Algérie

Des geôles du colonialisme aux geôles du régime



D'aucuns se souviennent de cette séquence terrifiante de cette fin juin 1992, quand Slimane Amirat s'est écroulé devant la dépouille de Tayeb El Watani couverte de l'emblème national. Ce jour-là, l'Algérie a perdu deux de ses valeureux fils qui l'ont aimée jusqu'à la moelle, chérie jusqu'à sacrifier des années de leur vie dans les prisons coloniales d'abord, puis dans celles du régime abject d'Alger par la suite. Pour commémorer l'anniversaire de la mort de Slimane Amirat, la fondation qui porte son nom a annoncé, hier dans un communiqué, qu'un recueillement sera organisé à  10h sur la tombe du défunt au cimetière El Alia. Et à  partir de 15h, une cérémonie de commémoration est prévue au Palais de la culture avec la projection d'un film documentaire sur le parcours du défunt. Selon une biographie élaborée par la fondation, Slimane Amirat est né le 24 juillet 1929 à  M'chedellah, à  Bouira. Il était père de quatre enfants. Il a rejoint les rangs de l'ALN très tôt, en 1955. «Son contact se fera directement avec Abderrahmane Mira. Ce dernier remarquant son dynamisme et ses qualités d'homme de terrain, un homme dur et fonceur, le sollicita pour se rendre en France, afin de travailler à  la sensibilisation de l'émigration algérienne.» Il est choisi, indique la même source, par le FLN «pour mettre sur pied et diriger les groupes de choc de la région parisienne, afin de lutter contre les messalistes du Mouvement nationaliste algérien (MNA). Il a été arrêté en 1958 et emprisonné à  Constantine, à  Djorf et à  M'sila».
Durant sa détention, ajoute la fondation, «il organise les prisonniers et fait en sorte de continuer la lutte». Une fois libéré, il rejoint la France muni de faux papiers et reprend la direction des groupes de choc de la région parisienne. En 1961, souligne la même source, il est arrêté, sur dénonciation, une seconde fois. «Il sera torturé au camp de Saint Maurice de l'Ardoise, puis au camp de Larzac, d'où il ne sortira qu'au cessez-le feu. Il doit sa vie sauve à  une manifestation organisée, à  Paris, par des étudiants algériens et français». Après le cessez-le-feu, le défunt a fait face à  l'OAS, et ce, jusqu'au conflit des wilayas. «Slimane Amirat suit la légitimité du GPRA.» «Il était de ceux, avec Krim Belkacem et Mohamed Boudiaf, Mohand Ould Hadj et d'autres, qui ont tenté de créer l'UDRS.» Selon la Fondation, «il se retrouvera ensuite au FFS et est condamné à  mort par contumace pendant le procès contre Hocine Aït Ahmed et le colonel Chaabani.»
Slimane Amirat entre dans la clandestinité et avec Krim Belkacem et d'autres militants de la cause nationale ; il participe à  la création d'un nouveau mouvement d'opposition le Mouvement démocratique pour le renouveau algérien (MDRA) le 18 octobre 1967. «La réaction brutale du pouvoir conduit à  son arrestation le 7 juillet 1968.» Il est mis en détention secrète pendant plus de 9 mois pendant lesquels il a été torturé, avant d'être jugé et condamné à  la peine capitale par la cour de la révolution d'Oran, souligne la fondation, qui rapporte également que «pendant quatre ans et demie, il restera enfermé au quatrième sous-sol de la prison militaire d'Oran, le tristement célèbre fort de Santa Cruz». «Et alors qu'on lui demandait de formuler sa demande de grâce au président Boumediène, il réclamait le respect de ses droits de prisonnier politique ou l'application effective de sa peine, c'est-à-dire son exécution», précise la même source.
Après quatre années passées à  la prison d'Oran, il est transféré à  la prison de Berrouaghia où il reste en détention pendant deux autres années. Il est ensuite conduit à  la prison d'El Harrach, où il passe six mois. Il est libéré enfin le 23 juin 1975, une semaine après le décès de son père. Le combat pour ses idées a continué dans la clandestinité jusqu'en 1989, date de la naissance du pluralisme. Le MDRA a officiellement été agréé en janvier 1990.
 


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