Algérie

Des vies de crises et de défiance


Des vies de crises et de défiance
Si ce conflit a éclaté en 2012, l'histoire malienne depuis 1963 a provoqué des ranc'urs toujours présentes dans l'esprit des négociateurs.«Alors que le monde fait face avec angoisse à la violence d'une brutalité parfois inouie qui sévit en Syrie, en Irak, en Afrique centrale, en Ukraine, en Libye, au Proche-Orient, nous ne pouvons pas perdre de temps ici à Alger et nous devons montrer la voie de la sagesse et du courage de faire la paix, dira à la tribune, lors de la cérémonie d'ouverture, Bert Keonders, le représentant de la Minusma. Les Maliens doivent aller vite et s'entendre rapidement.» Mais à ces mots, certains sourient doucement.Les histoires personnelles de ces négociateurs sont longues, parsemées de crises, d'affrontements avec Bamako ou avec d'autres mouvements armés. «La crise ne dure pas depuis 2012. Elle existe depuis 1963», raconte un cadre du MAA. «On nous parle de 'mali nouveau?, mais IBK était déjà là en 1992 et en 1998, il a été Premier ministre pendant 6 ans. Pour les habitants du Nord, cet homme n'a rien de nouveau. Ils ne lui font pas confiance et c'est normal», renchérit un diplomate. D'où la difficulté de faire confiance aux déclarations de bonne intention. «Nous voulons des garanties prises par Bamako devant la communauté internationale avant de signer quoi que ce soit», affirme un cadre du MNLA. La défiance est encore plus forte envers l'armée malienne.La violence des soldats venus «mater» la rébellion des années 1990 est encore présente dans leurs récits. «Moussa Traoré ne s'est pas contenté d'appauvrir son peuple, il a mené une violente répression contre les Touaregs. Je suis un survivant de ce massacre, raconte un notable touareg de Kidal. Je me souviens de l'acharnement et des provocations des militaires maliens qui nous agressaient. Nous sommes libres, nous avons gagné cette liberté et il n'est pas question de la négocier aujourd'hui».Un homme originaire de Gao et membre du MAA, proche de Bamako, la quarantaine, raconte : «J'ai vu des hommes égorgés devant moi. Un jeune attaché par le pied à une voiture et traîné dans la ville». «On coupait les oreilles des peaux claires et les enfants jouaient avec», renchérit l'homme, plus âgé, assis à côté de lui. Ce dernier a travaillé au sein des institutions maliennes. «Nous qui avons étudié, nous savons dans quelles conditions un homme du Nord étudie ici. Il y a encore dans les couloirs des hautes institutions des théoriciens qui disent que pour régler les problèmes du Nord il faut faire une épuration ethnique. Nous ne sommes pas là par hasard !»ArrestationsMoussa Ag Acharatoumane, 29 ans, est l'un des fondateurs du MNA, un mouvement politique qui deviendra le mouvement armé MNLA par la suite. En 2010, à Tombouctou, lors du congrès de la création de ce mouvement politique, Moussa est arrêté avec plusieurs autres participants. «Nous voulions discuter, nous étions pacifiques et nous avions créé ce mouvement parce que nous estimions que notre combat était mal compris. Mais ils ne nous ont pas laissé faire. Ils ont arrêté tout le monde. C'est l'Etat malien qui pousse les gens à prendre les armes», raconte-t-il.MassacresMais, au-delà de ce qui oppose les hommes de Gao, de Tombouctou ou de Kidal aux autorités de Bamako, les Mouvements entre eux ne s'entendent pas. Djibril Bassolé, le ministre des Affaires étrangères burkinabé a voulu les raisonner lors de la cérémonie d'ouverture : «Les facteurs de division entre vous sont un facteur de menace pour la paix, pour la cause et pour vos enfants.» Mais cette défiance-là également est ancienne.«Le Mali a toujours créé ses propres milices avec des gens du Nord pour diviser les habitants, explique Moussa Ag Acharatoumane, devenu chargé de communication du MNLA. Dans les années 1990, les milices Ganda Koy passaient dans les villages et massacraient les gens. Aujourd'hui, tout mouvement doit clairement se positionner. On ne peut pas dire qu'on est contre Bamako, pour le peuple de l'Azawad et prendre les armes contre ces derniers.»


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