Algérie

Des poupées, des bouteilles and co



Des poupées, des bouteilles and co
Meriem Aït El Hara devant ses bouteillesIls sont sept artistes qui exposent actuellement leurs installations, certaines plus captivantes que d'autres et ce, jusqu'à la fin de janvier.Sept plasticiens algériens de différentes générations issus majoritairement des Beaux-Arts ont dévoilé des oeuvres parfois étonnantes, parfois naïves, simples sans trop de recherche, mais encore intelligentes et vivement contemporaines. Parmi elles ont peut citer «Bouteille à la mer» de Meriem Aït El Hara qui adresse une sorte de message à l'humanité à travers ce qu'elle appelle le Facebook d'antan. En effet, la plasticienne expose au milieu de la pièce du Bastion 23 un amas de bouteilles sur un vieux coffret en bois et du sable par terre. Du remplissage de bouteilles, au téléphone arabe, il n'a qu'un pas en vérité qui est exprimé ici en filigrane. Poétiquement vôtre, la plasticienne a invité le public à participer à son installation en remplissant les bouteilles d'une feuille sur laquelle ils auraient écrit un mot. Ces bouteilles devaient être jetées à la mer par la suite. Une vidéo naîtra qui sera montrée ultérieurement. «C'est une histoire qui ne s'arrête pas là. Peut-être qu'il y aura du retour. Cette installation est vivante», nous a-t-elle confié. Pour Amel Courdougli, fasciné par Zyriab, son installation comprend un grand panneau sur lequel sont visibles le nom de ce grand musicien andalou en gros plan, mais des notes musicales et un bon nombre de vinyl par terre et un tourne-disque. «Il n'était pas que musicien, mais géographe astronome, et aussi un maître de l'élégance. Si j'avais vécu durant son époque, je serais sûrement tombée amoureuse de lui. Le tourne-disque et le vinyl est un moyen d'écoute, c'est vrai que cela date des années 1960, mais je suis née dans un milieu très musical, mes parents adoraient la musique. Exposer de l'art moderne dans un antre classique, c'est pas facile...», nous a confié l'artiste. Du côté de Nouredine Hamouche lorsqu'on pénètre dans son antre, c'est une atmosphère de mausolée qui nous happe d'emblée. Si les murs sont tapissés de semelles récupérées peintes, embaumées et colorées à la marque de fabrique de Nouredine Hamouche, est dressée devant notre regard à gauche une petite tombe qui gît devant les visiteurs. Sur sa devanture interne est mentionné en arabe «Win Rana! Rayhine» et à l'extérieur un autre texte également pour signer notre vacuité humaine sur terre. Par terre, l'on découvre un foulard qui a 60 ans d'âge sur lequel on distingue une petite chéchia et une bougie. Une installation assez sombre, et mélancolique qui aurait gagné en je-ne-sais quoi de plus de profondeur, mais c'est peut être le manque d'espace qui fait défaut' Dans la même lignée d'idées, Chafaâ Fatima s'est intéressée aux morts, en rendant hommage, pour sa part, aux «femmes anonymes» assassinées par des terroristes entre 1993 et 2003 dans la région de la Mitidja (50 km d'Alger). Intitulée «El Kemsa», cette installation qui mêle photographies et impressions numériques s'appuie sur le motif de la «main de Fatma» qui va crescendo, à côté de cela, l'on discerne une pléiade de noms de femmes anonymes qui peuplent ce triptyque de fresques. Il s'agit des femmes assassinées et que l'artiste a recensées auprès d'une association de famille de victimes du terrorisme.Plus enjouée et moins pathétique peut-être mais revigorant et sympathique est l'installation de Souad Douibi qui nous vient avec une installation assez originale en plus d'une vidéo. L'artiste qui se plaît à utiliser son corps comme support, s'est déjà filmée en novembre 2013, au camp des réfugiés sahraouis à Tindouf en train de danser avec des poupées en chiffon. La danse exécutée s'apparente à un rite païen ancestral qui épousait parfaitement l'esprit du camp comme une sorte d'invocation à la paix et à la sécurité... «Je ne sais pas danser, mais je me suis laissée emporter par la mélodie. L'idée de cette expo est venue juste après la performance. La femme pour moi est l'être le plus important sur terre. C'est elle qui donne la vie, nourrit, qui répond aux désirs des hommes. Elle a aussi un rôle très important dans la vie, c'est de transmettre ses coutumes et traditions et son savoir-faire à ses petites-filles, à nous les jeunes filles. Ce qu'on a à faire est de suivre ce savoir, préserver les traces de nos ancêtres pour pouvoir continuer notre chemin». Une idée de poursuivre une certaine traçabilité des anciens est mise ici en avant comme un impératif d'une richesse à sauvegarder. Et de renchérir: «J'ai fabriqué cent poupées à base de chiffon récupéré. C'est-à-dire que ce sont des chiffons qui ont des histoires. j'ai écrit des citations et textes de chansons qui ont marqué ma vie, mon enfance, par exemple Je suis malade, La vie en rose et des citations de Khalil Jibran notamment. «A l'avenir, je compte récupérer des morceaux de tissu de personnes afin de fabriquer d'autres poupées et écrire leur histoire sur ces mêmes poupées» nous a-t-elle confié. En effet son installation se résume à une flopée de poupées sur lesquelles sont écrites en rouge les inspirations intimes de notre artiste qui s'est déjà fait remarquer l'an dernier avec sa performance avec le hayek dans les rues d'Alger. Belaïd Hocine qui est spécialisé dans la céramique expose quant à lui, des pièces uniques aux côtés desquelles l'on discerne des épices comme symbole de notre patrimoine culinaire, mais aussi comme une plaidoirie au retour aux sources. «Les gens commencent à revenir vers leur racines, ils utilisent les herbes ou la médecine douce pour se soigner, dans la cuisine également. Quand je me sens malade moi-même, je prends de la tisane.» a-t-il avoué. S'il n'y a pas de quoi s'émerveiller beaucoup, il y a tout de même matière à réfléchir sérieusement sur certains matériaux et idées employés dans cette exposition, le propos même de l'art contemporain. L'expo collective Setta Ouahed Sab3a au Bastion 23 est en tout cas à visiter!




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