Algérie

"Dis-moi si tu lis, je te dirais qui tu es"



Comment faire aimer la lecture dès le plus jeune âge? Par la compétition, semble répondre le ministère de l'Education. C'est ce que vient de lancer Mme la ministre. Quelle est la clé du succès ou...du flop d'un tel concours? Nous nous sommes posé la question...
Une première. Un concours littéraire en milieu scolaire a été lancé cette semaine. C'est Nouria Benghebrit qui en a donné le top départ, dimanche dernier, à partir du centre culturel Matoub Lounès de Aïn El Hammam situé à une soixantaine de kilomètres de Tizi Ouzou. «Cette compétition...vise à encourager la lecture et l'écriture créatives parmi les élèves des trois cycles primaire, moyen et secondaire» a précisé la ministre de l'Education nationale. Quant au choix de la ville du lancement du concours, celui-ci «est une reconnaissance quant aux bons résultats enregistrés par cette localité» a-t-elle ajouté.
C'est le ministère de l'Education qui organise cette manifestation avec la participation de l'Office national des publications scolaires, le ministère de la Culture, le Haut Commissariat à l'amazighité et le Haut Conseil de la langue arabe. Ça a l'air d'être plus que sérieux. Cette compétition concernera quels élèves? ceux «des établissements des wilayas déjà engagées dans les projets lecture/plaisir et théâtre, à savoir Laghouat, Constantine et Béjaïa, ainsi que les 300 écoles primaire, CEM et lycées associés à l'Unesco» nous apprend Mme Benghebrit. Ainsi, ce concours ne concerne, malheureusement, pas toutes les écoles du pays. Les raisons de cette participation limitée sont certainement à mettre sur le compte de la nouveauté de la compétition. Et qu'au fil des éditions l'élargissement à l'ensemble des écoles du territoire national s'opérera. Contentons-nous des modestes prétentions de cette première édition.
L'initiative de lancer un concours de lecture et d'écriture à l'adresse de nos écoliers est à applaudir des pieds et des mains. Il n'est un secret pour personne que la lecture de manière générale et le livre plus particulièrement ne font pas partie de la nomenclature des addictions ni de nos enfants ni de nos jeunes ni de nos moins jeunes même si c'est dans cette catégorie que se trouvent les rares lecteurs dans notre pays. D'ailleurs, il est difficile de quantifier les «accros» du livre. Le commissaire du 22ème Salon international du livre d'Alger (Sila) qui s'est tenu en novembre dernier, Hamidou Messaoudi, a déclaré lors d'une conférence de presse qu'il «ne pouvait fournir de statistiques sur les ventes». On ne saura donc pas combien de livres ont été achetés. Par contre, le nombre de visiteurs, lui, est impressionnant. Pas moins d'un million sept cent mille personnes. On sait également que 300 éditeurs algériens et 658 étrangers représentant 50 pays ont participé à la 22ème édition du Sila.
Le paradoxe est que notre pays ne compte que 40 libraires en tout et pour tout. Comment expliquer le «phénoménal» nombre des éditeurs, des visiteurs comparés à la «poignée» de libraires? Il y a une histoire de sous dans ce créneau. Une bibliothèque par commune cela fait 1541 bibliothèques.
Ajoutez à cela les bibliothèques des écoles, des CEM, des lycées, des universités et vous obtiendrez le nombre d'exemplaires que peut écouler un éditeur pour chacune de ses publications. C'est juteux, mais n'a rien à voir avec le nombre réel des lecteurs. Un dernier exemple: le ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, avait annoncé lors du dernier Sila que son département allait «offrir chaque année 50.000 ouvrages littéraires aux bibliothèques de 50 lycées à travers l'Algérie ayant obtenu les meilleurs résultats au baccalauréat». Du beurre sur les épinards des éditeurs. Mais qu'en est-il réellement de l'acte de lire? De cette nourriture de l'esprit? Pas très prisée, il faut l'admettre. C'est pourquoi, l'initiative du concours «Aqlam Biladi» de Mme Benghebrit est plus que louable. Elle ne règle pas complètement le problème de la lecture dans le pays, mais elle ouvre la voie au déclic salutaire qui, nous l'espérons, se répandra, à terme, sur l'ensemble du territoire national. Mais attention à la mise en oeuvre. Si l'attractivité et la motivation ne sont pas au rendez-vous, le flop est garanti. Le mode d'emploi de ce concours n'a pas été rendu public. Ce qui n'est pas de bon augure.
Seule la dernière phase a été abordée par la ministre. «Les résultats seront annoncés le 5 juillet (double fête de la Jeunesse et de l'indépendance) et les 10 lauréats de ce concours seront récompensés le 1er novembre prochain, lors d'une journée «portes ouvertes» sur le secteur de l'éducation, qui sera organisée en marge de la 23ème édition du Salon international du livre d'Alger (Sila 2018)» a-t-elle déclaré. Que recevront les 10 lauréats? Un ticket d'entrée au parc zoologique? Si c'est le cas, il n'est pas certain que la prochaine édition de «Aqlam Biladi» ait lieu. Mais si les récompenses sont assez conséquentes et donc motivantes, l'effet viral de la lecture dans notre pays sera garanti. A suivre, donc!

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