de stups! Non, c'est bien Ramadhan.Il n'y a aucun avocat à Chéraga qui se déplace au Ruisseau, à la cour d'Alger, et devant la «royale» Meriem Djebbari, présidente de la sixième chambre correctionnelle, en vue de s'éclater au nom de la loi, au nom de l'application de la loi et surtout au nom du combat farouche et incessant contre la bêtise de certains juges du siège de la première instance qui jouent, non seulement avec la liberté des gens, mais encore l'honneur des familles.Les frères Menasria avaient été entendus dans «le brouhaha» de Sidi M'hamed, Alger, avec à l'appui un Issam Kassoul impuissant devant l'ogre en robe noire.Le plus jeune des deux poursuivis l'était sur la base de la loi 04-18 du 24 décembre 2004 relative à la prévention et à la répression de l'usage et du trafic illicites de stupéfiants et de substances psychotropes, avec en point de mire le redoutable article 17 qui dispose qu'«est punie d'un emprisonnement de dix (10) ans à vingt (20) ans et d'une amende de cinq millions de dinars (5.000.000 DA) à cinquante millions de dinars (50.000.000 DA) toute personne qui, illicitement, produit, fabrique, détient, offre, met en vente, vend, acquiert, achète pour la vente, entrepose, extrait, prépare, distribue, livre à quelque titre que ce soit, fait le courtage, expédie, fait transiter ou transporte des stupéfiants ou substances psychotropes. La tentative de ces infractions est punie des mêmes peines que l'infraction consommée...».Il faut vite souligner la précision des mots alignés (et il y en a 15!!!) pour bien mettre en exergue la peine proposée par la loi 04-18 dont l'article 17 prévoit dans son alinéa 3: «Les actes prévus à l'article 1er ci-dessus sont punis de la réclusion perpétuelle lorsqu'ils sont commis en bande organisée.» Et en droit, deux individus forment déjà une bande organisée! Les frères Menasria étaient visés par l'article 17 avec, cependant, cette fâcheuse position qui a vu le cadet mettre le tout sur le dos de l'aîné qui a écopé au tribunal d'une lourde peine de 10 ans d'emprisonnement ferme, car le magistrat de la première instance a dû puiser son jugement dans l'article 18 de la même loi 04-18 qui dispose là aussi qu'«est punie de la réclusion perpétuelle toute personne qui a dirigé, organisé ou financé les activités citées dans l'article 17 ci-dessus».Ce qui explique la lourdeur de la main du juge du tribunal. Or, en appel, il y a trois juges: donc, six yeux et six oreilles!Et si l'on évoquait le ton franchement assourdissant craché au cours d'un bon quart d'heure par l'élégant avocat de Chéraga qui n'était pas constitué en première instance, on comprendrait l'attention soutenue de cette merveilleuse Meriem Djebbari qui a l'art de savoir écouter, et auparavant, décortiquer le dossier, comme elle seule sait le faire depuis maintenant près d'un quart de siècle avec passion, rigueur et amour de la justice. C'est avec ces yeux liseurs de bonnes nouvelles que le duo d'avocats constitué s'était attelé à insister sur ce scandale dénoncé avec beaucoup de «rage non calculée» par Maître Rida Bekkat, lequel a plaidé, armes à la main, d'une manière assourdissante, surtout au moment où il évoqua bruyamment cette triste histoire des éléments de la police judiciaire qui ont réussi un morceau d'anthologie dans la manière de démontrer une bêtise mortelle, fatale, à ne jamais enseigner aux élèves policiers ou magistrats. Follow me. «Madame la présidente, je suis triste de m'attaquer, car un tabou, aux ratés des enquêteurs. Figurez-vous que ces enquêteurs avaient trouvé un sac contenant une grosse quantité au-delà du hangar où se trouvait mon client, lequel n'avait aucun «trou» pour faire passer le sac suspect dans la cour. Il n'y a ni fenêtre, ni vasistas, ni porte ni même une vitre fêlée! Je ne pourrai pas passer sous silence ce gramme trouvé sur le sol qui a valu... 10 ans ferme! C'est inadmissible et révoltant à la limite. Vous aurez, par conséquent, toute la latitude pour corriger ces bévues», a dit, le front en sueur, Maître Bekkat qui n'avait rien laissé au jeune confrère Maître Issam Kassoul qui avait tout de même trouvé une dizaine de lignes pour stigmatiser ces mauvais comportements. «Mon âme a tout craché. Il ne me reste qu'à espérer tout le sérieux lors de la mise en examen», avait souri l'avocat d'El Harrach qui sera ravi, une semaine plus tard, tout comme son aîné Maître Bekkat par le verdict qui a vu celui qui avait écopé de 10 ans au tribunal être relaxé, et celui condamné à la cour car les choses étaient rentrées dans l'ordre d'actes de justice. Le cadet n'avait pas d'arguments: six ans ferme.Maître Bekkat, lui, était honnêtement démonté après avoir déploré qu'en pleine réforme de la justice, il se trouve encore un juge qui flanque dix ans d'emprisonnement ferme pour un gramme de gramme, car l'expertise n'a jamais pu établir le poids et la nature du sachet plein, trouvé au-delà du hangar où son client se trouvait. Djebbari l'a entendu et... Suivi en remettant le train «justice» rendu sur les rails. Aïe, aïe, aïe!
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Posté Le : 20/06/2015
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Abdellatif TOUALBIA
Source : www.lexpressiondz.com