Algérie

Des partenariats «gagnant-gagnant» dites-vous '


Des partenariats «gagnant-gagnant» dites-vous '
Stratégique, durable, gagnant-gagnant, commercial et bien d'autres termes sont utilisés pour qualifier le partenariat recherché sur le plan économique en Algérie. Un dossier qui revient régulièrement dans les débats.Il ne se passe pas une occasion sans que les représentants du gouvernement n'abordent cette question. Dans les discours politiques, dans les rencontres sur la coopération bilatérale, dans les forums d'affaires, mais aussi lors des salons et foires organisés périodiquement en Algérie ou ailleurs, l'on évoque du côté des pouvoirs publics la volonté de renforcer les relations de partenariat dans le secteur économique.Ce point est souvent mis en exergue.Mais qu'en est-il en réalité, quels sont les résultats de ces appels à répétition et quelle politique adopter en Algérie dans ce domaine ' Autant de questions qui méritent d'être posées en cette période où le besoin de diversifierl'économie se fait fortement ressentir..C'est d'ailleurs cette diversification qui est recherchée à travers le partenariat. Or, on est loin de cet objectif. Hors hydrocarbures, hormis quelques exemples de réussite, les partenariats réalisés ne sont pas concluants.En d'autres termes, ils n'ont pas apporté de grands changements à l'outil productif national, que ce soit en termes de transfert de technologie et de savoir-faire, de management, de création d'emplois ou d'ouverture sur le marché extérieur.Comment expliquer une telle situation ' Pour bon nombre d'experts, l'intérêt économique est souvent mis de côté dans les négociations des partenariats privilégiant le côté diplomatique de cette course aux partenariats. «Durant la période de la crise politique et sécuritaire qu'a traversée le pays durant les années 90', il y a eu plus de partenariats concluants.Par la suite, le pouvoir pensait que c'était un outil qui allait aider l'Algérie à sortit de son isolement diplomatique», nous dira à ce sujet Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la Communication et ancien ambassadeur, citant comme exemple l'accord d'association Algérie-Union européenne.La recherche du prestige au détriment de l'intérêt économiqueEt d'ajouter : «L'Algérie ne négocie pas ses projets de partenariat. Nous ne rattachons pas l'objectif de partenariat aux grands marchés». Pourquoi ' «Nous ne sommes pas exigeants. Nous voulons plutôt plaire aux gens», répondra M. Rahabi pour souligner que l'Algérie privilégie dans ce domaine l'aspect «prestige» au détriment de l'intérêt économique.Les résultats sont là aujourd'hui : la majorité des partenariats conclus, particulièrement durant la décennie 2000-2010, sont orientés vers le marché national.D'où, également, le retard dans la mise en ?uvre d'une politique de diversification économique réelle. Ce qui fait que ni les privatisations ni les partenariats n'ont contribué à la réalisation de cet objectif. Le blocage ne fait donc que persister aujourd'hui.«La réussite du partenariat industriel national et international n'est pas réalisable sans une autre gouvernance, une vision cohérente se fondant sur des réformes structurelles tant politiques, sociales qu'économiques.» C'est ainsi que Abderrahmane Mebtoul explique la situation l'économiste.Pour ce dernier, la dominance de la démarche bureaucratique devrait céder place à la démarche opérationnelle économique avec des impacts économiques et sociaux positifs à terme. Ce qui n'est pas le cas puisque même les privatisations ont échoué.Absence d'investissements et de transfert de savoir-faireAu chapitre de cette opération lancée entre 1996 et 1998 par le Conseil des participations de l'Etat (CPE), certaines ont été conclues sous l'égide des sociétés de gestion des participations de l'Etat (SGP) et des holdings sans en connaître aujourd'hui l'impact réel alors que d'autres ont été bloquées.Résultat : des entreprises publiques moribondes qui, malgré les perfusions, n'ont pas réussi à redémarrer. L'économiste Ahmed Mokaddem dira d'ailleurs à ce sujet : «Sans tirer les leçons des erreurs des années passées et dans un contexte de libéralisme épidémique, le dogme en vogue que seule la privatisation des entreprises publiques était la bonne politique a arrêté net la stratégie de développement de l'industrie nationale.Ceci a causé un ralentissement de l'expansion du secteur public économique et a aussi permis de brader au profit d'investisseurs étrangers quelques entreprises publiques les plus rentables. L'exemple le plus significatif est l'appropriation majoritaire de Sider par le groupe Mittal» auquel le gouvernement attache beaucoup plus «un rapport affectif qu'économique» selon Abdelaziz Rahabi. Un exemple édifiant de l'échec de cette politique.Enchaînant dans ce sillage, M. Mokaddem notera : «A cette époque (ndlr, des privatisations), ces nouvelles entreprises mixtes à capital public minoritaire se sont caractérisées essentiellement par l'absence d'investissements de renouvellement des équipements et d'extension, de disparition de l'engineering, de recherche-développement et de formation des personnels».Car, faudrait-il rappeler que l'investisseur étranger est mu par des considérations financières et dans le cadre d'une stratégie définie ailleurs au sein de son conseil d'administration, alors que du côté algérien l'on ne négocie pas dans les règles de l'art ces partenariats, de l'avis de nombreux observateurs.«Dans l'accord d'association Algérie-UE par exemple, nous n'avons eu aucune garantie d'Investissement direct étranger. C'est plus un système de démantèlement tarifaire», fera encore remarquer A. Rahabi. Autant d'éléments qui ont donné lieu à la situation d'aujourd'hui (appel à la révision de l'accord en question).Ce qui a fait aussi que «les prises de participation de certains partenaires étrangers dans nos entreprises nationales sont autant de témoignages d'expériences malheureuses où l'intérêt national et la stratégie du partenaire étranger étaient antagonistes», précisera par ailleurs Ahmed Mokaddem.Quid du partenariat privé national/privé étranger 'Dans le cas où les capitaux publics sont minoritaires et où le droit de préemption se fait valoir, lorsqu'il s'agit de partenariat privé national/privé étranger, cela devrait être une affaire entre les deux partenaires, estiment les experts. «La législation ne doit pas interférer d ans le mode de répartition du capital ; dans ces cas, il faut laisser les actionnaires préciser ces clauses dans la charte.A la limite, dans les cas de faillites de ces entreprises privées et représentant des cas d'utilité nationale, des repreneurs peuvent se manifester et pourraient être des fonds publics», nous expliquera encore M. Mokaddem avant de résumer : «La situation du monde des entreprises devrait s'inscrire dans le cadre d'une législation souple et appropriée visant un équilibre entre diverses formes juridiques et évitant, d'une part, le tout-public et, d'autre part, le tout-privé».Une législation toujours en attente au détriment du décollage de l'outil de production et du développement économique dont l'expérience du partenariat étranger a montré des limites. L'heure doit être au bilan. Les instances chargées de ce dossier sont d'ailleurs appelées à rendre compte de tout ce qui a été entrepris dans ce cadre. Interrogé à ce sujet, l'économiste Rafik Boumeghar plaidera pour cette démarche.


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