De hauts cadres de la police, en activité ou à la retraite depuis peu, reviennent sur la situation au sein du corps de la Sûreté nationale.Sous le couvert de l'anonymat, nos interlocuteurs sont unanimes à qualifier de «gravissime» la marche de leurs collègues sur la Présidence, tout en déclarant être «compréhensifs» à leur égard. Pour comprendre ce qui s'est passé, disent-ils, il faut revenir à la gestion de cette institution depuis la nomination de Abdelghani Hamel à sa tête. «Les agents de l'ordre public, qui ont organisé la manifestation, ont eu le courage que leurs aînés, victimes ou témoins d'abus, n'ont pu avoir. La peur tétanisait nombre d'entre nous en raison des mesures de représailles qui ont touché les plus méritants des cadres de la police. Certains ont derrière eux des années de sacrifice dans le cadre de la lutte antiterroriste», révèlent nos interlocuteurs.Selon eux, le DGSN a commis de nombreuses erreurs. «Dès qu'il est venu, il a commencé par neutraliser le service des Renseignements généraux, qui dépendait depuis l'indépendance de la direction générale. Il l'a tout simplement réduit à un petit service rattaché aux sûretés de wilaya, réduisant ainsi tous ses pouvoirs. En parallèle, il utilisait l'Inspection générale des services (IGS), rattachée à son cabinet, pour faire passer les mesures disciplinaires sans recours et souvent arbitraires. Les victimes se comptent par dizaines, et elles n'ont même pas le droit de se défendre?»Mieux, disent-ils, «ces quatre dernières années, nous assistons à une véritable banalisation des grades et des fonctions. De nombreux policiers, qui avaient le grade d'officier en 2002, se retrouvent en 2012 promus divisionnaires. Pourtant, la réglementation est très claire à ce sujet. Il faut au moins 20 ans d'exercice pour passer du grade d'officier à celui de divisionnaire. Des chefs de sûreté de daïra, promus en quelques années au poste de chef de sûreté de wilaya, des chefs de sûreté de wilaya qui se voient propulsés au grade de contrôleur en un temps record?. Mieux, le directeur général a créé un poste d'inspecteur régional qui coiffe plusieurs sûretés de wilaya, mais qui ne dépend pas de l'inspection générale mais du cabinet. Ils sont au nombre de six répartis à travers le pays, comme c'est le cas pour les Régions militaires ou la gendarmerie. Ce qui est bizarre c'est qu'ils ne sont pas prévus par la réglementation. Ils travaillent directement avec le DG et l'inspection générale n'a aucune autorité sur eux», explique-t-on.La gestion des ressources humaines, notent-ils, a été «fortement marquée par des erreurs d'appréciation et des abus. Tous les pouvoirs ont été concentrés entre les mains du directeur des ressources humaines. Les chefs de sûreté de wilaya n'ont pas le droit de déplacer un seul agent de l'ordre public d'un service à un autre sans l'accord du DRH, alors qu'avant, cette mesure relevait de leurs prérogatives». Durant ces quatre dernières années, ajoutent-ils, le nombre de mouvements dans les rangs de l'institution a dépassé celui opéré depuis l'indépendance.Durant les trois mois qui ont suivi son installation, en juillet 2010, le DGSN a donné le ton en relevant 23 chefs de sûreté de wilaya, restés sans poste pour des raisons inconnues. Nos sources estiment que depuis son arrivée, le DGSN a creusé le fossé entre lui et une bonne partie de ses troupes. «Même au sein de la DGSN, la méfiance est de mise. Lors des réunions, les cadres sont fouillés, leurs armes et téléphones confisqués, avant de passer par un portique de détection des métaux que ses proches collaborateurs trimballent partout où le DGSN doit rencontrer ses subordonnés», raconte-t-on.Nos interlocuteurs trouvent la réaction des agents de l'ordre public «prévisible». «Ce sont des jeunes qui ne sont pas encore dans le bain pour mesurer la gravité de leur action, même si elle est légitime. Sachez que depuis l'arrivée de Hamel, il n'y a jamais eu de concours de recrutement. Les jeunes recrues passent uniquement le test psychologique et une visite médicale. Le tri d'antan ne se fait plus. On recrute de tout? Alors si aujourd'hui, des agents de l'ordre public exigent le départ du DGSN, c'est parce que ce dernier a tout fait pour casser l'échelle des grades au sein de l'institution», concluent nos sources.
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Posté Le : 21/10/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Salima Tlemçani
Source : www.elwatan.com