En abritant la conférence internationale sur le désarmement, l'Iran
cherche à démontrer l'impératif parallèle qui existe entre son droit à
l'utilisation du nucléaire civil et le devoir des puissants de ce monde de se
conformer à l'esprit du Traité de non prolifération (TNP). C'est aujourd'hui
que débute à Téhéran, la capitale iranienne, les travaux de la conférence internationale
sur le désarmement, un thème de grande actualité à travers le monde. «L'Iran
est habitué à tenir des séminaires sur le désarmement mais cette conférence est
très importante de par le niveau des participants et la conjoncture dans
laquelle elle se tient », nous ont affirmé hier des organisateurs. En effet,
l'on dénombre près d'une soixantaine de pays dont les représentants sont venus
en nombre, qu'ils soient ministres, hauts responsables d'institutions, experts
et même journalistes de divers médias internationaux. L'Algérie y est aussi
présente aux côtés des pays qui aspirent à un nouvel ordre mondial sans trop de
heurts entre les puissants et ceux qu'ils ont décidé de considérer comme
faibles. Ainsi, dénombre-t-on beaucoup de pays arabes, d'Amérique Latine et
d'Asie. La conjoncture, faut-il le noter, est marquée notamment par les fortes
pressions qu'exercent les Etats-Unis sur l'Iran afin de l'obliger à renoncer à
l'enrichissement de son uranium. A force de l'insistance des Américains sur
cette question, ne reste que la Chine à convaincre pour voir le Conseil de
sécurité de l'ONU prendre des sanctions plus sévères contre Téhéran, la Russie
de Medvedev ayant déjà quelque peu cédé dans ce sens. N'est-ce pas Obama qui a
fini la semaine dernière à Prague, par apposer sa signature aux côtés de celle
du président russe sur un document les appelant tous deux à procéder à la
diminution de leur arsenal nucléaire respectif ? C'est à croire que le
président américain chercherait à inaugurer une nouvelle ère en matière de
règlements des conflits, celle qui éviterait le recours systématique à la force
des armes. C'est d'ailleurs, ce que l'on pourrait entrevoir à travers le
nouveau défi que s'est fixé récemment l'Organisation de l'Alliance Nord
Atlantique (OTAN) -que les USA dirigent - en cherchant à élaborer ce qu'elle
qualifie de «nouveau concept stratégique». Il faut reconnaître que le bourbier
irakien et afghan dans lesquels s'enlisent depuis de longues années les
Américains, oblige bien ces derniers à réviser leurs méthodes d'intervention à
travers le monde. Il ne faudrait pas croire que ce sont les grosses pertes en
vie humaines, civiles de surcroît, causées par ces affreuses guerres, qui
pèseraient sur la conscience des dirigeants américains et autres occidentaux,
puisque dans leur esprit ce ne sont que «des dégâts collatéraux». Ce sont
plutôt les budgets colossaux qu'elles exigent pour être «bien menées» qui leur
posent problème. D'autant qu'Obama s'est vu gratifié dernièrement par le
Congrès américain, d'un vote positif pour sa nouvelle réforme du secteur de
santé de son pays. Il se doit donc d'économiser le plus possible d'argent pour
pouvoir la mettre en Å“uvre sans trop toucher à la poche des libéraux qui, une
fois les conséquences de la crise financière quelque peu digérée, lui ont fait
déjà savoir qu'une telle réforme n'était pas du tout de leur goût.
Compromis contre règlements de conflits
Obama est ainsi à la recherche de
compromis pour réformer l'Amérique que son prédécesseur a profondément
déstructurée. Bien qu'il se soit permis de garder la pression sur l'Iran à
travers le fameux dossier du nucléaire comme l'avait fait Bush avant lui, le
jeune président américain n'aurait pas trop intérêt à pousser à un affrontement
militaire avec le pays des mollahs. Fragilisée et fortement secouée par les
guerres, cette partie du monde n'a nullement besoin de voir surgir d'autres
conflits. L'Iran se doit d'ailleurs de réussir à se positionner comme acteur
incontournable dans le règlement des conflits qui la minent. Le pays
d'Ahmedinedjed pourrait ainsi négocier sa médiation en Irak et en Afghanistan -
deux pays qu'il connaît parfaitement bien - sans qu'il soit menacé d'attaques
par des armes de destruction massive. Cette dernière supposition, c'est encore
Obama qui l'a insinuée à travers sa récente déclaration sur un éventuel recours
de son pays à ces armes. Pour rappel, le président iranien a vite fait de
saisir le Conseil de sécurité pour qu'il juge de sa gravité. Aujourd'hui, en
organisant la conférence internationale sur le désarmement, Téhéran tient bien
à rappeler aux Américains quelques-unes de leurs obligations contenues dans le
TNP dont ils sont signataires. L'Iran veut démontrer qu'il repose la politique
qu'il prône pour défendre « son dossier » du nucléaire, sur le respect de
certains grands principes que les Occidentaux feignent d'ignorer mais qu'ils
mettent paradoxalement en avant pour l'empêcher d'enrichir son uranium. La
conférence de Téhéran qui dure deux jours, rappelle qu'il existe des milliers
d'armes nucléaires qui menacent la paix et la sécurité dans le monde. Elle
prend, pour cela, la communauté internationale à témoin toute en signalant que
celle-ci a exprimé de nombreuses demandes en faveur du désarmement mais aucune
n'a abouti à ce jour.
Le nucléaire, l'AIEA et les religions monothéistes
Ainsi, est-il signalé encore par les Iraniens que «le TNP a déjà 40 de
vie sans qu'il ait pu apporter des changements significatifs en matière de
désarmement». Le principal objectif de la conférence de Téhéran est « de
réfléchir, est-il affirmé, sur les défis qui s'imposent aujourd'hui au monde et
qui sont liés au désarmement nucléaire et à la suppression de toutes autres
armes de destruction massive». L'autre objectif de la conférence - exigé
d'ailleurs pour la concrétisation du premier - est «de sortir avec des
propositions concrètes à même de débarrasser le monde de ses arsenaux nucléaires».
La conférence n'omet pas ainsi de consigner dans ses cahiers la gravité de la
déclaration d'Obama relative au recours de son pays à l'arme nucléaire «en cas
de besoin». Se sentant directement visé par de tels propos, l'Iran estime
«qu'il est inadmissible de voir des pays détenteurs de l'arme nucléaire menacer
d'autres qui ne l'ont pas». Les conférenciers soulignent que non
seulement ces pays «nucléaires» n'ont pas voulu détruire leur arsenal «mais
cherchent plutôt à le moderniser, ce qui provoque de sérieuses inquiétudes au
sein de la communauté internationale». C'est ainsi que les responsables iraniens
proposent «de réfléchir sur les procédures juridiques qui devraient être
enclenchées conséquemment à de tels agissements ». Ils estiment, par ailleurs,
«qu'il est du devoir des pays signataires du TNP de faire pression sur ceux qui
ne le sont pas, pour que ces derniers le deviennent incessamment». Ils
recommandent même à ce que «tous les pays soumettent leurs activités dans le
domaine du nucléaire aux contrôles de l'Agence internationale de l'énergie
atomique (AIEA)». L'Iran estime que les premiers à être concernés, «l'entité
sioniste et aussi les pays non signataires du TNP».
A cet effet, il ne manque pas non
plus de dénoncer et de condamner «la politique de deux poids, deux mesures»
dont il en est la première victime depuis longtemps. D'ailleurs, il souligne
bien dans sa conférence que «cette politique chère aux puissants de ce monde
prive certains pays de leur droit de l'utilisation pacifique du nucléaire et
permet à ceux qui détiennent l'arme nucléaire de ne pas se conformer aux
dispositions du TNP». Téhéran appelle encore une fois « à une plus
grande implication de l'AIEA dans les processus du désarmement, une fois
clairement élaborés». Elle préconise en même temps, notamment pour ce qui est
du désarmement de la région du Moyen-Orient, «l'exécution par les pays
détenteurs du nucléaire militaire, des décisions prises lors de la conférence
de 1995 ».
Les conférenciers tiendront aussi
à se pencher sur «ce que les religions monothéistes recommandent comme actions
à entreprendre et efforts à déployer pour assurer la paix et la sécurité à
l'humanité».
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Posté Le : 17/04/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Envoyée Spéciale A Téhéran (Iran): Ghania Oukazi
Source : www.lequotidien-oran.com