Algérie

Des experts débattent de la question Le ré-engineering comme solution aux problèmes de l’économie algérienne



Des experts débattent de la question Le ré-engineering comme solution aux problèmes de l’économie algérienne
L’Algérie économique et sociale est à repenser comme après l’Indépendance. Aucun changement ne viendra sans aucune modification du mode de gouvernance qui a traversé quatre décennies, d’un système qui paralyse l’initiative et qui reproduit inéluctablement les mêmes schémas. Aucune réforme n’aboutira sans changements profonds de l’État, du système et des organes qui l’articulent.

La rencontre-débat, organisée par le Forum El Moudjahid sur le ré-engineering de l’économie algérienne, n’a pas drainé une grande foule certes mais les absents ont eu tort. Les deux animateurs en l’occurrence le Dr Lies Goumiri et le Dr Abdelhak Lamiri, ont, en leur qualité d’experts, captivé les présents par leurs exposés sur la situation catastrophique de l’économie nationale. Dans quarante ou cinquante ans, peut-être un peu plus ou un peu moins, l’énergie fossile fera partie du passé, disent les spécialistes.
La chute de la rente pétrolière n’est plus une vue de l’esprit mais bel et bien une réalité que nous devons accepter. Quelles ressources de devises trouver pour que l’Algérie puisse équilibrer sa balance commerciale ? Des solutions existent, répondent les deux experts et qui consistent en des réformes structurelles permettant un ré-engineering de l’Algérie dans les dix à quinze prochaines années. Le ré-engineering préconise pour les sociétés qui n’ont pas su se transformer dans la continuité face aux changements extérieurs, doivent alors faire une mue franche, totale et dans les délais limites ou disparaître. “Le souci de l’État après l’Indépendance consistait à trouver une économie algérienne prospère et durable à partir des exportations de pétrole et gaz. Cela a permis certes de dégager des ressources financières ayant permis de lancer un programme volontariste d’industrialisation tous azimuts.
Mais après ? L’Algérie s’est-elle pour autant industrialisée ? s’interroge le Dr Goumiri, avant d’énumérer les premières conséquences à savoir : le schéma directeur des industries industrialisantes des années 1970 est mort, celui de la production de substitution aux importations est frappé de désuétude, plus récemment les autres schémas de privatisation totale ou des investissements directs étrangers (IDE) ont montré leurs limites. Les portes sont closes et même l’entrée à l’OMC ou l’accord d’association improbable à l’UE qu’on croyait tirer d’affaire l’Algérie ne tiennent plus la route car, continue le conférencier, “nous n’avons ni plan A, ni plan B, ni une troisième voie”. Et pourquoi donc ? “Tout simplement nous ne changeons pas de système. L’Algérie économique et sociale est à repenser comme après-l’Indépendance. Nous ne pouvons pas continuer avec le système des années 1970. Aucun changement ne viendra sans une modification du mode de gouvernance qui a traversé quatre décennies d’un système qui paralyse l’initiative et qui reproduit inéluctablement les mêmes schémas. Aucune réforme n’aboutira sans changements profonds de l’État, du système et des organes qui l’articulent”, explique l’expert. En somme, c’est la ruine. Dans ces conditions, comment s’y prémunir ? “Si l’Algérie veut inscrire les activités industrielles dans ses axes prioritaires de son développement économique et rompre ainsi avec les pratiques de gestion de la rente pétrolière, il y a lieu d’effectuer alors une rupture brutale et immédiate mais aussi d’annoncer de nouvelles règles de gouvernance”, préconise le Dr Goumiri qui fait remarquer qu’on continue comme juste après l’Indépendance à opter pour un mode de gouvernance basé sur un choix subjectif. “Quels critères sont appliqués en 2011 quant au choix ? Quels moyens de contrôle des performances réalisées ou des gouffres dans lesquels ils nous plongent ? En définitive qui paie les pots cassés ? On a vu souvent un haut dirigeant qui, après avoir mis à genoux la structure qu’il dirige, se fondre dans une retraite dorée, sans rendre de comptes à personne”, dira-t-il dépité. Des exemples de gestion catastrophique, il citera la quasi-totalité des secteurs : du niveau bas de notre université, de l’archaïsme déroutant de l’agriculture, de la mise à mort des structures de la santé (est-ce normal qu’en 2011 nous achetions des produits pharmaceutiques de Jordanie, alors que nos éminents médecins spécialistes et nos chimistes se vendent sur plusieurs continents ?), comment et pourquoi a-t-on affaibli la Cnan ? Au profit de qui ? Abordant le volet des fabrications stratégiques, l’expert dira que tout pays considère que certaines fabrications sont essentielles pour asseoir sa domination ou renforcer sa position stratégique. Il parlera de la surveillance des frontières sensibles, le littoral, les gazoducs et pipelines soit par des systèmes satellitaires ou des avions guidés au sol, du fléau acridien saisonnier, de la fabrication des vaccins des grandes pandémies, du silicium pour applications solaires photovoltaïques, l’exploration des gisements d’uranium.

Des réformes pour solutions durables
Comment préparer l’avenir ? s’interroge-t-on. “Il faut un examen très lucide de la situation et dresser le cas échéant un constat d’échec pour mieux réagir dans les différents segments de la vie économique et sociale tels que l’éducation, la formation, la santé, la stratégie industrielle, la modernisation de l’agriculture, la culture financière des acteurs économiques, l’efficacité de l’administration, la relance et la croissance des entreprises, la formation civique et politique de la jeunesse, etc. Pour cela, il est nécessaire de faire un New Deal avec tous les Algériens pour relancer les grands travaux à tous les secteurs d’activité. Le partenariat public-privé (PPP) serait défini entre l’État et les entreprises algériennes pour promouvoir notre engineering et notre qualification. L’apport des sociétés étrangères ne viendrait que combler la non-maîtrise de certains complexes ou de fournitures d’équipements spécialisés. La réforme du système éducatif commence par l’orientation de la formation vers l’entreprenariat, c’est-à-dire apprendre soit un métier avec sortie d’artisan qualifié, d’une part et d’autre part avec un succès au financement de l’équipement permettant l’exercice de cette profession. Il est temps aussi d’internationaliser les entreprises algériennes par des participations, fusions/acquisitions. Comme il est grand temps de lancer les grandes cultures industrialisantes.
Les cultures de substitution sont parfaitement envisageables avec un concours actif de l’État et de la matière grise. L’Égypte, l’Espagne, la Tunisie et le Maroc ont réussi là où nous avons échoué”, commente le Dr Goumiri. Pour le Dr Lamiri, P-DG d’Iniescom et PCA à l’Insim, il ne s’agit pas de s’en tenir aux simples réalisations sans tenir compte des ressources utilisées. “C’est une croissance extensive”, précise-t-il. Et d’expliquer que “dans la grande majorité des pays, une relance publique de 1% induit 2,5 à 3% de croissance du PIB.
Les dépenses d’appui à la relance avoisinent les 1 à 3% du PIB. En Algérie, les dépenses publiques de l’ordre de 18% ont produit une croissance de 5,5%, à peine la moyenne des pays africains et mondiaux qui n’ont aucun plan de relance. Les indicateurs montrent des signes de faiblesse de l’économie. Un diagnostic profond révélerait que la cause essentielle de cette amélioration des indicateurs réside dans l’injection massive de ressources dérivées d’une embellie de la rente pétrolière mais que le développement reste à maîtriser. Cependant, l’économie algérienne est capable d’absorber les 380 000 nouveaux venus au marché de l’emploi avec une croissance de 6 à 7%. Cette croissance est possible avec une meilleure orientation des ressources”.


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