Quand les bruits de couloirs ne sont plus audibles, nous nous faisons un
plaisir de vous les faire parvenir. Musique.
Il ne s'agit pas de briser l'enthousiasme des révolutions arabes ou de
douter de l'engagement pour l'aide financière des riches Occidentaux annoncée
au Sommet du G8 tenu à Deauville jeudi et vendredi derniers. Mais il se trouve
que les décisions prises lors des précédents sommets ont rarement été menées à
terme. Y compris celles prononcées, suite à la crise financière internationale
de 2008, par le Club du G20 à Rome, Paris, Pittsburgh, Tokyo et ailleurs. Les
promesses d'une meilleure régulation financière, de lutte contre les paradis
fiscaux, de plafonnement des parachutes dorés et autres taxations des
transactions financières attendent, à ce jour, les mécanismes et lois pour leur
application. Le droit au doute est donc légitime pour ce qui concerne les
dernières promesses d'appui financier du G8 pour l'Egypte, la Tunisie et la Libye. Le chiffre de 40
milliards de dollars a été avancé à Deauville. Parallèlement, l'Union
européenne a annoncé, par la voix de son président Herman
Van Rompuy, l'augmentation de l'aide aux réformes aux
pays du Sud Méditerranée de quelque 3, 7 milliards, en plus des 5,7 milliards
déjà promis pour 2011-13. Il a été question d'argent, de beaucoup d'argent pour
accompagner le printemps arabe. Espérons que l'engagement occidental, plus
précisément celui de l'UE, ne suive pas l'exemple de l'ex-processus de
Barcelone, devenu Union pour la
Méditerranée (UPM), devenu une… impasse politique. Un simple
regard sur le tableau des paiements des reliquats aux pays du Sud Méditerrané
vous édifiera sur la très, très grande lenteur de l'exécution des engagements
financiers de l'UE. Des promesses datant des années 2000,
voire de la fin des années 1990 pour certains pays du Sud, attendent la signature
d'un contrôleur financier de tel ou tel département financier européen.
Souvent, la lenteur ou la non-exécution
du transfert financier est attribuée à la bureaucratie légendaire des pays du
Sud. C'est vrai en partie. Malheureusement, à l'hydre bureaucratique des
administrations des pays du Sud, s'ajoute celle de l'UE.
Et pas seulement lorsqu'il s'agit de transferts financiers hors Europe. Le
syndrome du retard de paiement menace gravement les entreprises européennes
elles-mêmes.
C'est ce que vient de révéler une étude de la très sérieuse « Intrum Justicia », une entreprise
suédoise de gestion et de suivi des mouvements financiers des entreprises
européennes. « Intrum Justicia
» dispose de délégations dans 24 pays européens et plus de 160 représentations
à travers le monde. Son bilan pour l'année fiscale 2010-2011 est édifiant sur
les risques que font peser les retards de paiement sur les entreprises. Pour
les 12 derniers mois, la société chiffre la dette des entreprises européennes à
312 milliards d'euros. Autrement dit, « plus que les 275 milliards d'aide à la Grèce, l'Irlande et le
Portugal », affirme l'étude. Une faillite sur quatre est due au retard de
paiement aux entreprises privées par les administrations publiques. L'étude
prouve que « les autorités publiques sont les plus mauvais payeurs. » La menace
pour la survie des entreprises privées, et par conséquent sur la croissance, est
telle que la Commission
européenne s'est décidée à actualiser la directive sur le retard des paiements
pour qu'elle soit généralisée au 27 pays de l'UE en… 2013. La Commission européenne
projette d'interdire les délais de paiements interentreprises admis à ce jour
et qui sont de l'ordre de… 200 à 300 jours. Soit un délai d'une année. Tant
mieux, vaut mieux tard que jamais. Dans ce sens, les entreprises algériennes
publiques et privées qui commercent avec l'UE en savent quelque chose. Et pas
seulement. Demandez aux services du Premier ministre ou ceux des Affaires
étrangères de publier l'état des créances européennes, qu'elles soient
publiques ou privées: un cauchemar pour les comptables. C'est pourquoi les pays
arabes, qu'ils soient en pleine tourmente révolutionnaire ou pas, ne doivent
pas fléchir leur mouvement vers la liberté en plaçant leurs espoirs sur la
seule aide financière des Occidentaux. Du moins celle des Européens, parce que
les Américains, eux, tiennent leurs promesses dans ce
domaine. Si les révolutions ont toujours eu comme déclencheur la misère et
l'injustice, elles ont réussi, et l'histoire le prouve, leur cycle grâce à la
force des idées, de la conviction et de l'engagement de ceux et celles qui les
ont conduites. Que les riches Occidentaux s'y mêlent avec de l'argent est une
aide certaine et un signe de solidarité non négligeable. Seulement, il ne faut
pas qu'ils s'en accaparent la paternité et tout le mérite. Les Occidentaux ont
été les complices, pour ne pas dire les parrains, des dictateurs arabes déchus
pour des questions d'intérêts réciproques et… d'argent. Bienvenue donc à
l'argent des Occidentaux, mais attention à ce qu'il n'en soit le seul moteur
pour le rêve de la liberté.
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Posté Le : 30/05/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Bureau De Bruxelles : M'hammedi Bouzina Med
Source : www.lequotidien-oran.com