Algérie

Des enseignants racontent leurs expériences en confinement



La décision des pouvoirs publics de fermer les universités, puis de prolonger les vacances universitaires, accompagnée par des mesures d'interdiction de transport, d'activités commerciales et de confinement partiel dans plusieurs wilayas pour endiguer la propagation du coronavirus a sérieusement perturbé les enseignants des universités de Constantine.Sollicités pour raconter leur quotidien, certains n'hésitent pas à qualifier cette expérience d'inédite dans leur carrière professionnelle. «J'avoue que mon mode de vie connaît un changement radical.
Ce nouveau train de vie n'est pas sans répercussions sur notre santé mentale et physique», révèle docteure Zineb Haroun, maître de conférences en didactique au Département de lettres et langue française de l'Université des Frères Mentouri Constantine 1.
Cette situation vécue, par ailleurs, comme une lourde contrainte est durement ressentie par d'autres enseignants qui regrettent l'absence de contact avec leurs étudiants. Docteur Hamza Semmari, enseignant à l'Ecole nationale polytechnique de Constantine (ENPC), évoque le problème à travers ses aspects pédagogique, et social. «Il faut dire que cette situation ne profite ni aux enseignants ni aux étudiants. Cela vient compliquer encore davantage le déroulement de l'année universitaire dont le démarrage a connu beaucoup de difficultés à cause des retards cumulés l'année passée», affirme-t-il.
Maintenir le contact avec les étudiants
Pour autant, des enseignants interrogés avouent ne pas avoir rompu le contact avec leurs étudiants durant le confinement. «Le contact avec mes étudiants est maintenu actuellement au moyen des courriels et la plateforme class-room de Google pour le dépôt des supports de cours et de leurs travaux ainsi que pour l'encadrement des masterants en voie de soutenance de leurs mémoires», ajoute Dr Zineb Haroun. Pour sa part le Dr Semmari pose le problème d'un autre point de vue. «Personnellement, j'ai continué à travailler à distance sur Skype et à travers les échanges d'email pour superviser les étudiants que j'encadre en fin de cycle», dit-il.
Toutefois, le recours aux cours en ligne préconisé par la tutelle n'a pas été perçu comme une méthode nouvelle pour certains. «Je me suis engagée depuis plus d'une vingtaine de jours dans le dépôt des supports pédagogiques via la plateforme class-room de Google facile à manier pour les étudiants. Prochainement, nous allons basculer vers la plateforme Moodle qui est hébergée par le site de l'université», explique Dr Haroun.
Notre interlocutrice soutient que le problème se pose dans l'accès à une connexion de haut débit, la disponibilité du matériel adéquat chez les enseignants et chez les étudiants. Mais le problème le plus important est la nature des cours à diffuser à distance qui diffère d'une spécialité à une autre. Interrogé sur le volet des cours en ligne, Dr Hamza Semmari trouve la formule intéressante et l'initiative très louable. «Pour quelques universités, cette approche semble bien marcher en dépit de quelques problèmes.
Certes, c'est une approche qui reste nouvelle pour nous et sur laquelle nous n'étions jamais formés. A mon sens, le déploiement de l'enseignement en ligne requiert une très bonne organisation en amont non seulement sur le plan structurel et technique mais aussi par rapport au renforcement des capacités des enseignants afin de leur permettre de mieux maîtriser les nouvelles technologies de l'information et de communication», note-t-il.
Des problèmes qui surgissent
Mais qu'en pensent les enseignants de cette méthode ' «Devant le spectre de l'année blanche, l'enseignement à distance se présente comme la seule alternative pour garantir la continuité des cours. Néanmoins, il ne résout pas le problème de la compréhension des cours. L'accès aux connaissances est une chose et leur hiérarchisation et leur intégration en est une autre», répond Dr Haroun.
Elle pose avec insistance le problème de l'évaluation des apprentissages des étudiants. «Les évaluations certificatives, qui sont le mode de validation des acquis des apprenants par les institutions éducatives, se déroulent en présentiel et dans des conditions bien déterminées alors que les évaluations à distance risquent de poser le problème de leur validité et de leur fiabilité», indique-t-elle. Il est toutefois prématuré de s'avancer sur les résultats que l'enseignement à distance pourra donner.
Cela dépendra de plusieurs facteurs. Pour Dr Haroun, il va falloir procéder à des observations de terrain pour recueillir des éléments statistiques sur la réussite de l'enseignement à distance selon plusieurs angles et dimensions. «Toutefois, cette situation de pandémie peut être le point de départ pour une réflexion objective sur ce mode d'enseignement à l'université algérienne afin de le contextualiser à notre réalité et de l'instaurer en tant que mode de formation sur de solides bases», ajoute-t-elle.
Quant à la réaction des étudiants face à cette nouvelle méthode, elle est diversement appréciée. «Mes étudiants et plus particulièrement ceux de master ont adhéré à cette méthode de travail.
Néanmoins, les inégalités en termes d'accès à internet et de possession de micro-ordinateur individuel ont souvent été des entraves pour eux pour un suivi continu des cours postés et des travaux à effectuer», déclare Dr Haroun. «Nos étudiants sont très conscients et ils contribuent activement en proposant diverses outils ou plateformes numériques pour l'enseignement. Je ne pense pas que tous les étudiants soient sur le même pied d'égalité.
Il y a ceux qui habitent dans des régions isolées ou l'accès à internet fait défaut ; il y en a d'autres qui se retrouvent confinés dans quelques mètres carrés. Tout dépend des régions et du statut social de chaque étudiant», conclut Dr Semmari.


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