Algérie

Dispositif contre la grippe porcine à Oran: Les vacances au pays sous surveillance



Le vol 1069 d'Air Algérie en provenance de Marseille est sur le point d'atterrir sur la piste I de l'aéroport international d'Es-Sénia, Oran. Les membres de l'équipe médicale du service de contrôle sanitaire des frontières, un médecin et trois paramédicaux, enfilent leurs blouses blanches, des gilets fluorescents frappés du sceau du service de santé de l'aéroport et se dirigent au pas de charge vers la salle des arrivées internationales, où doivent débarquer près d'une centaine de passagers. Il est 13 heures tapantes lorsque les premiers passagers accèdent à la salle des arrivées. «Bonjour... bienvenue», lance l'un des trois paramédicaux à la première dame qui franchit la porte de la salle de débarquement avant de lui remettre le prospectus d'information du ministère de la Santé sur le A(H1N1), le virus de la grippe porcine. «C'est un prospectus qui contient des informations utiles dans les deux langues nationale et française, sur les symptômes de la maladie mais aussi sur l'attitude à adopter en cas d'apparition de ces symptômes», explique l'infirmier sans trop s'étaler sur le sujet. Pour le médecin et ses trois assistants, il est surtout question de faire de la sensibilisation. Car, en fait, l'équipe médicale sait d'ores et déjà qu'il n'y a aucun cas suspect à bord du vol 1069, d'après le rapport envoyé à la tour de contrôle par le commandant de bord de l'appareil. Il est également question d'avoir un contact direct avec les passagers pour déceler éventuellement des cas probables qui auraient échappé à l'oeil du personnel navigant.

Un passager qui présente par exemple des signes de fatigue ou des symptômes grippaux est orienté systématiquement vers la salle d'observation qui se trouve au niveau même de la salle des arrivées. C'est une salle dotée de trois lits, équipée de tout le matériel nécessaire pour la prise en charge de cas suspects. Blouses et sur-blouses, gants, masques et lunettes de protection en quantités suffisantes y sont entreposés. Pour le vol Marseille-Oran de ce vendredi 26 juin, aucun passager n'a été orienté vers la salle d'observation, vu que tout le monde semblait avoir la pêche. Mais l'équipe sait pertinemment que les apparences peuvent être trompeuses et la possibilité qu'il y ait des cas qui échappent aux mailles du filet reste pour eux tout à fait probable, car il est connu que le virus a besoin d'un délai d'incubation de 7 jours. En d'autres termes, les symptômes de la maladie n'apparaissent chez les cas atteints du A(H1N1) que sept jours après avoir contracté le virus. D'où la pertinence du travail de sensibilisation et d'information qui se fait au débarquement des passagers et qui peut s'avérer prépondérant par la suite.

Dans ce dispositif de contrôle, un autre élément semble décisif tant il garantit la traçabilité des passagers. Au moment de remplir la fiche de police, et ceci est une nouveauté, les passagers sont tenus d'inscrire l'adresse précise de leur lieu de vacances en Algérie et non se limiter à donner uniquement le nom de la ville de destination comme ce fut le cas par le passé. Cela permettrait théoriquement d'entrer en contact avec l'ensemble des passagers du vol en cas d'apparition d'un cas avéré dans les jours qui suivent.



Le passager au centre de tous les intérêts



Au port, le dispositif de veille reste théoriquement le même qu'à l'aéroport. Mais il faut le dire, certaines différences propres à chacun de ces deux modes de transport exigent que l'on s'adapte face à des situations qui ne sont pas toujours les mêmes. Alors qu'un avion en provenance de Marseille peut débarquer à peine quelque deux cents passagers, un car-ferry venant d'Alicante compte généralement plus de 750 passagers. Autre paramètre qui a son importance, un passager qui débarque à l'aéroport après deux heures de vol est beaucoup plus réceptif quant il s'agit de faire de la sensibilisation et de l'information qu'un passager qui a fait 12 heures de traversée par bateau. D'où l'exigence pour une équipe médicale portuaire de faire preuve de beaucoup plus de tact sur le plan de la communication mais aussi avoir la faculté de bien observer, y compris les détails mais sans trop forcer.

Tout le défi est d'assurer « une vigilance maximale» sans pour autant tomber dans l'alarmisme et éviter ainsi «de créer un climat de panique parmi des passagers», nous a indiqué dernièrement le médecin chef du service de contrôle sanitaire des frontières du port d'Oran.

L'autre mot d'ordre adopté pour assurer l'efficacité du dispositif de contrôle portuaire est «coordination» entre services, notamment le contrôle sanitaire aux frontières, la capitainerie du port relevant de l'entreprise portuaire d'Oran (EPO), la police des frontières (PAF) et la douane nationale.

Il est 7h tapantes lorsque El Djazaïr II effectue son ultime manoeuvre pour accoster au quai de Conakry du port d'Oran. On pouvait s'attendre, à la descente des premiers passagers de la passerelle, à voir une nuée de blouses blanches munies de masques et de gants de protection courir dans tous les sens. Rien de tel. Calmes, les médecins du service de contrôle sanitaire aux frontières sont surtout attentifs à tout symptôme grippal que pouvaient laisser apparaître les passagers, avec une attention particulière pour les personnes âgées. En fait, ils savaient déjà qu'il n'y avait pas de cas suspect signalé à bord d'El Djazaïr II. Car selon le médecin chef du service, et en application des directives du ministère de la Santé, le dispositif de contrôle a commencé depuis l'embarquement des passagers au port d'Alicante. Un contact permanent entre le médecin du car-ferry et le service de contrôle sanitaire aux frontières par l'entremise de la capitainerie du port permettait d'avoir un état de la situation actualisé toutes les trois heures, a-t-il affirmé.

On peut se demander, cependant, comment un seul médecin et un seul infirmier à bord du car-ferry peuvent-ils, à eux seuls, contrôler plus de 700 passagers en seulement 12 heures de traversée ? La parade est toute simple. «Tout le personnel navigant, à savoir personnel d'accueil, de restauration, d'administration, était mobilisé pour signaler tout cas présentant les symptômes grippaux: fièvre, toux ou signes de fatigue. «Un voyageur présentant ces symptômes, une fois détecté, est tout de suite pris en charge à la fois par le médecin du bateau mais aussi par un dispositif qui lui garantit tous les services auxquels il a besoin, tout en veillant à ce que son contact avec les autres passagers soit limité. On peut, par exemple, lui éviter de se déplacer vers le restaurant en se faisant livrer à la cabine. Entre-temps, le service de contrôle sanitaire du port est informé des moindres détails concernant le cas suspecté, qui sera le premier à être évacué du bateau une fois que celui-ci accoste au port pour subir les examens qui s'imposent», a expliqué un médecin du port.




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