Algérie

Des associations lancent la campagne « Kifkif devant la loi »



On ne naît pas femme d'action, on le devient. Après la campagne « 20 ans Barakat », initiée notamment par l'association Fatma n'Soumer, une dizaine d'associations ont lancé une action commune pour dénoncer les discriminations à l'encontre de la femme contenues dans le code de la famille. La campagne intitulée « Kifkif devant la loi » s'appuiera sur un travail de proximité auprès des femmes des villages pour une meilleure compréhension des textes de loi. Les associations Tharwa n'Fadhma n'Soumer, le collectif Femmes du printemps noir et le réseau Amusnaw, rejointes par Djazaïrouna, le réseau Wassila, l'association A VIFE et le collectif Femmes MDS organiseront, tout au long de l'année et jusqu'au 8 mars 2011, des rencontres, débats, expositions et cycles de formation. Une caravane sillonnera le pays à partir du 17 octobre prochain pour sensibiliser les femmes rurales sur leurs droits. Le fait est que l'amendement du code de la famille n'a pas tellement bousculé l'ordre établi.Les associations y relèvent de nombreuses contradictions. Elles citent l'exemple de l'article 87 qui maintient la tutelle paternelle sur les enfants et paradoxalement, de façon aussi « absurde », attribue la tutelle uniquement à la mère lorsqu'elle a la garde des enfants après un divorce. Autre incongruité : le code de la famille permet aux femmes de transmettre leur nationalité aux enfants mais interdit le mariage à un non- musulman. Les associations estiment que les concessions aux revendications féministes ont été faites de manière « calculée ». « Le statut personnel institutionnalise toujours l'infériorisation d'une moitié de la société par rapport à l'autre. Tout en mettant en avant des velléités de réforme, il s'agissait, en vérité, de continuer à bloquer ou à contrarier la voie de l'émancipation de la femme et l'entrée de la société toute entière dans la modernité », estiment les associations des droits de la femme. « Plusieurs pays du monde arabe sont en avance par rapport à nous et notamment l'Irak, la Tunisie, l'Egypte et le Maroc. Sommes-nous plus musulmans que les autres ' », s'interroge Cherifa Kheddar, association Djazaïrouna, des familles victimes du terrorisme, cité dans le classement de l'université Georgetown de Washington des 500 personnalités les plus influentes dans le monde musulman. Pour Ferroudja Moussaoui, de l'association Amusnaw, la principale avancée de l'amendement du code de la famille a été la « désacralisation » du texte. « On n'y fait pas référence à la charia. Mais la polygamie est toujours en vigueur dès lors que le mariage est consommé. Le mariage des mineures est légalisé de manière indirecte », explique-t-elle. Les membres des associations ont à c'ur de réaliser un travail de sensibilisation sur le code de la famille, espérant ainsi donner aux femmes les moyens de se battre contre toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe. « Il y a une ignorance totale des textes de lois, y compris des femmes instruites qui découvrent, devant le juge, l'étendue de la discrimination », regrette Ourida Chouaki, de l'association Fatma n'Soumer.Le manque d'espaces d'expressionLes associations luttant pour les droits des femmes ont élaboré une réflexion sur un projet de loi du code de la famille. « Nous avons voulu présenter une alternative au présent code qui est discriminatoire. La Constitution est bien plus en avance », nous explique-t-on. Cette campagne vient ainsi compléter le travail de « 20 ans Barakat ». « Le bilan de 20 ans Barakat a été positif. La campagne médiatique a eu une forte adhésion, mais nous ne pouvions pas aller vers tout le monde. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu faire ce travail de proximité », précise Mme Chouaki. Au chapitre du système de quotas que les pouvoirs publics entendent instaurer dans le Parlement, les membres des associations féminines estiment que ce n'est là qu'un juste retour des choses. « Ils n'ont rien inventé. Les articles insérés dans la Constitution pour les droits des femmes ne sont qu'une application des conventions internationales que notre pays a signées. Ce n'est ni une innovation ni un cadeau », souligne Cherifa Kheddar, qui considère que « la société algérienne est en avance par rapport à ses lois ». Il reste que l'un des plus grands obstacles auxquels sont confrontées les associations est lié au manque d'espaces d'expression. Alors que la rencontre-débat avec Lubna Hussein, journaliste libanaise, qui encourait 40 coups de fouet pour avoir porté un pantalon en public, devait se tenir au cinéma d'El Biar, la wilaya a refusé de leur délivrer l'autorisation. Les associations « dénoncent » ce refus, mais maintiennent la rencontre vendredi au siège du MDS.


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