Polémique, guerre des patrons et des mots. Au moment où le pays doit mobiliser toutes ses forces vives pour passer le cap de la crise sans trop de dommages, c'est l'image même de l'Algérie économique qui en prend un coup.La guerre des mots entamée voilà quelques semaines entre le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdessalem Bouchouareb, et le patron du groupe privé Cevital, Issad Rebrab, induit des répercussions non seulement en Algérie, mais à l'étranger.La réaction outre-mer ne s'est pas faite attendre. Au moment où les représentants du gouvernements s'égosillent en pleine tripartite du renouveau de l'industrie algérienne et de la perspective de voir l'Algérie devenir la «Mecque des IDE», le quotidien économique français Les Echos, propriété du groupe LVMH de Bernard Arnaud et considéré comme le porte-voix des milieux d'affaires français, publie une tribune dans laquelle le ministre de l'Industrie en prend pour son grade.Contributeur pour le Cercle, forum des débats en ligne des Echos, ex-journaliste de Libération et Le Point, Nidam Abdi n'y va pas par quatre chemins pour évoquer un «manque de compétences et de vision chez les politiques algériens».Celui-ci estime d'ailleurs que «le rapport de force qui s'est engagé entre le clan de Bouteflika au pouvoir et l'industriel Issad Rebrab met en évidence les carences dans ce pays à avoir un patronat séculier et à vocation». Bien plus qu'une prise de position en faveur de l'industriel algérien, la tribune publiée par Les Echos met à nu les dysfonctionnements qui minent la réindustrialisation du pays depuis des décennies.Il est vrai que Nidam Abdi part d'un constat qu'il a fait lors de la tenue, il y a une année, d'un colloque ayant pour thème «France-Algérie : quel avenir industriel commun '» à l'Assemblée nationale française.«La seule personne qui pouvait illustrer ce qui manque à l'Algérie industrielle, Sergio Treviño, président du groupe Brandt, s'éclipse sans attirer le moindre regard ni susciter le moindre intérêt.» Pour le contributeur des Echos, cela reflète surtout l'incapacité des pouvoirs publics algériens et du ministre de l'Industrie et des Mines à susciter des vocations d'entrepreneurs mais surtout à tirer le meilleur parti des synergies à promouvoir entre l'Algérie et le marché européen, ce que Issad Rebrab a d'ailleurs su faire.C'est ainsi que Nidam Abdi explique qu'au moment où le gouvernement algérien a reconnu en Conseil des ministres que l'Accord d'association était un désastre, «Abdessalem Bouchouareb, ministre algérien de l'Industrie et des Mines, n'a pas saisi, dans son bras de fer avec le patron Issad Rebrab, que ce dernier, en reprenant le groupe électroménager Fagor Brandt au tribunal de San Sebastian, en avril 2014, ouvrait une relation forte avec le Pays basque de Sergio Treviño».L'auteur de la tribune, qui met ainsi les succès de l'homme d'affaires sur un terrain que les gouvernants algériens refusent pour l'heure d'investir, explique que si «les décideurs politiques et économiques au pays de la rente pétrolière peinent à déclencher de vraies vocations d'entrepreneurs par filière, c'est qu'ils ne s'intéressent pas aux bonnes pratiques des régions industrielles d'Europe», avant de finir sur une jugement sans appel, estimant qu'«il est à croire que l'Algérie ne connaît pas uniquement un manque de managers dans le monde de l'entreprise, mais aussi de politiciens tout aussi dépourvus de compétences et de vision».Autrement dit, l'auteur de la tribune estime que dans ce bras de fer, le pouvoir algérien tente d'étouffer l'action du seul industriel ayant réussi à jeter un pont au travers de la Méditerranée pour aller chercher la technologie et le savoir-faire là où ils sont, au lieu de subir la domination et les diktats d'investisseurs ou de représentations patronales qui ne font encore le déplacement à Alger que «pour capter tel ou tel marché».Mais bien au-delà de la polémique qui oppose le patron du groupe Cevital au ministre de l'Industrie et des Mines, la tribune publiée par Les Echos met le doigt sur certaines carences qui minent bien plus la promotion de l'investissement et l'industrialisation du pays.C'est cette propension à vouloir briser les ambitions des industriels, des intellectuels et des universitaires qui ne rentrent pas dans le moule, laissant le pays subir les influences, les marchés et les soubresauts de la conjoncture sans être en mesure de les anticiper.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 17/10/2015
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Roumadi Melissa
Source : www.elwatan.com