Algérie

Des solutions existent pour relancer l'industrie du cuir mais...* Alors que 70 millions de paires de chaussures sont importés annuellement


«La prise en charge de la filière cuir devra se faire à l'amont, car le marché de la matière première est totalement désorganisé en raison, principalement, de la mauvaise collecte du produit brute», a estimé Amar Takjout, secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs du textile et cuir, affiliée à l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA).
Pour mettre de l'ordre, le gouvernement doit commencer par l'encouragement de la création des micro-entreprises pour la collecte des peaux, à l'image de la filière lait où cette activité est assurée par des petites entreprises. Des dizaines d'emplois pourront être créés.
Pour leur garantir un cahier des charges, les usines de production de cuir pourront signer des conventions avec eux, ce qui garantira aux deux parties le maintien de l'activité. La dissolution, en 2007, de l'entreprise publique de collecte des peaux brutes sans prévoir d'alternatives a causé un préjudice à la filière. La disparition de cette entreprise a laissé place à la commercialisation clandestine du cuir brut.
Les cinq tanneries publiques travaillent difficilement et souffrent de grandes difficultés à cause de la baisse des quantités de la matière première commercialisée légalement. «Il n'y a pas de contrôle car les quantités vendues ne sont pas
facturées», a fait remarquer M. Takjout, proposant la réorganisation des abattoirs, comme premier pas pour récupérer une activité créatrice de richesses. En prenant en main la gestion des abattoirs, les APC pourront rentabiliser la collecte des peaux et utiliser les recettes au profit de la collectivité, a-t-il proposé.
Mais, a-t-il estimé, «il faut une volonté politique pour relancer le secteur du cuir». A défaut, ce sont les importateurs qui tireront profit de cette situation car l'absence d'une production locale favorisera davantage les importations des chaussures, vêtements et autres produits fabriqués à base de cuir. Hormis quelques fabricants et artisans, notre pays accuse un énorme déficit dans le domaine de la fabrication de la chaussure.
L'Algérie importe annuellement une moyenne de 70 millions de paires de chaussures et ne produit qu'un million de paires. C'est dire que seul 1,5 % de la demande nationale est couvert par la production locale. Paradoxalement, la matière première est exportée de manière frauduleuse et réimportée sous forme de produits finis moyennant de grandes sommes en devises. La situation actuelle de la filière «favorise la spéculation, l'informel, la vente et l'exportation illégale».
Selon certains spécialistes de la filière, la matière première est actuellement disponible car il y a un surplus sur le marché après le retrait des Syriens qui achetaient clandestinement la matière première et l'exportaient frauduleusement vers l'Europe, via la Tunisie principalement.
«Trois tiers de la matière première sont exportés frauduleusement en produits semi-finis.» Du fait qu'il s'agit de tanneries clandestines, les normes de production ne sont pas respectées causant un danger pour l'environnement car elles ne prévoient pas de moyens pour traiter les eaux utilisées et les déchets de cuir sont jetés dans la nature. En l'absence de données sur l'ampleur du phénomène, la nappe phréatique est menacée par les rejets des eaux contenant des déchets toxiques, ont averti des professionnels de la filière.
Sans pouvoir fournir de preuves, les professionnels reconnaissent qu'ils ont tiré des conclusions en observant ce qui se passe au niveau des abattoirs.
En l'absence d'un système de récupération professionnel, la qualité des peaux collectées est parfois mauvaise, causant des déperditions.
Durant l'Aïd El Adha, une moyenne de quatre millions de têtes est sacrifiée annuellement, mais les peaux sont jetées, en grande partie, dans la nature et ne sont pas récupérées. Pourtant, c'est une source considérable qui permettra de faire tourner trois grandes entreprises de production de cuir pendant une année. M. Takjout a proposé la création de dépôts dans les communes qui se chargeront de vendre ces peaux aux tanneries. Même si le dépeçage des moutons est mal fait, il sera toujours possible de récupérer au moins un million de peaux à exploiter par la filière cuir et la maroquinerie.
Il y a une vingtaine d'années, le marché du cuir était florissant grâce aux entreprises de fabrications de chaussures et autres produits comme les vestes et les sacs. Mais depuis la fermeture de la majorité de ces entreprises, ce sont les importations massives de produits chinois qui ont pris le relais.
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