Algérie

Des appels, un destin


Les sollicitations pour un troisième mandat présidentiel se sont multipliées ces derniers temps. Ils ont, de plus en plus, l'allure d'un forcing synchronisé visant à instaurer une ambiance d'un état de fait, pour amender la Constitution dans cette perspective. Cependant, ce raffut politico-médiatique excessivement anticipé, ne tenant pas compte de l'éventuelle évolution de l'état d'esprit actuel et surtout futur d'une grande partie de l'opinion publique, est susceptible de provoquer à terme, des impacts contraires à ceux visés dont, entre autres, les dérives sociales. A ce niveau d'hypothèse ainsi posée, que vaut le destin en ces moments là, A Dieu n'en plaise, de n'importe quel citoyen (ienne) devant celui de l'Algérie des humbles ? Plusieurs hypothèses ont été avancées, sur les raisons de ce mode de faire-valoir inhabituel dans nos pratiques politiques. Justement, c'est sur ce dernier point qu'il faudrait essayer de lorgner, afin de saisir les intentions des sérénades en cours. Les cercles d'allégeance - pavloviens impénitents - à n'importe quel pouvoir en place, depuis 1962, affichent nettement leur position en faveur d'un troisième mandat qu'ils considèrent déjà comme acquis d'avance, pour l'intérêt et l'avenir du pays, prophétisent-ils. Cependant, ils y a d'autres centres d'intérêts peu loquaces, discrets, qui seraient plus résolus et ont plus d'influence, sur l'état des choses, car fortement apparentés à ce destin et déterminés à le faire aboutir. Ce serait donc pour cette raison, que la première orbite s'est rangée en vrac, à côté de la seconde initiatrice de ces « nouvelles » habitudes politiques. Vraisemblablement, cette cognation veut-elle, par appréhension et prévention, mettre tout le monde devant le fait accompli y compris - peut-être - le postulant lui-même. Et surtout d'enfoncer le clou, en la matière, en anticipant ainsi tout événement déstabilisant qui pourrait bien surgir avant 2009. Un finish bien ficelé, à moins d'inattendus d'ici là et d'après. La politique algérienne a ses propres voies impénétrables. Elles sont si nombreuses. Pourtant, cette histoire du troisième mandat ne demandait pas du tout ce remue-ménage. En effet, tout Algérien (ienne) se sentant digne et capable de poursuivre une mission qu'il considère inachevée, sans faillir pour quelque motif que ce soit est éligible, rééligible selon la règle du jeu en vigueur sinon la réadapter franchement, dans le sens souhaité, dans le calme et le contentement généralisé. Comme c'est le second point qui semble se préciser, en tapages soporifiques malheureusement, d'un seul tenant, il serait donc utile d'ajouter dans ce cas, que cela engendrerait une certaine « culture politique ». Notre pays a certainement besoin de stabilité, d'ordre et d'essor dans tous les domaines, mais aussi à plus de ressorts de liberté à cultiver par des élites persuasives, et de démocratie à vulgariser par une société civile mobilisée et mobilisatrice. Nécessairement. Comparativement, avec les autres pays dits de transition, il faut reconnaître que nous jouissons de certains gains socio-économiques, culturels et de quelques acquis politiques avérés mais insuffisants et précaires. En effet, des déclarations - insinuations - officielles d'un haut responsable ont laissé entendre, voilà près de deux ans, que la mentalité du peuple algérien serait encline à un type de gouvernance caractérisée par une forte autorité idéalisée liée à ses traditions maraboutiques (?). Un non-sens. Nous appartenons, par destinée et affiliation, au monde arabe - une constellation d'autoritarismes - atteint, depuis belle lurette, du syndrome « antarien » (1). Il se manifeste avec dédain, outrageusement et vaniteusement, dans l'ère hydrocarburienne - considérée à tort comme une bénédiction divine par les gouvernants arabes car, renforçant leur emprise et dissimule leur déficience - qui est en train de poursuivre son cycle pétro-dollaresque finissant à terme (2). Ce dernier, une lame à double tranchant, est combiné à «une démocratie spécifique», en vérité handicapée, définie en élection locale et législative - une devanture alibi de représentation citoyenne - et présidentielle à vie. Une architecture centralisée du pouvoir. En fait, un autoritarisme symptomatique, d'où sont issus ces systèmes de gouvernance qui vont, de la république des arrangements clientèles, à l'émirat par allégeance groupusculaire - tribale -, aux monarchies dépositaires du « cherifisme » ancestral. Que des étrangetés. En pratique, des pouvoirs néroniens tétanisant près de 300 millions d'individus. En face d'eux, un « petit » Etat de 6,5 millions d'Israéliens mais aux grands desseins en tous genres. Les intégristes d'Israël prient instamment Yahvé pour que les élites gouvernantes arabes ne se rapprochent pas trop de la démocratie et du bon sens (3). Comme ce fut le cas irakien, entre autres, et ses conséquences dramatiques. Et plus encore, les manipulent à partir de ce manque d'élévation d'esprit, ainsi que par l'ignoble destin d'un peuple arabe effrité, abandonné, dépité. Le plus malheureux est que l'Etat d'Israël éperonne délibérément, intelligemment, leur dérisoire réaction « solidaire » envers la Palestine, puis ensuite en profiter à sa guise, en calculs stratégiques porteurs, concessions récurrentes - en fait gagner du temps USA y aidant - et d'abaissements existentiels multiformes... Jusqu'à quand ? Allons consulter les astrologues ! En Algérie, la pratique démocratique se limite à des segments restreints d'expression. La presse indépendante en est un. Non totalement libre, certes, néanmoins elle se manifeste tant bien que mal et reste conditionnée par l'évolution, dans ce sens, des états d'esprit des principaux groupements sociétaux. Malgré tout, elle constitue un creuset d'informations perçantes, de critiques constructives et propositions pertinentes. Une liaison citoyen-pouvoir, productive. En principe. Le mouvement partisan s'exerce plutôt mal que bien, du fait de sa polarisation sur des arrangements positionnels à cause, justement, de son manque d'imagination oppositionnelle et de pertinences liées. Un gâchis. Le système de gouvernance en place s'emmurant, avec toutes ses soi-disant certitudes, autour de lui-même tout en affichant dédaigneusement son autosuffisance et annonçant, hautainement, à tout le monde : « Laissez-nous faire, on est dans le bon sens ». La société civile est à l'image de l'école, entre autres représentations de base, qui manifeste contre des programmes scolaires imposés, puis rapidement « assagie » par un ministre qui s'autoproclame paterfamilias. A l'exemple, aussi, du monde du travail volontariste, certes, mais ballotté entre les écartèlements syndicaux et les revendications inaccomplies. Des intellectuels, d'ici et d'ailleurs, méprisés injustement par les élites gouvernantes mais, qu'en revanche, de plus en plus critiques et promoteurs d'idées judicieuses, suggestives et créatrices dans tous les domaines. A l'image des historiens Mohamed Harbi et de Benjamin Stora, qui ont éclairé les sentiers tortueux de notre passé et ses impacts actuels, pour que nous puissions mieux aborder les chemins de l'avenir. Et bien d'autres compétences... Enfin, ces reculs mais aussi des espoirs sont traversés, de temps à autre, par des inspirations profondes éclairant les destins des générations émergentes.. Ces souffles sont toujours féconds. Toujours !! NOTES (1) De Antar ibnou cheddad, poète bédouin et aventurier préislamique, célèbre pour ses amours ratés, ses intrigues et ses coups d'épée légendaires. En vocabulaire arabe, le mot « Antara » est synonyme d'arrogance, de prétention, et du pouvoir exercé par la force de l'épée : « Beçif ». Cette dernière est incrustée dans des étendards de quelques pays arabes. On y danse avec, aux occasions, comme lors des dernières visites des Présidents américain et français. (2) Dans les années 1930, par un mois d'été, à la tombée de la nuit, un « hachani » - factotum rural saharien - tape bruyamment par son... pied la porte de sa maison, en criant fortement à l'adresse de sa conjointe : « ouvre femme, c'est ton seigneur qui arrive ». Il avait beaucoup d'argent sur lui. De la vanité. Une autre fois, par un soir d'hiver, grelottant, il vient tapoter légèrement de... sa main la porte de son domicile, accompagné d'une voix douce : « ouvre mon amour, c'est ton petit hachani qui rentre ». Il n'avait aucun sou dans la poche. De l'imprévoyance. (3) Jadis, dans mon patelin, un juif ne cesse de prier à tue-tête Yahvéh, pour qu'il multiplie les Arabes - ses frères familiarise-t-il - et de leur faire perdre la raison, leur bon sens : « Ikatharhoum ouidébdèb rayhoum ». Déb, c'est un âne en dialecte local. Debdeb, c'est plus qu'un âne. On était à la veille de la première guerre israélo-arabe.          
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