Algérie

Des producteurs de pomme de terre tirent la sonnette d'alarme



« Si les pouvoirs publics ne règlent pas le problème rapidement et définitivement, c'en sera fini de la filière pomme de terre en Algérie .» Ce cri d'alarme est celui des producteurs de pomme de terre que nous avons rencontrés ce lundi à la Chambre d'agriculture de Bouira.Depuis plusieurs années, cette filière est devenue l'une des plus développées en Algérie, réussissant, en quelques années, à renverser la donne en faisant de la pomme de terre une source de devises en l'exportant, alors que dans les années 2000, c'était le contraire qui se produisait, avec des importations à coups de plusieurs dizaines de millions de dollars.
Cependant, et d'après des professionnels de la filière, dont la wilaya de Bouira regorge tant elle est devenue une wilaya leader en la matière, surtout avec les deux plateaux des Aribs à Aïn-Bessem et celui d'El-Esnam, les tergiversations constatées au niveau du ministère surtout avec le système de régulation Syrpalac qui aurait dû être un moyen d'encouragement pour les professionnels, afin de produire toujours plus en étant rassurés quant à l'écoulement de leurs productions, depuis quelques années, c'est le contraire qui est constaté. Des producteurs qui se retrouvent le plus souvent avec une production en totale mévente et qui supplient, à chaque fois, le ministère de l'Agriculture et du Développement rural de leur venir en aide et prendre leurs produits dans des chambres froides à un prix négocié, afin de ne pas tomber dans la banqueroute.
Mais, selon les responsables de l'association des producteurs de pomme de terre, « aujourd'hui et après plusieurs années de faillite, la filière est sérieusement menacée puisque, sur les 500 producteurs répertoriés au niveau de la wilaya, et avec les faillites relevées, chaque année pendant les récoltes de saison et celles de l'arrière-saison, aujourd'hui ce sont des centaines de professionnels qui ont déclaré faillite et qui ont abandonné la production », déclarent-ils amers, avant de poursuivre : « Aujourd'hui, nous sommes une dizaine de professionnels à tenir le coup, mais avec des dettes et des litiges .» Des litiges avec les fournisseurs qui réclament leur argent auprès des producteurs qui n'ont pas un sou pour payer, avec toutes ces crises à répétition et ces retards dans les recouvrements des ventes de leurs productions.
À l'image de Gvapro qui a pris des quantités de pommes de terre pour le stockage au mois de février dernier au niveau de ses chambres froides à Alger, mais qui a décidé, au mois de mai, de réduire les quantités livrées de 25%, en arguant la mauvaise qualité.
Depuis, les producteurs qui ont livré leurs produits à cette entreprise réfutent les arguments avancés, rappelant que le légume a été contrôlé à la source, soit sur champs, puis devant la chambre froide en présence des inspecteurs et des représentants du Gvapro. Messaoud Boudhane, président de l'association des producteurs de pomme de terre, rappelle que lors de cette vente, une réduction forfaitaire qui variait entre 5 et 9% sur la quantité livrée avait été décidée par les responsables de Gvapro, selon la qualité du produit et acceptée par tout le monde. Aussi, depuis le mois de mai, lorsque ces producteurs, qui avaient reçu la première tranche de 50% de la somme globale en mars dernier, ont appris que Gvapro allait leur déduire 25% de la quantité restante, ont saisi le ministère mais, rien n'a été fait. D'où leur menace de recourir à la justice pour récupérer leur argent. Rappelons que ces producteurs avaient livré, dans le cadre d'un accord avec le ministère, quelque 30 000 quintaux, dont près de 12 000 au groupe Gvapro. Tous les autres opérateurs privés détenteurs de chambres froides avaient payé les quantités qui leur sont octroyées au prix fixe de 25 dinars, sauf le groupe Gvapro. Un problème qui risque de se répercuter sur la nouvelle récolte de saison qui se profile à l'horizon et qui attend, au même titre que les précédentes campagnes, une autre décision du ministère concernant les chambres froides et le stockage des quantités excédentaires pour les périodes creuses ou de soudure.
D'après nos interlocuteurs, au rythme où vont les choses, et à voir le nombre de patatiers qui ont quitté la filière, la pomme de terre accusera une chute drastique dans le pays et créera une crise sans précédent dans les mois à venir, pour atteindre des prix inimaginables, qui dépasseraient les 200 dinars le kilogramme, selon l'avis des professionnels.
Y. Y.


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