Algérie

Deux ou trois idées reçues sur le processus tunisien



L'instabilité mènera à  un coup d'Etat militaire ou à  une montée en puissance des islamistes.

FAUX. Ces deux scénarios sont agités par ceux qui redoutent une poursuite du processus révolutionnaire. Ils sont factices. L'armée n'est pas en position de jouer un rôle politique et surtout pas contre le mouvement de protestation. Il n'y a donc pas de danger, en tout cas pas dans les mois qui viennent. Ensuite, la menace islamiste est, à  mon avis, excessivement exagérée. Les islamistes partent de très bas en termes de réseaux politiques. Je les ai vus incapables d'organiser un petit carré dans une marche UGTT. Cela peut changer dans les semaines qui viennent, mais de là à  parler de menaces sur le processus démocratique, il y a de la distorsion de la réalité dans ces propos alarmistes.     

Les puissances étrangères ont intérêt à  ce que le système RCD se maintienne.

VRAI. Mais elles ne sont pas les seules. Il est clair que l'exagération du risque militaire et islamiste est le fait des Etats-Unis, de l'Union européenne, ou encore de l'Algérie ou de pays franchement hostiles au changement, comme la Libye. Mais aussi, curieusement, d'une partie des dissidents du régime Ben Ali soutenus par les réseaux internationaux d'ONG des droits de l'homme. Face aux nouveaux acteurs qui émergent et qui viennent d'une Tunisie plébéienne des régions de l'intérieur, certains dissidents des élites citadines donnent le sentiment de vouloir mettre des limites à  la révolution. Un peu comme s'ils se sentaient confisqués leur rôle de tutelle symbolique de l'expression populaire pour la liberté. Il existe une feuille de route minimaliste à  la révolution qui fait référence au départ de Ben Ali et au  «lynchage» de son clan. Aujourd'hui, ce cadre minimaliste est débordé par la rue. Ce qui débusque déjà de nouveaux censeurs qui s'ajoutent aux anciens toujours en place.
 
La formule «Â système RCD + ministres d'ouverture» est viable.

FAUX. Le mouvement populaire qui continue de s'exprimer partout dans le pays perçoit très clairement que l'enjeu stratégique de la situation est dans le pilotage de la transition. Les acteurs du mouvement savent qu'ils détiennent le rapport de forces pour réduire l'influence du RCD sur le gouvernement provisoire. L'opinion ne veut plus des ministres RCD et surtout pas aux postes-clés, comme celui de l'Intérieur. S'entêter dans ce contexte à  vouloir faire la transition avec Mohamed Ghannouchi, Premier ministre inamovible de Ben Ali, à  la manette, ne fera qu'alimenter la contestation. Le nouveau gouvernement de la transition devra tenir compte de la fracture qui s'est creusée entre l'intérieur du pays et Tunis. La chute de Ben Ali est le trophée des villes de l'ouest et du sud. Bien avant celui de Tunis. Si les gens de Sidi Bouzid, de Kasserine et de Tala ne se reconnaissent pas dans les ministres d'ouverture, alors le gouvernement de la transition restera suspect à  leurs yeux


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