Algérie

Des hirakistes risquent six mois de prison ferme



Le tribunal correctionnel de Fellaoucène, à Oran, a examiné hier un dossier dans lequel plusieurs hirakistes et deux journalistes de la presse écrite étaient poursuivis pour "tentative de perturbation d'un rassemblement autorisé", "trouble à l'ordre public" et "attroupement non armé".Les événements de cette affaire remontent au vendredi 22 novembre 2019 lorsque des acteurs du Hirak ont voulu exprimer leur rejet de l'élection présidentielle en protestant contre le rassemblement populaire que le candidat Abdelaziz Belaïd devait animer à la salle omnisports de Médioni.
Bien que cantonnés sur un trottoir à des dizaines de mètres du lieu du meeting par une police sur les dents, les hirakistes seront brutalement interpellés et conduits au siège de la sûreté de la wilaya où ils seront retenus jusque tard dans la nuit.
Deux journalistes, J. Loukil de Liberté et N. Guellil d'El-Moudjtamaa, pourtant mandatés par leurs rédactions respectives pour la couverture de l'événement, seront interdits d'accès à la salle omnisports avant d'être également embarqués aux côtés des autres hirakistes.
Hier, à la barre, les neuf accusés, dont Kaddour Chouicha, Saïd Kacem, Abdelhadi Abbès, Tadjeddine Abdelatif, ont tous rejeté les faits qui leur étaient reprochés.
Certains ont dénoncé la brutalité aussi injustifiée que gratuite dont la police a usé lors de leur interpellation, d'autres ont assuré avoir été interpellés alors qu'ils étaient simplement de passage. Les journalistes rappelleront qu'ils étaient sur les lieux dans le cadre de leur travail. Les forces de police leur ont interdit de couvrir la manifestation.
Après que la représentante du parquet a laconiquement requis six mois de prison ferme contre l'ensemble des prévenus, les avocats de la défense ont fait le procès de la police qui n'a pas hésité à user de la matraque contre des hirakistes pacifiques.
Me Ahmed Mebrek, qui a affirmé que la répression ciblait systématiquement les activistes du Hirak, s'est, par ailleurs, interrogé sur le sort réservé aux multiples plaintes pour violences policières que des dizaines d'Oranais ont déposées auprès de la justice entre 2019 et 2020. Me Farid Khemisti s'en est également pris à la police qui a empêché les journalistes de faire leur travail et interdit à des citoyens de s'exprimer.
"Il y a eu de nombreux et dangereux dérapages", s'est-il insurgé en n'hésitant pas à parler de hogra. L'avocat a également dénoncé le "harcèlement" exercé sur la personne de Kaddour Chouicha, vice-président de la Laddh, interpellé sept fois, et rappelé que l'homme avait déjà été jugé, condamné avant d'être relaxé en appel pour les mêmes faits qui lui sont reprochés aujourd'hui.
Le 10 décembre 2019, Chouicha avait, en effet, été condamné à une année de prison ferme par le tribunal de Cité Djamel pour "outrage et violence à fonctionnaires et institutions de l'Etat", "offense au président de la République" et "exposition au regard du public de documents de nature à nuire à l'intérêt national", charges retenues par le parquet pour qualifier les faits qui s'étaient, justement, déroulés à l'occasion du meeting d'Abdelaziz Belaïd.
Tous les avocats qui ont affirmé que les accusations retenues n'étaient pas étayées par des éléments de preuves tangibles ont demandé la relaxe de leurs clients. Le verdict a été mis en délibéré pour le 18 janvier 2021.

S. OULD ALI


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