Algérie

Desserrer l'étau sur les libertés économiques



Voilà donc que la romantique Venise se fait l'hôte de dix ministres de l'Intérieur du pourtour méditerranéen pour parler sécurité. Il s'agit de la 14e Conférence des ministres de l'Intérieur de la Méditerranée occidentale (CIMO ou 5+5). En marge de cette conférence qui s'est ouverte mardi dernier, M. Zerhouni a livré ses impressions en revenant sur l'un des thèmes-clé de cette réunion, à savoir la coordination Nord-Sud dans le domaine de la lutte antiterroriste. En effet, M. Zerhouni a insisté sur « la nécessité de s'attaquer à la matrice idéologique du terrorisme », rapporte l'APS. Et d'argumenter : « Nous considérons que la lutte antiterroriste ne peut se résumer uniquement aux seules solutions sécuritaires, mais elle doit englober aussi le traitement de la matrice idéologique de ce phénomène. » Petit parallèle : les chroniqueurs et analystes politiques ont abondamment relevé la discrétion des islamistes dans l'ambiance folle que connaissent nos villes et nos campagnes depuis cet historique 18 novembre 2009 et la qualification épique des Verts au Mondial 2010. Cette déferlante de drapeaux comme signe manifeste d'un regain de nationalisme constitue, selon eux, justement un rempart contre cette fameuse « matrice idéologique » de l'extrémisme religieux. Il faut dire que même les sympathisants de la mouvance islamiste ont fini par se diluer dans le moule patriotique. Cela laisse l'impression qu'un consensus sans précédent est en train d'irriguer (et d'iriser) tout le pays.Question aux ministres de l'intérieur réunis à la cité des Doges, et tout particulièrement les ministres des régimes algérien, tunisien, marocain et libyen : quelles mesures proposent-ils à leurs sociétés pour desserrer l'étau sur les libertés démocratiques et permettre une plus grande participation citoyenne dans la vie publique ' L'une des grandes leçons du dernier match contre l'Egypte est que l'Etat algérien, en faisant confiance à ses supporters, a remporté de haute lutte la « bataille » de Khartoum. Et que la police de Zerhouni a laissé défiler et déferler des millions d'Algériens dans la rue, dont des repentis, des dealers, des repris de justice, des pickpockets, des marginaux de tout acabit, sans que cela prête à conséquence sur le plan sécuritaire. En quoi la levée de l'état d'urgence menacerait-elle la sécurité des Algériennes et des Algériens ' Tous les sages de ce pays s'accordent à le dire : l'amélioration de la prestation politique de nos dirigeants, l'octroi de plus de liberté à notre télévision et carrément l'ouverture du champ audiovisuel, le renforcement des libertés syndicales, des libertés de réunion et d'expression ne peuvent qu'aller dans le sens de cet endiguement de la violence politique. Ils l'ont montré et démontré avec brio : quand l'Etat est vraiment aux côtés des Algériens et non pas contre eux, quand nos jeunes se sentent respectés, ils préfèrent s'emmailloter d'un drapeau que de sauter dans un « cercueil-pirogue ». Qu'on songe à ce soulèvement héroïque des habitants du village d'Issenadjen (près de Tigzirt) qui ont arraché un otage des griffes du GSPC sans attendre l'intervention des services de sécurité. Dans les années 1990, les manifestations populaires, au lendemain de chaque attentat ou massacre, mettaient du baume au c'ur des familles des victimes, les consolaient, les extirpaient de leur terreur et de leur solitude. A ce titre, ces marches avaient indéniablement une vertu thérapeutique et cathartique. Elles enhardissaient le c'ur des Algériens et aiguillonnaient leur désir de résistance. Signe des temps : à la suite des attentats du 11 avril 2007, le régime préféra confiner la foule endeuillée dans l'enceinte de la Coupole du 5 Juillet pour contenir sa colère, donnant lieu à une cérémonie exagérément encadrée au point de vider l'action de son sens tellement elle perdait toute spontanéité. L'évidence est là : la rue est le seul parti politique qui unit vraiment tous les Algériens. C'est le parlement populaire, le parlement suprême. Les récentes festivités l'ont montré une nouvelle fois : les Algériens ne se sentent vraiment chez eux que lorsqu'ils manifestent ensemble. Que ce soit pour manifester leur joie ou pour manifester tout court. Si M. Zerhouni souhaite éradiquer sérieusement la matrice idéologique du terrorisme, il devrait faire simplement confiance aux Algériens en commençant par exemple par ne pas mater les enseignants grévistes chaque fois qu'ils ouvrent leur gueule en dehors d'une salle de cours froide'


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