Des experts ont mis à l'index, samedi soir à Marseille, l'instrumentalisation par certains pays occidentaux des mouvements de contestation populaires dans des pays d'Afrique du Nord et du Proche-Orient, en "fabriquant" des "révolutions pilotées", destinées à déstabiliser les régimes en place, et à préserver leurs intérêts dans ces régions.
Le Sahel comme nouveau foyer de déstabilisation régionale et internationale, en raison de la dissémination de divers armements consécutive au conflit en Libye et des menaces qui pèsent sur la sécurité des pays de la région, a aussi été évoquée par ces experts, réunis lors d'un colloque organisé à l'initiative de l'Union des universitaires algériens et franco-algériens (Ufac) sous le thème "Printemps arabes et guerre au Sahel, acteurs et enjeux véritables".
La tenue de cette rencontre est précisément dictée par "la menace avérée qui vise l'intégrité, la souveraineté et les ressources vitale des pays de ces régions", a souligné le président et fondateur de l'Ufac, Abdelkader Haddouche.
Il a estimé que le retard enregistré dans certains pays du Maghreb en matière de "formation de la jeunesse et particulièrement des femmes, le faible niveau de qualification et de technicité de la main d uvre, l'incurie, la corruption, ainsi que l'égoïsme des élites", ont conduit à l'exacerbation du mécontentement populaire.
Il a également énuméré des causes externes ayant conduit à la montée des tensions dans ces pays, comme "l'appauvrissement par des systèmes iniques, construit sur l'exploitation féroce des ressources de ces pays par un système de fixation des prix des matières premières qui leur échappe et qui est de ce fait défavorable au développement".
Des proies toutes désignées pour être des sanctuaires du terrorisme
Le cas du Mali et du Niger, soumis aux convoitises extérieures, fragilisés par une situation économique interne désastreuse, en sont de parfaits exemples, selon M. Haddouche. "Des proies toutes désignées pour être des sanctuaires du terrorisme, de son financement, et de prises d'otages et demandes de rançons", a-t-il observé.
Intervenant à son tour, Mme Saida Benhabyles, ancienne ministre et Prix des Nations-Unies pour la paix civile, a rappelé l'intervention militaire de la France et de l'OTAN en Libye. "Pour éviter tout quiproquo", elle a indiqué que sa prise de position concernant les "printemps arabes" est loin d'être une "défense des dictatures qui dirigeaient ces pays, encore loin une remise en cause des préoccupations et aspirations légitimes des populations, telles que la liberté, la dignité, la justice sociale et la démocratie".
Pour Mme Benhabyles, le mal sociétal est "réel" mais le problème, a-t-elle ajouté, réside dans le fait qu'il a été "instrumentalisé" à des fins géostratégiques, économiques, "servant les intérêts de certains pays et non pas de ceux qui se sont soulevés dans ces régions".
Mezri Haddad, ancien ambassadeur de Tunisie à l'Unesco, a considéré que la chaîne de télévision Al Jazeera a joué un "rôle primordial", dans la manipulation de l'opinion internationale sur le mouvement de contestation populaire en Tunisie.
Une chaine, a-t-il dit, "au service de stratégie et de la diplomatie du Qatar".
Hasni Abidi, directeur du Centre d'étude et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (Genève) insisté dans son intervention sur l'intégration maghrébine, estimant que les évènements que vit aujourd'hui le monde arabe nécessitent une "réflexion sur cet espace maghrébin tant rêvé".
Ghaleb Bencheikh, président de la Conférence mondiale des religions pour la paix, a estimé que le monde arabe a pâti d'"une idéologisation et d'une instrumentalisation de la tradition religieuse pour d'autres fins que spirituelles". Selon lui, la crainte aujourd'hui est qu'il pourrait y avoir une confiscation des contestations dans le monde arabe, "car il n y a pas suffisamment d'investissements intellectuel pour accompagner ces révolutions".
Il a estimé qu'il y a "le chantier du pluralisme, de l'ouverture, de la liberté de conscience, de l'égalité de tous les citoyens par leur appartenance et c'est à cela que doivent aboutir les révolutions et non pas à induire les peuples en erreur".
La situation au Sahel, héritage du colonialisme européen
Evoquant le Sahel, Yves Bonnet, écrivain, ancien député et directeur de la direction de la sécurité du territoire, considère que la situation qui prévaut dans cette région est "largement l'héritage du colonialisme européen".
"Ce qui s'est passé en Libye est le résultat d'une conspiration internationale. Je l'ai déjà dit et les évènements m'ont donné raison car on a ouvert la cage aux oiseaux", a-t-il affirmé.
"En l'occurrence, ces oiseaux ce sont à la fois des terroristes d'Al Qaïda et des armes qui se sont répandus dans le Sahel, où se sont repliés les groupes armés du GIA et du GSPC, et contre lesquels l'armée et les services sécurité algériens ont remporté des succès très importants", a constaté cet ancien responsable du renseignement français.
Il a ajouté que c'est la conjonction entre ces terroristes "qui ont des visées politiques et les narcotrafiquants qui fait qu'aujourd'hui, il est très difficile de dissocier les activités soi-disant politiques, des activités mafieuses dans cette région".
"Après le chaos provoqué par les méfaits et les horreurs du terrorisme, l'Algérie manifeste aujourd'hui une grande stabilité", a observé par ailleurs Yves Bonnet, exprimant sa "satisfaction" au sujet du retour d'une "véritable amitié entre l'Algérie et la France".
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Posté Le : 07/04/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Le Temps d'Algérie
Source : www.letempsdz.com