Algérie

Divertissement de mauvais goût



Divertissement de mauvais goût
Samir Ould AliL'adage qui veut qu'au pays des aveugles, le borgne est roi rend parfaitement la situation du secteur de la culture à Oran où la médiocrité s'est confortablement et durablement installée. Qu'il s'agisse de théâtre, de musique ou d'édition, le constat est le même, accablant :l'exigence de la qualité a disparu, le principal souci des animateurs étant de meubler le silence, quelle que soit l'indigence des productions.Le théâtre va malC'est ainsi qu'au grand dam des puristes, des pièces de théâtre «sans âme et sans envergure» sont produites et proposées au public comme étant des produits de bon aloi: «Je ne me rends plus au théâtre à cause de la médiocrité et la nullité des productions, affirmait Djamel, pourtant amateur de 4e art. Les histoires sont sans queue ni tête, les acteurs très approximatifs... on ne rit pas... ça ne pousse pas à la réflexion... bref, je n'y vais plus parce que c'est énervant, à la fin.» Le jugement pourrait paraître exagéré, il est pourtant partagé par de très nombreux oranais qui ont cessé de se rendre au Théâtre Abdelkader-Alloula pour les mêmes raisons de médiocrité et d'insuffisance. Salim, lui, ne se rend au théâtre que pour des considérations professionnelles (il est journaliste) ou pour y emmener ses enfants : «Les pièces pour le jeune public sont intéressantes, en effet, et les enfants apprécient vraiment. Mais le théâtre pour adulte laisse sérieusement à désirer et je ne me souviens pas m'être levé pour applaudir des acteurs.» Pour Rachid, quadragénaire et chômeur, on ne peut décemment pas parler de théâtre :«Ce qui se fait actuellement répond plutôt à la nécessité de combler un vide. Juste pour qu'on dise que le théâtre fonctionne», affirme-t-il en assurant ne plus s'y rendre : «Quand tu vois ce qui se fait ailleurs, tu as de la peine pour le théâtre algérien. Il faut arrêter de se voiler la face : le théâtre va très mal !» Ce constat est également valable pour d'autres secteurs comme celui du livre qui, en dépit de la naissance de quelques maisons d'édition, ces dernières années, continue de nourrir le courroux et la déception de très nombreux lecteurs et d'auteurs : «J'ai édité mon livre chez une nouvelle maison d'édition et j'ai découvert que le secteur est entre des mains incompétentes, se plaint unenseignant universitaire.Editeurs de coquillesMon ouvrage est plein de coquilles, les illustrations sont floues, il y a des fautes d'orthographe..., j'ai vraiment été atterré par la qualité du travail de cette maison.» De nombreux auteurs se plaignent de la même manière du mauvais travail des maisons d'édition, y compris les plus anciennes et, normalement, les plus expérimentées : «Il n'y pas que ça, dira un autre universitaire. J'ai l'impression que, comme beaucoup publient à compte d'auteur, les éditeurs ne sont pas très regardants sur la valeur des textes ni de l'écriture. Et il ne font aucun effort pour soigner le rendu définitif.» D'où cette conclusion,largement partagée, que l'impératif économique l'emporte toujours sur l'exigence de la qualité : n'importe qui peut publier, pourvu qu'il en assume le coût.NombrilismeQuant aux productions de télévision - qu'elles soient d'Oran ou d'ailleurs - notamment les séries, tous les Algériens ont pu se rendre de leur indigence: la majorité des scenarii sont d'une rare pauvreté, le jeu des acteurs très approximatif et le téléspectateur le plus complaisant rend souvent les armes et décroche au milieu de l'épisode. D'ailleurs, ces séries sont très vite oubliées, ne pouvant généralement soutenir la comparaison avec ce qui est proposé par les chaînes de télévision étrangères, internet ou, plus simplement, le CD'iste du quartier :«Et avec ça, tu trouves des médias qui chantent les louanges de ces productions, juste parce qu'elles sont nationales. Qu'elles soient médiocre et indigestes importe peu», s'énerve encore Rachid.S. O. A.




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