Algérie

diktat sous le parasol du gendarme


Toute la plage est une «propriété privée».
Des jeunes à l'allure un peu marginale, imposent leur volonté à des centaines de familles algériennes sous le regard impuissant d'un corps de sécurité de la République.
La plage qui jouxte le complexe balnéaire Matarès de Tipasa n'a rien d'un lieu public, d'accès libre aux citoyens algériens. Le visiteur est «pisté» par des «rabatteurs» dès qu'il met le premier orteil sur le sable. Vue de loin, l'ambiance bon enfant qui semble régner sur la plage promet un moment de détente garantie. Mais la réalité de Matarès est bien plus «lugubre». Il suffirait au visiteur de poser ses affaires à n'importe quel endroit de la plage pour se voir accosté par un «malabar» à l'allure à la limite agressive, qui invite le citoyen à déguerpir. «Cet endroit n'est pas pour vous», lance-t-il avec une vraie fausse politesse. Le bonhomme, la trentaine, s'assure d'abord que l'intention de l'estivant était de planter son propre parasol. Le verdict est sans appel et le «plagiste» montre très vite des signes d'impatience.
La voix prend de nouvelles intonations et le lexique change de «gamme», s'il arrive à l'estivant de dénier au jeune homme le droit de s'approprier la quasi-totalité de la plage. Car à Matarès, c'est bien de cela qu'il s'agit. Toute la plage est une «propriété privée». C'est d'ailleurs en ces termes que le «patron des plagistes» qualifie l'endroit. «C'est notre priorité», dit-il allusion sans doute à Dieu sait quelle famille, entreprise qui s'est autoproclamée maîtresse de la plage. L'un de ses subordonnés «ose» une info stupéfiante. «Mon patron a payé 900 millions pour gérer la plage», dit le petit bonhomme âgé d'à peine 25 ans, mais très décidé à mériter le salaire que lui verse son patron. Une petite protestation du citoyen, débouche sur un discours surréaliste.
Le «patron» en question se met à parler politique et affirmer avec une audace sans gêne, que les déclarations du ministre de l'Intérieur sur la gratuité des plages n'est valable qu'à Club des Pins. «Ici au Matarès, ça ne fonctionne pas comme ça. Si vous voulez planter votre parasol, allez lui dire de vous ouvrir Club des Pins». Et avec une terrifiante assurance, le «patron» renvoie lui-même l'estivant vers le poste de gendarmerie, sis au coeur du complexe «Matarès». Plus qu'une assurance, le malabar et tous ces «collaborateurs» qui traînent entre les tables vides surmontés de parasols dégagent une dose d'arrogance à couper le souffle, voire même à susciter une véritable terreur aux familles qui ont décidé de ne pas louer leurs services. Résultat: une très large plage totalement occupée d'équipements de plage déjà posés et à moitié inoccupés et une portion congrue de cette même plage où s'entassent des dizaines de familles, visiblement frustrées par tant de promiscuité, alors que ceux qui ont payé les services des plagistes disposent d'espace considérable. Une forte impression de deux collèges se dégage dans cette plage, pourtant publique et qui répond en tous points aux qualifications énumérées par le ministère de l'Intérieur pour que s'y appliquent les lois de la République.
Lesquelles lois sont censées être appliquées par les services de sécurité. Il se trouve que le complexe «Matarès» est doté d'un poste de gendarmerie où exercent, en permanence, trois gendarmes au moins.
La proximité de la plage de cette structure sécuritaire, à moins de 200 mètres du lieu de baignade, amène à se poser de sérieuses questions sur le rôle des gendarmes et leur conception de l'application de la loi. Celle-ci soulignons-le, oblige le «plagiste» à ne pas planter des parasols vides, à attendre que l'estivant recourt à ses services et à ne jamais aborder des familles sous quelque motif que ce soit, sauf si ces dernières ne lui adressent pas la parole.
Or, toutes ces règles édictées par le ministre de l'Intérieur sont bafouées par le «patron» de la plage, au vu et au su des représentants de l'ordre. Le chef du poste de gendarmerie à «Matarès» avoue clairement son impuissance à faire son travail. «Ils ont un contrat avec la direction du complexe, ça m'échappe», dit-il, allusion au comportement illégal des «plagistes», lorsqu'on l'interroge sur la passivité de ses éléments devant les agissements, pour le moins, condamnables, au niveau de la plage. L'attitude du gendarme est très difficilement explicable.
Il n'arrive pas à admettre que la plage soit un espace public par excellence et placé sous sa responsabilité. Cet état de fait conduit à une situation révoltante où un petit groupe de jeunes à l'allure un peu marginale, impose sa volonté à des centaines de familles algériennes sous le regard impuissant d'un corps de sécurité de la République
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