Algérie - A la une

Des chiffres mis en doute



Depuis quelques semaines, le nombre de nouveaux cas de contamination au Sars-CoV-2, virus responsable du Covid-19, ne cesse de baisser. Le nombre de décès évolue lui, par contre, en dents de scie. Ces chiffres qui semblent incohérents et qui suscitent un doute certain parmi la population sont sous la loupe des spécialistes.Rym Nasri - Alger (Le Soir) - L'épidémie de nouveau coronavirus en Algérie connaît, depuis quelques semaines, une certaine accalmie. Chiffres à l'appui, le Comité scientifique de suivi de l'évolution du Covid-19 annonce un nombre de cas de contamination en baisse quotidien. Mais celui des morts ne suit pas cette tendance décroissante. Chaque jour enregistre son lot de victimes, tantôt en hausse tantôt en baisse. Des spécialistes tentent d'analyser ces données.
Pour le Pr Salim Nafti, ancien chef de service de la clinique des maladies respiratoires au CHU Mustapha-Pacha, il est impossible que le nombre de décès augmente alors que le nombre de cas contaminés par le virus diminue. «Nous avons des chiffes mais nous ne savons pas combien de tests ont été effectués et dans quelles régions ils ont été réalisés. Le Comité de suivi de l'épidémie de Covid-19 ne doit pas se contenter de donner des chiffres sans explications. Il faut qu'il nous éclaircisse mieux sur cette question», dit-il.
Le spécialiste en pneumo-phtisiologie estime que les équipes chargées des études épidémiologiques, elles aussi, doivent communiquer leurs résultats. «Nous attendons avec impatience les résultats de ces études et les explications des épidémiologistes de l'évolution actuelle du nouveau coronavirus», ajoute-t-il.
De son côté, le Dr Lyes Merabet, le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), affirme que les chiffres annoncés restent en deçà des chiffres réels. «Ces chiffres ne peuvent en aucun cas refléter la réalité du terrain», dit-il.
Pourtant, il admet que les différentes structures hospitalières du pays enregistrent, depuis quelque temps, un calme certain. «Aujourd'hui, moins de malades sont admis aux services des urgences et moins de personnes présentant les symptômes du Covid-19 viennent aux consultations. La plupart d'entre eux ont, d'ailleurs, des symptômes mineurs et ne sont pas candidats à une hospitalisation. Ils sont suivis à titre ambulatoire et confinés chez eux avec un traitement», explique-t-il.
Selon le Dr Merabet, cette incohérence dans les statistiques est due tout simplement aux capacités de dépistage «non améliorées». «Dans les établissements hospitaliers de certaines wilayas, les tests PCR effectués auparavant avec beaucoup de difficultés ne se font plus actuellement faute de réactifs», dit-il.
Tributaire de la compétence du personnel et du matériel spécial, cet examen, note-t-il, nécessite des laboratoires, du personnel apte à réaliser ces tests, de machines, de réactifs et des kits de prélèvement.
Quant au nombre de décès, le président du SNPSP assure qu'il est en corrélation avec la situation générale. «Nous ne pouvons pas avoir des chiffres qui accompagnent régulièrement les chiffres annoncés par rapport aux nouveaux cas car parmi les personnes déclarées, il y a des personnes âgées et des malades chroniques».
Capacité de dépistage insuffisante !
Pour être efficace, le Dr Lyes Merabet estime que l'Algérie doit effectuer pas moins de 20 mille à 25 mille tests par semaine. Or, selon les déclarations du directeur général de l'Institut Pasteur d'Algérie, le Dr Derar, le maximum atteint est 2 000 tests par jour, réalisés entre juin et juillet. «Nous ne sommes plus à ce niveau. Actuellement, 600 tests au maximum sont effectués par jour», précise le Dr Merabet.
Pour lui, le dépistage n'est pas la seule «faille» puisque même l'organisation du plan d'action préventif fait défaut. «Nous ne sommes pas dans l'efficacité et nous risquons donc de vivre une situation de retour de manivelle comme c'est le cas dans beaucoup de pays en Europe et ailleurs», s'inquiète-t-il. Le praticien déplorant, à cet effet, l'«abandon» des campagnes de sensibilisation et de communication. «Nous avons carrément abandonné ce segment très important du plan d'action et cela donne l'impression aux citoyens que nous sommes sortis de la crise sanitaire. C'est une erreur monumentale de prendre à la légère cette situation épidémique qui ne dépend pas uniquement de notre pays sachant que nous ne pouvons rester enfermés sur nous-mêmes éternellement. Nous serons amenés à nous ouvrir aux autres pour permettre la libre circulation des marchandises et des personnes et être en interaction avec les autres pays», conclut-il.
Ry. N.


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