Algérie

Des dépôts de sable à moins de 100 km de la ville de Sidi Bel-Abbès...



Le désert commence-t-il à R’Djem Demouche ?   Véritable microcosme du Tell oranien avec sa vaste plaine de la Mékerra, ses massifs forestiers du Tessala et de Dhaya, ses hauts plateaux steppiques couvrant les daïras de Ras el-Ma et de Marhoum, la wilaya de Sidi Bel-Abbès n’aura jamais été soumise, autant qu’aujourd’hui, à ces «phénomènes insidieux de la désertification, de la sécheresse, de la dégradation des sols et de l’épuisement des ressources hydriques». Le constat établi il y a quatre ans par les spécialistes sur l’état de l’environnement est loin d’être des plus optimiste. Tous les éléments du diagnostic se recoupent pour mettre en évidence la forte menace qui pèse sur la région du fait de l’action conjuguée des éléments de la nature et de l’action de l’homme. «Dégradation continue de la steppe, érosion des sols, pollution, déforestation touchant une superficie de près de 100.000 hectares...» «Les causes sont multiples, dit-on, mais se rejoignent toutes pour signifier cette terrible évidence: les signes avant-coureurs de la désertification sont bel et bien présents en plusieurs points du territoire de la wilaya de Sidi Bel-Abbès à travers notamment l’apparition étrange de plantes steppiques dans la plaine au Nord et d’importants dépôts de sable sur plus de 1000 hectares au sud de la wilaya, plus précisément dans la commune de R’Djem Demouche (Daïra de Ras el- Ma)...Comment est-on arrivé à une telle situation? L’explication sera fournie par les spécialistes du secteur qui estiment que «la steppe est un écosystème extrêmement fragile qui subit de nos jours trois sortes de désertification: la première est écologique (les vents de sable qui soufflent dans les zones épargnées jusque-là par le phénomène), la seconde est sociale en ce sens que de nombreux agropasteurs, ayant perdu leurs capitaux du fait de la sécheresse, viennent s’agglutiner autour des principaux centres urbains des hauts plateaux steppiques, la troisième est économique, puisque tout le potentiel d’alimentation fourni jusqu’alors par les parcours est en train de disparaître.» «Le phénomène de dépérissement de la steppe alfatière, fait-on observer à ce propos, remonterait à 1971, année au cours de laquelle la culture de l’orge a été introduite pour la première fois dans la pratique culturale en milieu steppique. Ce sont donc les labours illicites entrepris depuis cette date qui ont accentué significativement le phénomène de désertification jusqu’à le rendre en certains endroits presque irréversible. L’ampleur du désastre peut être évaluée en termes chiffrés à un million d’hectares de zones potentielles habituellement et ancestralement labourées, la sole labourable a été triplée aujourd’hui, soit 3,25 millions d’hectares, dont une superficie de 2,5 millions d’hectares environ a été prise sur le couvert végétal naturel constitué essentiellement de nappes alfatières... C’est pour dire en somme qu’actuellement la situation est devenue tellement critique qu’elle nécessite dorénavant une prise en charge intersectorielle réelle pour pouvoir orienter le développement et éviter surtout les labours anarchiques qui ont fortement fragilisé les sols et tendraient même à hypothéquer l’avenir de l’écosystème steppique et partant celui de toute la communauté pastorale.» A contrario, les responsables se montreront, quant à eux, beaucoup moins pessimistes que les spécialistes en faisant remarquer qu’ « en sus des travaux prévus dans le cadre des programmes sectoriels (environnement, agriculture, forêts, hydraulique), les effets conjugués de l’ensemble de ces phénomènes sont en mesure d’être atténués à la faveur d’un «plan d’action global, intégré, cohérent et continu», soutenu par les différents fonds mis en place par l’Etat, et s’insérant dans une nouvelle vision de développement des écosystèmes steppiques et la lutte contre le phénomène de la désertification et ses implications écologique, sociale et économique.» Cette nouvelle donne ne manquera pas ainsi de séduire de grands opérateurs privés qui ne tardèrent pas à préconiser la création en zones steppiques de périmètres de Médicago Arboréa sous serres ou en plein champ, de pistachiers et autres variétés fourragères sous la forme de petites exploitations agropastorales de 25 hectares chacune, combinées à l’élevage ovin et à d’autres activités annexes. Malheureusement, les promoteurs de cet ambitieux projet buteront encore une fois sur une multiplicité d’obstacles bureaucratiques et autres. Quel que soit le jugement que l’on peut porter sur les efforts des uns et des autres, il faut dire que la célébration de cette journée du 17 juin ne manquera certainement pas d’interpeller une nouvelle fois toutes les parties concernées sur « le danger qui guette l’espace dans son ensemble et dans toutes ses composantes et qui ne permet pas, comme l’a bien souligné un chercheur de l’université Djillali Liabès de Sidi Bel-Abbès, «d’envisager une quelconque satisfaction : les bases fondamentales de la préservation de l’équilibre écologique dans les domaines agricole, forestier, steppique et urbain étant absentes. «Il reste à espérer que le programme mis en œuvre par l’Etat, de même que le nouveau statut du HCDS (haut commissariat au développement de la steppe) qui rendra beaucoup plus effective l’implication de la population quant à sa préservation future, seront autant d’atouts pour que la désertification ne soit jamais plus perçue en Algérie comme une inexorable fatalité.


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