Des barques transformées en bateaux de plaisance!

Les pêcheurs se transforment en transporteursLes pêcheurs connaissent par coeur la mer et les petites îles abritant les poissons faisant l'objet de convoitise des adeptes de la plongée sous-marine.Etant cernés de tous les côtés par les garde-côtes dans le cadre de la lutte contre l'immigration clandestine (la harga), des propriétaires de barques versent dans le nouveau tourisme qui n'est régi par aucune législation: le transport des adeptes de la plongée sous-marine. Dans leur dernière trouvaille, ces pêcheurs ont créé un nouveau phénomène: transformer leurs embarcations en véritables bateaux de plaisance transportant les curieux des profondeurs de la mer et les férus de la pêche sous-marine. L'information est difficile à vérifier tant que le phénomène n'est qu'à ses débuts. D'autant plus que cette activité ne fait pas pour le moment l'objet d'une quelconque procédure judiciaire ou policière.Le phénomène prend tout de même des formes multidimensionnelles. Il suffit de se rendre dans le petit port de pêche de Kristel (est d'Oran) pour se rendre à l'évidence que plusieurs pêcheurs-propriétaires de petites barques proposent leurs services aux touristes peu ordinaires, les férus de la plongée sous-marine. De l'avis des juristes, «une telle activité est strictement interdite». N'empêche qu'elle est exercée par plusieurs pêcheurs qui continuent à hésiter quant à prendre le large pour exercer leur véritable métier, la pêche, vu la faiblesse de leurs «récoltes», a-t-on constaté en questionnant plusieurs pêcheurs rencontrés sur place.Plusieurs raisons motivent ces derniers à renoncer à la pêche tout en changeant illégalement d'activité. «Le poisson se fait très rare dans les eaux de la Méditerranée», avance-t-on. Ce n'est un secret pour personne, notamment dans le petit village de Kristel, que les dizaines de pêcheurs (bahria) et les capitaines (raïs) connaissent par coeur la mer, ses secrets, ses courants marins, mais aussi ses petites îles rocheuses se trouvant à quelques miles nautiques d'Oran.Ces petites îles abritent de grandes pièces de poissons faisant l'objet de convoitises des adeptes de la plongée sous-marine.Accostés dans le petit port de Kristel, ces pêcheurs ne répugnent pas à prendre en charge leurs clients même en sentant une petite touche de «tout va mal» pouvant les mettre en péril au point de constituer le centre d'enjeux et objets d'enquêtes. Dans la majeure partie des cas, ils répondent par l'affirmative à la moindre sollicitation pour fixer aussi bien l'heure que le lieu du départ ainsi que le tarif à casquer. Le coût du voyage est souvent arrêté entre 1000 et 2000 DA/personne. «C'est selon le climat, la force et la direction du vent», dira un pêcheur expliquant fièrement et fermement que «nous assurons tout de même l'aller-retour». L'aller se fait le soir alors que le retour est prévu tôt dans la matinée du lendemain.Le départ vers une aventure incertaine est décidé dès que le pêcheur-transporteur, ayant regroupé une dizaine de personnes, a encaissé en même temps les frais de ses services. Une embarcation de taille moyenne peut embarquer jusqu'à 10 personnes», dira-t-on. «Plusieurs de mes camarades n'exercent que ce métier», dira un pêcheur rencontré à Kristel dans le cadre d'une simulation organisée par nos soins à l'effet de percer le secret de cette nouvelle «organisation secrète» mise en place par des pêcheurs se disant frappés par deux faits importants: la disette des fruits de mer et la pauvreté dont ils sont victimes à la faveur des investissements de plusieurs dizaines de jeunes pêcheurs soutenus par les différents dispositifs de l'emploi de jeune.«Ces nouveaux débarqués, parachutés par effraction dans notre métier, nous ont réduits au chômage et sans aucune ressource financière», a déploré un pêcheur plaidant pour que «le transport des amoureux de la plongée sous-marine soit légalisé au vu de la forte demande le marquant notamment pendant l'été».Or, là réside toute la problématique: les bateaux proposés au transport des adeptes de la plongée sous-marine au large de la mer, sont souvent vétustes, détériorés, dépourvus de tous les équipements de communication leur permettant de rallier les secouristes dans d'éventuels cas de détresse. Leurs patrons, ou encore ces navigateurs se proclamant maîtres de la mer, comptent sur leurs techniques et connaissances des lieux qu'ils jugent adéquats pour la plongée sous-marine.Là encore, une autre problématique est posée avec acuité. Plusieurs plongeurs ont souvent été pris en otage pendant plusieurs jours par la furie de la nature. Leur seul espoir quant à s'en sortir était de résister et d'attendre l'accalmie tout en subissant les aléas risqués des intempéries en s'abritant derrière les rochers. Car, leurs «transporteurs» ne s'aventurent guère à braver la furie de la mer en vue de récupérer leurs clients.