Algérie

Des familles gênées mais contentes d'être là !



Suspendues depuis fin mars dernier pour éviter la propagation de la pandémie de Covid-19, les visites au parloir pour les familles des détenus sont enfin autorisées. De nombreux parents ont, dès hier mardi 1er septembre, pris d'assaut l'entrée des établissements pénitentiaires. Seulement, les mesures barrières de rigueur ne sont pas toujours respectées.Rym Nasri - Alger (Le Soir) - La levée de l'interdiction des visites des détenus annoncée par le ministère de la Justice a vite fait le tour. Au grand bonheur des familles, elles pourront enfin retrouver, dans les parloirs, leurs proches incarcérés. Pour ce faire, tout un protocole sanitaire a été mis en place. Mais le déni de la population pour la pandémie est loin de le faire respecter.
En effet, l'image de la foule agglutinée devant l'entrée principale de la prison d'El-Harrach, à l'est d'Alger, donne froid dans le dos. Des dizaines de personnes étaient, hier, entassées dans une longue file d'attente devant l'établissement pénitentiaire. Des jeunes, des moins jeunes, des femmes, des hommes, et même des enfants dont l'accès est interdit, patientent dans une promiscuité déconcertante. Le comble, très peu d'entre eux portent le masque de protection. La smala des policiers chargés de maintenir l'ordre sur les lieux ne prêtaient aucune attention à cette insouciance dont faisaient preuve les visiteurs.
Il est midi passé. L'attente se fait longue. Sous un soleil de plomb, les visiteurs se lancent dans d'interminables palabres. Dissimulées sous un long voile et couvertes jusqu'aux pieds, les femmes tentent tant bien que mal de se cacher pour ne pas être reconnues.
«Je suis si heureuse de pouvoir enfin revoir mon fils. Je ne l'ai pas vu depuis mars dernier. Il y a un mois, je suis venue lui ramener des vêtements, mais les visites étaient toujours interdites. Même si j'ai pu lui parler au téléphone à deux reprises, il me manque énormément», raconte une quinquagénaire d'une voix tremblante et les larmes aux yeux.
Tenus près d'elle, ses deux filles et son fils tentent de la consoler. Et à son aînée de prendre la parole : «Aujourd'hui, seuls deux visiteurs sont autorisés et les couffins sont interdits. C'est affiché sur la porte d'entrée», ajoute la jeune fille.
Déçue de ne pouvoir rencontrer son frère depuis le début de la pandémie du coronavirus, elle précise que cette fois-ci, c'est d'abord à sa mère et à son frère d'accéder au parloir. «Même s'il ne lui reste pas beaucoup de temps à passer en prison, la prochaine fois, ça sera mon tour d'aller le voir», dit-elle.
À visage dénudé, la plupart des visiteurs tentent de se cacher la face. Pourtant, le port de masque aurait pu les protéger, non seulement du virus du Covid-19 mais aussi des regards indiscrets. Dans la file d'attente, une femme voilée tourne le dos à la route limitrophe à la prison d'El-Harrach pour éviter les regards curieux des automobilistes et des passants.
À peine la quarantaine, son visage non masqué est terne et laisse deviner des signes de tristesse, de fatigue et de mélancolie. Son fils de 21 ans est incarcéré depuis un mois et demi. Aujourd'hui, c'est sa première visite au parloir de la prison d'El-Harrach.
«Mon fils me manque terriblement. Je me suis levée très tôt pour me rendre au tribunal d'Hussein Dey pour me faire délivrer une autorisation. Je suis ensuite venue directement ici. À neuf heures du matin, j'étais déjà là», dit-elle.
Se tenant à l'écart de tout le monde, Hakim, un jeune d'une trentaine d'années, laisse apparaître sa gêne. «Je n'ai rien à voir avec la prison. Je suis un jeune homme sportif et sérieux. J'ai juste accompagné mon voisin qui est venu voir son fils incarcéré», se justifie-t-il. Selon lui, son voisin n'a pas eu de nouvelles de son fils depuis mars dernier et s'inquiète pour lui.
«Son fils est atteint d'asthme, pourtant il n'a que 31 ans. Depuis le début du coronavirus, mon voisin n'a même pas pu lui parler au téléphone. Seule chose qu'il a pu faire, c'est de lui envoyer des mandats», précise-t-il.
Pris de compassion pour son voisin, Hakim a décidé de l'accompagner. «J'ai eu beaucoup de peine pour lui et je lui ai alors proposé de le déposer puisqu'il n'a pas de véhicule», dit-il.
D'ailleurs, poursuit-il, «son fils, lui, reste à peine six mois et il retrouvera inch'Allah sa liberté».
Ry. N.


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