Des hommes et des histoires

S'il y a unanimité pour dire que l'homme de la situation dans ce qui arrive de bien à la sélection algérienne depuis octobre 2018 est son coach Djamel Belmadi, d'autres «pièces» ont contribué humblement et efficacement à l'embellie de cet ensemble qu'on pensait définitivement enterré au lendemain de son élimination du Mondial de Russie, moins de quatre ans après que les Verts eurent atteint les huitièmes de finale de la Coupe du Monde au Brésil.Un drame évité de peu, par miracle. Un beau miracle lorsque Zetchi a confié à l'un de ses collaborateurs, Hakim Medane, ancien international et accessoirement membre du BF/FAF, la mission d'aller chercher Belmadi à Paris. Une négociation qui a mis du temps, pas cinq minutes mais plusieurs mois et alors que la rumeur publique se chargeait d'annoncer des noms, de grands noms même pour le remplacement de Rabah Madjer. De longs mois qu'a mis à profit l'ancien coach d'Al-Duhail ,pour expliquer son projet et le rendre réalisable.
En insistant, notamment, sur l'état d'esprit de son groupe de joueurs et leur engagement à l'infini. Car, même éloigné des rouages, Belmadi savait que le groupe Algérie avait mal mentalement depuis son Mondial magnifique en terre de la samba. Il savait pourquoi Rajevac et ceux qui lui ont succédé n'avaient aucune chance de réussir. Miné de l'intérieur par des effets exogènes, le team algérien se déchirait jusqu'à former des clans. Une «secte». Et Belmadi a mis d'emblée le doigt sur la plaie et a chassé les vieux démons et les «mauvais» joueurs. Beaucoup d'entre eux ont été laissés sur le carreau, certains ont été récupérés, d'autres non. Au grand bénéfice du groupe qui enregistrait des arrivées salutaires et des retours qui l'étaient également. Belaïli, Bounedjah, Benlamri, Halliche, Feghouli, Mahrez, M'Bolhi et les nouvelles têtes ont fini par se plier à la volonté de reconstruire du solide initiée par l'ancien stratège de l'O Marseille.
Le coup de massue du Bénin fut l'étincelle qui éveilla, et Belmadi et l'ensemble de son groupe. C'est l'acte fondateur de ce que deviendra un champion d'Afrique au bout de dix mois de travail.
Un chantier dans lequel le maître de l'ouvrage est connu, alors que les ouvriers changent au gré des missions. Et c'est ainsi que la nouvelle histoire a été écrite. En lettres d'or et de records. Difficile alors de ne pas faire de jaloux, ici et ailleurs. Quand on corrige la Colombie, on use le Mexique et tous les cadors africains, c'est que forcément, la meute se met à aboyer. Et pour la vaincre, il faut la convaincre à travers des résultats probants et des prestations de qualité. Ce qui n'est pas souvent le cas, le football n'ayant jamais été cette science exacte qui obéit aux seules prévisions, visions, probabilités et des forces en présence. Les leçons sont légion à ce titre. Quand la troupe à Khalef Mahieddine a enchanté Gijón, Oviedo, l'Espagne et toute la planète du football suite à son exploit face à la RFA, Breitner, Rummenigge et autre Littbarski et Hrubesch n'étaient pas des manchots. Encore moins des impuissants ou des inconnus. Finaliste lors du Mondial espagnol, la RFA avait remporté deux ans auparavant la Coupe d'Europe des Nations sur le sol italien, le champion du Monde de la Coupe du Monde 1982. L'ex-RFA était la référence non seulement en Europe mais à travers le monde. Son modèle et sa structuration sont copiés par beaucoup de pays et ses clubs comme ses sélections affichent des palmarès exceptionnels.
C'est un peu le même cheminement que pense suivre Belmadi, un peu contre nature bien sûr. Le football algérien n'a plus de modèle ni d'assises pour se comparer à ce qui se fait de mieux dans la zone africaine, pour ne pas s'embarquer dans des comparaisons surréalistes avec d'autres systèmes, en Europe particulièrement. Et c'est là que le mérite des hommes comme Belmadi et ses joueurs devient importantissime. Insoupçonnable. Ceux qui en doutent n'ont qu'à changer de pays, comme dirait un certain ex-ministre zélé du secteur de la jeunesse et des sports.
M. B.