Algérie

Des paroles et des actes



Le discours prononcé par le président Bouteflika mardi à Sétif, dans lequel il a appelé la génération de Novembre à remettre le flambeau aux nouvelles générations pour la gestion du pays, aurait pu faire date si la même profession de foi n'avait pas été déjà faite par le passé, sur le même ton et le même mode, qui confinait chaque fois à penser que la décision allait être exécutée séance tenante. Que de fois n'a-t-il pas décrété la fin de la légitimité révolutionnaire qui a été et continue toujours d'être la source du pouvoir dans le pays, pour l'exercice des responsabilités à tous les niveaux des institutions de l'Etat et de la vie nationale d'une manière générale ! Force est de constater que derrière ces belles professions de foi, les mêmes hommes dont la compétence n'est pas toujours établie pour être propulsés à de hautes fonctions dans une conjoncture aussi délicate, où le temps nous est compté, se relaient encore au sein de l'appareil de l'Etat et de ses différentes institutions élues.
Parce que la décision est éminemment politique compte tenu des enjeux que renferme cette épineuse question identitaire du pouvoir, lequel a toujours tiré depuis l'indépendance sa légitimité de la Révolution, il serait naïf de croire que l'appel de Bouteflika, fut-il sincère cette fois-ci, serait accueilli par «la famille révolutionnaire» avec enthousiasme et une égale fièvre militante que par le passé. Pour que les propos du chef de l'Etat ne soient pas compris une nouvelle fois comme une énième man'uvre politique visant à prendre à témoin l'opinion publique qu'il a mûri sur la manière d'aborder le dossier de la légitimité révolutionnaire ' dont on sait par ailleurs qu'il ne détient pas les clés de sa solution ou de son dépassement, tout chef d'Etat qu'il est ' il aurait fallu que sa déclaration d'intention, réitérée à Sétif, soit accompagnée de gestes et de décisions concrets. Vagues, intemporels et immatériels, les propos de Bouteflika ne pouvaient être accueillis au mieux qu'avec une moue dubitative compte tenu des résistances et du caractère tabou et sacré auquel renvoie ce débat dans le sérail.
«Le changement, c'est maintenant», pour paraphraser un slogan de la campagne de François Hollande, qui doit son succès aux promesses concrètes et à effet immédiat faites aux électeurs. Pour être en phase avec ses professions de foi, le président Bouteflika aurait gagné à joindre l'acte à la parole en donnant à ses propos un prolongement pratique, en transformant ses promesses en engagement et en décisions réglementaires. Le Président n'a-t-il pas toutes les prérogatives pour faire supprimer dans les meilleurs délais la conditionnalité de la légitimité révolutionnaire posée à l'accès aux hauts postes de responsabilité, comme fut supprimé le fameux article 120 de la détention de la carte du FLN qui a nivelé par le bas pendant des décennies le recrutement des «élites» qui ont dirigé le pays depuis l'indépendance ' De la même façon, le meilleur rempart pour éradiquer le virus de la gérontocratie au pouvoir passe nécessairement par un plafonnement de l'âge légal qui prend en considération ce souci légitime de rajeunissement de l'encadrement du pays. Mieux encore, pour donner à cet engagement davantage de lisibilité et de visibilité politique, il eut fallu que le chef de l'Etat fixât un délai pour mettre en 'uvre, sous le sceau de l'urgence, cette réforme révolutionnaire entre toutes. Rien de tout cela n'a filtré du discours présidentiel.




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)