Tout comme les autres quartiers d'Alger, Belouizdad a vibré au rythme de la marche du vendredi 1er mars. Une marrée humaine qui a relié, hier, Laâkiba à la place du 1er-Mai.Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Treize heures trente, la rue Mohamed-Belouizdad est presque déserte. Tous les rideaux des magasins sont baissés. Seuls quelques jeunes rôdent dans les ruelles avoisinantes. Visiblement impatients de voir la prière du vendredi se terminer le plus tôt possible, ils n'hésitent pas à échanger, de temps à autre, quelques mots au sujet des marches prévues justement après cette prière.
Un quart d'heure plus tard, des dizaines de fidèles commencent à affluer de la rue menant de la mosquée Salah-Eddine-El-Ayoubi, surnommée la mosquée Kaboul dans les années 1990, à Laâkiba, vers la rue Mohamed-Belouizdad, la rue principale de l'ex-quartier de Belcourt.
A tous les niveaux de la spacieuse rue, des jeunes hommes et des jeunes filles, arrivant des ruelles perpendiculaires, surgissent et rejoignent les groupes de fidèles dans leur marche hâtive vers la place du 1er-Mai. Tout le monde presse le pas. L'on dirait qu'ils se hâtent pour arriver à l'heure à un grand évènement.
Leur «course» n'a pas duré longtemps. Un cordon policier érigé à proximité de l'ancien cinéma le Musset freine leur marche. Point de problème pour les «marcheurs» qui se font de plus en plus nombreux. Ils contournent l'obstacle et passent du côté gauche du cordon de sécurité.
Constatant cette «brèche», un des officiers de police présents sur les lieux perd subitement son calme. Il demande à ses éléments de boucher l'issue d'où passent les manifestants. «Fermez-la, fermez-la», ne cesse-t-il de hurler tout en bousculant les éléments de la police antiémeutes pour se décaler et étirer ainsi le long cordon qu'ils forment.
Ceux qui ont pu échapper à ce cordon continuent paisiblement leur marche. Les autres doivent emprunter d'autres rues parallèles pour les rejoindre. Désormais, plus rien ne peut les dissuader à prendre part à la marche de ce vendredi. Des centaines de jeunes, des moins jeunes, des hommes, des femmes et même des enfants ont été de la partie à la rue Mohamed-Belouizdad.
Le rythme de leur marche s'accélère. Ils ont hâte d'atteindre la place du 1er-Mai à environ une centaine de mètres à l'ouest. Là encore, une mauvaise surprise les attend à proximité du ministère de la Jeunesse et des Sports. Un autre obstacle policier a été installé où un double cordon de sécurité barre la route aux manifestants. Juste derrière est garé un camion anti-émeutes muni d'un canon à eau.
Des dizaines de manifestants s'arrêtent face à ce cordon mais leurs voix ne cessent pas. Ils continuent ainsi à scander des slogans hostiles au pouvoir en place, contre Bouteflika et contre le 5e mandat.
Au fur et à mesure, d'autres groupes de manifestants arrivent sur les lieux et renforcent leurs rangs. Pris de court, les éléments de la police antiémeutes n'ont pas hésité à asperger les manifestants de gaz lacrymogènes. Les premiers rangs sont les plus touchés. Des jeunes, le visage tout rouge, sont vite pris en charge par la foule. Ils sont touchés de plein fouet par le jet du gaz lacrymogène. Ramenés sur le trottoir, sous les arcades d'un immeuble, une femme surgit de l'entrée du bâtiment et leur tend une compresse et une bouteille de vinaigre. «Ne vous lavez pas avec de l'eau, utilisez le vinaigre», leur lance un jeune. Aidés par leurs accompagnateurs, ces jeunes atteints s'imprègnent le visage de vinaigre pour calmer les effets du gaz lancé par la police.
Sur tout le long de la rue Mohamed-Belouizdad, des femmes et des enfants sont perchés aux balcons. Certains agitent le drapeau algérien tandis que d'autres, munis de leurs smartphones, filment des séquences de la marche.
Le temps passe et une marée humaine se forme sur les lieux face au bouclier policier. Plusieurs groupes de manifestants continuent à affluer. Ils viennent d'El-Madania, d'El-Mouradia, de Kouba, de Hussein-Dey, d'El-Harrach et d'autres quartiers de l'est de la capitale. Les banderoles et drapeaux exhibés de leurs clubs de football en témoignent.
Outre les nombreux slogans qui dénotent la maturité politique de ces jeunes et de leur inspiration, des youyous fusent de partout. Ici, la jupe se mêle au voile et à la robe kabyle, et la barbe se joint à la coupe de cheveux tendance à la Messi. Un seul mot d'ordre : «Non au 5e mandat.»
Ry. N.
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Posté Le : 02/03/2019
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Rym Nasri
Source : www.lesoirdalgerie.com